POLITIQUES REGIONALES POUR LA PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT:LE CAS DU BASSIN DU NIL

Abstract: 

This paper is an appraisal of the policies laid down by the Nile Basin to protect the environment. There are many aspects of the sustainable management of the environment in the Nile Basin. However the focus is on the management of water resources ever since the Initiative for the Nile Basin (IBN) was established. The paper outlines the major environmental challenges of each country member of IBN as well as those which pertain to all these countries taken together. It argues that good regional environmental policies conceived in a sincere spirit of cooperation can contribute to the restoration and consolidation of peace.

1. Introduction

 

«Je ferai de l’Egypte le plus désertique de tous les déserts, ses villes seront réduites en ruine comme aucune ville ne l’a jamais été». Sans prétendre expliquer le sens de ce deuxième verset du chapitre 29 du livre d’Ezékiel de l’Ancien Testament, tout laisse comprendre que le phénomène de désertification ne date pas d’hier. La désertification est un  problème environnemental parmi tant d’autres. Dans cette analyse nous nous proposons de faire une appréciation sur les politiques que les pays du bassin du Nil mettent en œuvre pour protéger leur environnement.

 

La conservation et la gestion durable de l’environnement couvre plusieurs domaines. Il s’agit notamment, de la protection de l’atmosphère,  de la gestion durable des sols, de la lutte contre le déboisement,  de la lutte contre la désertification et la sécheresse, de la conservation de la diversité biologique, de la gestion de la biotechnologie, de la protection et de la gestion des océans, de la protection et de la gestion de l’eau douce, du contrôle des substances chimiques toxiques, de la gestion des déchets dangereux, de la gestion des déchets solides et des eaux usées, de la gestion des déchets radioactifs, etc.

 

Quoi que tous ces aspects se retrouvent dans le bassin du Nil, un accent est mis sur la gestion des ressources en eaux depuis la mise en place de l’institution que les pays riverains ont appelé « Initiative du Bassin du Nil ». L’objectif principal visé est de montrer que de bonnes politiques environnementales régionales, bien conçues dans un esprit sincère et coopératif, contribuent à la restauration et/ou à la consolidation de la paix. Pour faire cette analyse, nous ferons d’abord une description succincte du fleuve Nil et de son bassin en termes de défis à relever et de problèmes environnementaux. Nous analyserons ensuite l’historique et la durabilité des tentatives de solutions apportées pour conclure sur les résultats enregistrés, avec un accent sur ceux de la nouvelle organisation qu’est l’Initiative du Bassin du Nil (IBN). 

 

2. Le Nil et son bassin

 

Il y a 261 bassins fluviaux qui sont partagés entre plusieurs Etats dans le monde. Le bassin du Nil fait partie des principaux bassins fluviaux mondiaux les plus contrastés en termes de ressources. Il compte dix Etats riverains. Il s’agit du Burundi, de la République Démocratique du Congo (RDC), de l’Egypte, de l’Erythrée, de l’Ethiopie, du Kenya, de l’Ouganda, du Rwanda, du  Soudan et de la Tanzanie. Certains de ces Etats comptent parmi les dix pays les plus pauvres de la planète. Le plus long fleuve du monde, le Nil s’étend sur plus de 6 700 km entre sa plus lointaine branche mère, le bassin de la Kagera jusqu’à son delta, en Egypte où il rejoint la mer Méditerranée. D’amont en aval on passe des zones les plus arrosées vers les régions les plus désertiques.

 

Une des caractéristiques distinctives du Nil est sa nature transfrontière. De par le globe, seul un autre bassin de fleuve (le Danube) est partagé par plus de pays que le Nil. Son bassin couvre une superficie de 3 millions de km2, soit un dixième de toute la masse continentale de l’Afrique. Plus de 160 millions de personnes vivent dans les limites du bassin et plus de 300 millions habitent dans les dix pays qui se partagent les eaux du Nil soit un tiers de toute la population africaine. L’Erythrée ne semble pas être engagée dans les activités concertées du bassin du Nil. C’est pour cette raison que dans cette analyse ce pays n’est pas souvent mentionné. Même si le bassin est pauvre, le Nil possède les attributs nécessaires pour favoriser un développement profitable à tous les pays riverains: production énergétique et alimentaire, transport, développement industriel, préservation de l’environnement et d’autres activités de développement qui pourraient être augmentés considérablement.

 

 

Le débit du Nil est réglé par six barrages (réservoirs): le haut barrage d’Assouan en Egypte, le barrage sur le Nil blanc en Ouganda et quatre barrages au Soudan. Ces infrastructures pourraient être renforcées par d’autres pour produire de l’hydroélectricité et le développement. On sait que le développement, fût-il industriel, est impensable sans énergie. Le Nil bleu (ou Al Bahr-Azraq) provient du lac Tana de l’Ethiopie pour rencontrer le Nil blanc à Khartoum. Une distance de 800 km est navigable pendant la saison des hautes eaux. Tout développement, qui se veut durable, doit mettre en avant la préservation de l’environnement et cela n’est possible que moyennant un effort coopératif. Une telle coopération promeut l’intégration régionale qui pourrait garantir un développement harmonieux.  

 

Le lac Victoria, par sa vaste superficie et sa forte insolation, fait fonction de purificateur et d’oxygénateur des eaux du Nil. Les grandes questions environnementales sont rarement limitées à un pays donné et sont, en fait, de portée régionale ou mondiale. A titre d’illustration c’est dans les années 1980 que des preuves scientifiques ont mis en évidence le lien entre les émissions anthropiques de gaz à effet de serre (GES) et les risques engendrés par l’évolution du climat. A l’échelle régionale, les effets d’une pollution en amont d’un fleuve se remarquent sur tout son parcours jusqu’en aval c’est-à-dire au-delà des frontières nationales.

 

Dans leurs politiques de protection de l’environnement, les pays du bassin du Nil accordent la priorité à la gestion durable des ressources en eau. En effet, les pays riverains se sont rendus compte que la gestion coopérative des ressources hydriques peut servir de catalyseur de l’intégration régionale, tant au niveau politique qu’économique, et ainsi offrir d’autres avantages beaucoup plus importants que ceux liés à l’existence de ce fleuve. Ces pays ont des problèmes en commun et des défis spécifiques qu’il convient de passer en revue.

 

3. Principaux défis et menaces environnementaux pays par pays

 

3.1. Burundi

 

La source la plus éloignée du Nil est la rivière Kagera qui sillonne le Burundi, le Rwanda, la Tanzanie et l’Ouganda avant de se jeter dans le lac Victoria. En remontant plus en amont la Kagera reçoit les eaux de la Ruvubu qui, à son tour, est alimentée par la Ruvyironza. Autrement dit au niveau du Burundi, la Ruvyironza est considérée comme la plus lointaine source du Nil. Comme défis et menaces environnementaux, on note : déboisement, érosion des sols, dégradation des berges des cours d’eau et des rives des lacs, déclin progressif de la qualité de l’eau à cause de la pression démographique, chasse de la faune sauvage, sécheresse et désertification dans les régions périphériques, pollution bactériologique en provenance des  décharges non traitées.

 

3.2. République Démocratique du Congo (RDC)

 

La rivière Semliki, une des pourvoyeuses des eaux du Nil, prend sa source en RDC avant de faire jonction avec le Nil en Ouganda. La RDC mijote toujours un projet de barrage sur cette rivière. Comme défis et menaces environnementaux, il y a : déboisement, érosion des sols, chasse de la faune sauvage, pollution des cours d’eau et des lacs par des décharges solides, dégradation de plusieurs zones humides, présence de la jacinthe d’eau dans le Kasaï et le Congo mais présence peu significative dans la partie du bassin du Nil.

 

3.3. Egypte

 

Le Nil est la première source, sinon l’unique, des eaux de la vallée d’Egypte. 95% de la population égyptienne vit exclusivement sur les rives du Nil. En tant que pays le plus en aval, l’Egypte se considère comme le pays le plus vulnérable du bassin. D’après Nasser en construisant le haut barrage d’Assouan (5 km de longueur et 100 m de hauteur) « l’Egypte ne serait plus l’otage des pays situés en amont du bassin ». Comme défis et menaces environnementaux, il y a : pollution des eaux et de l’air due à l’exploitation industrielle et la grande concentration démographique, comblement des terres humides, désertification, hydromorphie et salinisation des sols, manque d’assainissement, dégradation des berges des cours d’eau, maintien des conditions du débit du fleuve à un niveau acceptable, présence des plantes aquatiques envahissantes, intrusion de l’eau de mer dans le delta du Nil.

 

3.4. Ethiopie

 

Un des principaux affluents du Nil, appelé Nil bleu, coule à partir des hautes terres d’Ethiopie après avoir collecté son important volume d’eau à partir du lac Tana. L’Ethiopie demande toujours l’utilisation rationnelle, optimale et équitable des ressources en eaux du bassin. L’Ethiopie est allée jusqu’à revendiquer le titre de « possesseur originel » du Nil, et par conséquent le droit prioritaire d’utilisation de ses eaux pour les besoins de l’expansion de son économie et de sa population. Comme défis et menaces environnementaux, il y a : déboisement et surpâturage, érosion des sols, désertification, manque d’assainissement, perte de biodiversité, inondations, sécheresses. L’Ethiopie est le principal pourvoyeur d’eau du Nil (86% d’eau du fleuve).

 

3.5. Kenya

 

Même si le territoire du bassin du Nil représente 8% de tout le territoire national, le Kenya apporte une importante contribution aux ressources en eaux du Nil par ses importantes précipitations qui alimentent le lac Victoria. Comme défis et menaces environnementaux, il y a : pollution des cours d’eau et des lacs, déboisement, désertification, érosion des sols, sédimentation, perte des terres humides, eutrophisation et envahissement des plantes aquatiques.

 

3.6. Ouganda

 

Presqu’entièrement situé dans le bassin du Nil (98% du territoire) dans la région des grands lacs équatoriaux, l’Ouganda apporte une importante contribution aux eaux du fleuve Nil. Un autre principal affluent du Nil, appelé Nil blanc, coule à partir du Nord de l’Ouganda. Comme défis et menaces environnementaux, il y a : assèchement des terres humides, déboisement et perte de biomasse forestière, érosion des sols, empiétement sur les écosystèmes marginaux riverains et des rives des lacs, prolifération de la jacinthe d’eau.

 

 

3.7. Rwanda

 

Le Rwanda contribue aux eaux du lac via la rivière Kagera. Comme défis et menaces environnementaux, il y a :  déboisement, érosion des sols, dégradation des berges des cours d’eau et des rives des lacs, désertification, chasse de la faune sauvage, charges sédimentaires et matériaux toxiques d’origine minière, pollution microbiologique provenant des rejets domestiques non traités.

 

3.8. Soudan

 

A Khartoum le Nil blanc et le Nil bleu se rencontrent pour former le Nil qui coule alors vers la mer Méditerranée. Tout comme l’Egypte, le Soudan s’estime vulnérable et redoute des perturbations du cours du Nil préjudiciables à son agriculture essentiellement irriguée. Comme défis et menaces environnementaux, il y a :  érosion des sols, dégradation des pâturages, sédimentation, désertification, pollution des eaux due essentiellement à la vie humaine ordinaire, chasse de la faune sauvage, inondation, sécheresse, manque d’assainissement, déboisement.

 

3.9. Tanzanie

 

Le bassin du Nil dans ce pays représente 9% de tout le territoire mais sa contribution aux eaux du Nil est importante à cause de la présence de nombreuses zones humides dans cette partie. Feu Mwalimu J. Nyerere fut l’un des premiers leaders des pays riverains en amont à dénoncer l’accord égypto-soudanais sur les eaux du Nil. Cet aspect de l’analyse sera analysé plus bas. Sa doctrine a été entièrement soutenue par l’Ouganda et le Kenya. Comme défis et menaces environnementaux, il y a : pollution de l’eau aggravée par l’accroissement de la population et les activités économiques, feux de brousse et déforestation conduisant à l’érosion des sols et à la haute turbidité des eaux de surface (site http://nilebassin.orgconsulté en septembre 2011).

 

4. Principaux problèmes environnementaux transfrontières dans le bassin

 

Dans le bassin du Nil, plusieurs problèmes environnementaux transfrontières ont été recensés: impacts physiques ou chimiques dont les effets peuvent se faire sentir en aval, perte et dégradation des terres humides et des lacs, manque de système d’alerte précoce, propagation des plantes exotiques, prolifération des plantes aquatiques envahissantes comme la jacinthe d’eau, maladies d’origine hydrique comme le choléra.

 

Toute diminution du débit du fleuve en amont est douloureusement ressentie en aval. Or on sait que certains pays, comme le Burundi, sont souvent victimes des sécheresses elles mêmes liées à des phénomènes de perturbations climatiques. Les terres humides sont considérées comme des réservoirs d’eau par excellence. Ces terres humides connaissent des dégradations dans tous les pays en amont;  ce qui a d’importantes répercussions sur le débit du fleuve Nil.

 

Les plantes exotiques et les plantes aquatiques envahissantes sont une véritable menace pour le bassin. Le cas le plus cité est la jacinthe d’eau qui, quand elle fait son apparition dans un écosystème, fait fuir les ressources biologiques. C’est une mauvaise herbe très envahissante qui se propage très rapidement.

 

L’eau est une arme à double tranchant. Quand elle est potable, elle est source de vie. Quand elle est mal gérée, elle est la source de mort. Point n’est besoin de souligner ici la prolifération des maladies d’origine hydrique comme le choléra et la dysenterie bien connues à l’échelle du bassin. La malaria, elle-même, est une maladie liée à des problèmes d’aménagement du territoire laissant stagner des eaux de pluie ou usées favorables à la prolifération des moustiques. Tous ces problèmes sont vécus sans que les pays riverains soient outillés pour partager, à large échelle, l’information en système d’alerte précoce.

 

A partir de ces problèmes, les pays riverains intériorisent progressivement le besoin de les gérer ensemble. Une gestion durable des ressources en eaux du bassin exige une confrontation de tous les Etats riverains qui doivent avoir une vision partagée. Progressivement les pays riverains comprennent que les affaires du bassin ne peuvent être gérées par un accord signé entre deux Etats pendant la colonisation. C’est cette évolution, au niveau des visions et des faits, qui est décrite plus bas sous le titre de l’historique de la coopération environnementale.

 

5. Brève historique de la coopération environnementale dans le bassin du Nil

 

La coopération sur le développement du Nil n’est pas un fait nouveau. Tout semble avoir commencé entre l’Egypte et le Soudan. La dépendance de l’Egypte à l’égard du Nil est une des composantes essentielles de ses relations avec le Soudan. L’accord sur les eaux du Nil conclu en 1929, entre ces deux pays, représentés par la Grande Bretagne, prévoyait l’utilisation partielle (48 milliards de m3 pour l’Egypte et 4 milliards de m3 pour le Soudan) des eaux (Iskandar, 2002).

 

En 1959 un autre accord fut signé entre les mêmes Etats. Dans ses grandes lignes, les termes de l’accord sont articulés autour six points saillants:

 

-          des droits acquis : c’est-à-dire les 48 milliards et les 4 milliards de m3 d’eau qui devait être utilisée respectivement par l’Egypte et le Soudan jusqu’à ce que l’accord soit signé,

-          des travaux pour le contrôle du Nil et la répartition, c’est-à-dire que les deux pays allaient construire, chacun chez lui, un barrage pour régulariser les eaux du fleuve et réparer les éventuels dégâts causés aux biens d’autrui,

-          des travaux pour l’utilisation des eaux perdues,

-          une coopération technique entre les deux pays en créant une Commission Technique Permanente Mixte ad hoc,

-          des dispositions générales relatives notamment à l’attitude à adopter en cas de négociation, sur les ressources en eaux, avec un autre pays riverain non signataire: une des dispositions prévoit que les autres pays riverains ne peuvent construire de barrages ou d’autres ouvrages de captage ou de soutirage des eaux du Nil et de ses affluents sans l’aval de l’Egypte et du Soudan,

-          d’une gestion transitoire avant de tirer profit du réservoir construit en Egypte qui prévoyait déjà un programme de développement agricole.

 

Pour l’Egypte surpeuplée il était bénéfique de coopérer avec le Soudan à faible densité démographique et riche en ressources hydrauliques et agricoles mais cette coopération devait être comprise comme une complémentarité. Ils ont signé un Protocole, en janvier 1960, qui affirmait la création de la Commission ci haut mentionnée, avec un Secrétariat technique. L’Accord devait dans la suite être étendu à d’autres Etats riverains.

 

L’une des premières initiatives régionales mises en œuvre dans le bassin a été le projet HYDROMET, lancé en 1967 pour favoriser le recueil coordonné de données hydrométéorologiques, qui s’est achevé en 1992. Chaque fois que les autres Etats riverains ont fait valoir leur droit à une part des eaux du Nil, les deux Républiques ont convenu qu’ils examineraient ensemble ces demandes et devaient arriver à un point commun en ce qui les concernait. Si de l’analyse les deux Etats devaient accorder une partie des eaux du Nil à l’un ou l’autre, la quantité acceptée devait être déduite de la part des deux pays à parts égales, calculée à Assouan (Iskandar, 2002).

 

Même si cette disposition semble être une ouverture il y a des chances qu’elle soit plutôt une des raisons de refus de l’accord par les autres Etats riverains. En effet du moment que chaque pays est confronté à ses propres défis en termes de besoins en ressources en eaux sans cesse croissants les pays en amont n’entendent pas restés en position de « quémandeurs ». Ils estiment qu’ils ont les mêmes droits que les signataires de l’accord de 1959 sur ces ressources. Il s’agit d’un droit au partage d’une ressource qui, naturellement appartient à tous.

 

Plus tard d’autres efforts ont été menés pour donner à d’autres pays riverains le droit d’exploitation par le biais d’institutions communes. C’est le cas de l’Undugu(qui signifie fraternité en swahili) initié par l’Egypte en 1985 suite à l’appel du sommet économique africain d’avril 1980, à Lagos, pour la création d’instances régionales et sous-régionales. Il regroupait les représentants des Etats riverains du Nil et la République centrafricaine.

 

En 1994 fut signé un accord de coopération entre l’Egypte, l’Ouganda, le Rwanda, le Soudan, la Tanzanie et le Zaïre (actuel RDC), portant sur la création d'un Comité de Coopération Technique pour la Promotion du Développement et la Protection de l'Environnement du Nil, leTECCONILE (Technical Cooperation Committee for the Promotion of the Development and Environmental Protection of the Nile Bassin). Le TECCONILE a été formé pour axer les efforts sur les quatre actions de développement ci-après:

 

-          planification et gestion des ressources en eaux,

-          renforcement des institutions et développement des ressources humaines,

-          coopération régionale,

-          protection et amélioration de l’environnement.

 

Toutes ces tentatives se sont soldées par des échecs parce qu’elles n’ont pas réussi à gagner la confiance des pays riverains ni à gagner leur participation. Beaucoup de pays les ont refusées parce qu’ils estimaient qu’elles visaient l’institutionnalisation de l’Accord de 1959 jugé  injuste à leur endroit. Pour la Tanzanie, l’Ouganda et le Kenya, partisans de la doctrine Nyerere, l’accord est injuste pour la simple raison qu’il a été signé en leur absence. De façon générale les pays en amont ont refusé  cet accord parce que, selon eux, il incarne les intérêts unilatéraux de l’Egypte et du Soudan. En outre, ils ont l’impression que l’Egypte oriente les politiques du bassin et intervient dans les affaires internes des autres pays riverains.

 

La gestion du fleuve Nil a commencé à progresser vers une meilleure entente entre les dix pays riverains avec la mise en place, en 1995, d’une structure de coopération « Nile River Basin Action Plan » NRBAP, grâce à l’appui de la Banque Mondiale, du PNUD et de l’ACDI (Agence Canadienne de Développement Internationale).

 

En 1996, avec l’appui du PNUD, les Etats riverains ont établi un forum pour engager un processus de dialogue juridique et institutionnel aux fins de parvenir à un accord sur certains principes juridiques et arrangements institutionnels fondamentaux.

 

En 1997, la Banque Mondiale a accepté de prendre la direction et de coordonner les contributions effectuées par les donateurs pour appuyer ses activités. L’adhésion de l’Egypte au Marché Commun des Etats d’Afrique Orientale et australe (COMESA) en 1998 a aidé à apaiser les anciennes tensions surtout avec l’Ethiopie. Rappelons que l’accord de fondation du COMESA a été signé à Kampala en novembre 1993 pour entrer en vigueur en décembre 1994.

 

Franchissant une étape historique, les dix pays du Nil ont uni leurs efforts au sein de l’Initiative du Bassin du Nil (IBN)afin de réaliser un programme de vision commune. Cette vision est de « parvenir au développement socio-économique durable par l’utilisation équitable et l’obtention d’avantages équitables, des ressources en eau communes du bassin du Nil ». Officiellement lancée à Dar-Es-Salam en février 1999, l’IBN est un mécanisme transitoire qui met en place un cadre convenu pour lutter contre la pauvreté.

 

L’IBN est gouvernée par un Conseil des Ministres (COM[1]), l’organe le plus haut de prise de décisions. Le COM est constitué par les ministres des ressources en eau des Etats du bassin du Nil. La présidence du conseil change chaque année. Un organe, le Comité Technique consultatif, a pour rôle d’appuyer le COM. Il est constitué de cadres supérieurs des différents pays. L’IBN a un Secrétariat situé à Entebbe en Ouganda. Il a été lancé officiellement le 3 septembre 1999.

 

6. Politiques environnementales actuelles de l’IBN

 

6.1. Politique Générale

 

La gestion coopérative du bassin du Nil est l’un des plus grands défis inscrits à l’ordre du jour mondial dans le domaine des eaux internationales. Les pays du bassin du Nil savent aujourd’hui que le développement économique et social doit être écologiquement durable. En outre, ils savent pertinemment que si rien n’est fait ils devront composer avec des problèmes comme la famine, une pauvreté extrême, une détérioration de l’environnement et une augmentation rapide de la population.

D’une façon générale les politiques régionales pour la protection de l’environnement tiennent compte de plusieurs paramètres :

 

-          le phénomène de la sécheresse qui envahit plusieurs Etats durant les dernières décennies et surtout le bassin du Nil,

-          l’aggravation du phénomène de la nourriture dans nombre d’Etats de la moitié sud du globe terrestre imposant en conséquence l’extension agricole pour faire face à ce problème,

-          la croissance continue de l’usage des eaux dans les objectifs industriels en plus des besoins croissants en eaux pour différents usages,

-          le phénomène de l’explosion démographique dans nombre de pays, surtout dans le monde en développement, créant la nécessité de l’expansion des projets de développement économique.

 

En 1955 sept pays à savoir Malte, Djibouti, Barbados, Singapour, Bahrain, Koweit et Jordanie étaient considérés comme pays à pénurie d’eau. En 1990 treize pays, dont le Kenya, le Burundi, le Rwanda (du bassin du Nil), sont venus allonger la liste. Les spécialistes estiment qu’en 2030 le déficit en eau du monde arabe variera entre 160 et 260 milliards de m3. La pénurie d’eau, due à la sécheresse, explique en partie les famines qui sont devenues chroniques surtout dans la corne de l’Afrique. L’eau devient rare alors que ses usages ne font que se multiplier. Il n’y a pas longtemps l’eau de pluie suffisait pour garantir la récolte dans la plupart des pays en amont du bassin du Nil. Actuellement l’heure de l’irrigation a sonné. En effet l’explosion démographique, synonyme d’accroissement exponentiel des individus à nourrir, est une réalité. De 1950 à 1997 presque tous les pays du bassin du Nil ont assisté au doublement de leur population et au quadruplement de leur consommation en eau. Les ressources en eaux sont, ipso facto, très sollicitées dans des projets entrepris à des fins de nourrir cette population sans cesse croissante.

 

Comme cela a été déjà mentionné plus haut, les pays du bassin du Nil et leurs partenaires internationaux coopèrent de longue date pour promouvoir le développement économique et, depuis une date récente, la conservation de l’environnement en général et la bonne gestion des ressources en eaux en particulier.

 

L’IBN discute prioritairement des problèmes liés à l’environnement sous forme de ressources en eaux sans pour autant minimiser les autres aspects qui sous- tendent le développement socio-économique durable: la conservation de l’eau, les priorités de développement durable du bassin, la gestion des eaux transfrontalières, la restauration de la paix et de la solidarité, et l’établissement des aspects institutionnels.

 

Dans le cadre de l’évolution des considérations vis-à-vis de l’eau les gestionnaires s’accordent à reconnaître que l’eau est une ressource extrêmement précieuse, multifonctionnelle et en même temps une arme à double tranchant. En tant qu’enjeu géoéconomique, elle doit faire l’objet d’une gestion conservatoire. Si on la considère comme une question géopolitique, elle doit occuper une place centrale dans tous les débats relatifs aux priorités spatiales de paix et de stabilité politique. D’après certains analystes, comme Abdalla Iskandar, l’accord de 1959, entre l’Egypte et le Soudan, « avait réussi » au niveau bilatéral pendant la guerre froide. Peu de temps après les pays en amont, s’estimant lésés dans leurs droits, se sont levés pour le dénoncer et le mettre en cause. Le besoin sinon le devoir de coopérer apparaît comme un moyen préventif de conflits,  c’est la raison pour laquelle la gestion des ressources en eaux du bassin doit se référer à des textes juridiques solides, et des aspects institutionnels reconnus et concertés.

 

6.3. Objectifs de l’IBN

 

L’Initiative procède de la volonté partagée de promouvoir un développement économique durable pour une utilisation équitable des eaux du bassin du Nil avec une juste répartition des avantages de cette ressource. L’Initiative adopte les cinq objectifs prioritaires suivants:

-          développer les ressources du bassin du Nil d’une façon durable et équitable pour réaliser la prospérité, la sécurité et la paix,

-          garantir une gestion efficace de l’eau selon une coopération entre tous les pays riverains du fleuve,

-          assurer la coopération et l’action conjointe entre les pays riverains dans le but de voir chacun des acteurs tirer profit de cette coopération,

-          lutter contre la pauvreté et réaliser l’intégration économique de tous les partenaires,

-          garantir la transformation de ses programmes de planification vers l’application.

 

Si ces objectifs étaient poursuivis effectivement, chaque pays pourrait en bénéficier. Considérons les principaux aspects environnementaux de l’IBN

 

6.3. Principaux aspects des politiques environnementales de l’IBN

 

6.2.1. Approches locale et globale

 

Les pays riverains ont des défis spécifiques à chaque pays et des problèmes partagés. La stratégie adoptée par les pays du bassin est basée sur la clarté des objectifs et des priorités, le respect des lois internationales et l’habileté à continuer le dialogue pacifique entre eux dans un esprit coopératif et de partage des informations disponibles. Les mécanismes de mise en place de cette stratégie sont basés sur une approche à trois voies : la voie non gouvernementale, la voie intergouvernementale et la voie multilatérale qui implique toutes les agences d’aide extérieure.

La voie non gouvernementale prévoit la forte implication des privés dans la gestion des ressources en eaux comme c’est déjà une réalité en Egypte. La voie intergouvernementale renvoie à tous ces efforts de définir des politiques concertées à l’échelle du bassin et des sous bassins avec une vision partagée. La voie multilatérale concerne l’appel lancé aux bailleurs de fonds et autres partenaires traditionnels pour appuyer techniquement et financièrement cette entreprise.

 

Compte tenu des problèmes environnementaux spécifiques chaque Etat riverain adopte des stratégies axées notamment sur :

 

-          la définition d’une politique nationale claire des ressources en eaux,

-          la mise en place des institutions chargées de la gestion des ressources en eaux,

-          la promotion des campagnes de sensibilisation et des programmes d’éducation environnementale,

-          l’adaptation aux changements climatiques comme l’utilisation des variétés culturales résistantes ou tolérantes,

-          la conservation et/ou l’utilisation durable des ressources biologiques(les ressources génétiques, les organismes ou éléments de ceux-ci, les populations ou tout autre élément biotique des écosystèmes ayant une utilisation ou une valeur effective ou potentielle pour l’humanité, d’après le document de stratégie nationale en matière de diversité biologique du Burundi),

-          le suivi de certains phénomènes (comme la sédimentation dans la localité de Gezira au Soudan)

-          la gestion des plantes aquatiques (en Egypte: système du fleuve Nil, canaux d’irrigation et réservoirs d’Assouan et Lac Nasser)

-          la lutte contre l’érosion (au Rwanda et au Burundi), etc.

 

A l’échelle du bassin le principal objectif de l’IBN a été de créer une situation gagnant- gagnant pour partager les bénéfices découlant de l’utilisation des ressources en eaux du Nil.  L’éradication de la pauvreté fait partie des priorités des programmes de l’Initiative du bassin du Nil. Elle comporte plusieurs aspects dont les plus saillants sont les suivants:

 

-          développement et planification de l’investissement et implication du secteur privé,

-          renforcement du mécanisme pour une coopération internationale effective,

-          efforts de mettre en avant la coopération inter Etats dans l’utilisation et la gestion des ressources en eau du Nil,

-          instauration et renforcement du climat de confiance dans toute  la communauté,

-          élaboration et mise en œuvre des politiques et des stratégies de gestion qui garantissent une utilisation durable et profitable aux populations présentes et aux générations futures et cela dans le respect de la qualité de l’eau,

-          tentatives de surveillance (qui consiste en un ensemble des moyens et procédures par lesquels s’opère le suivi de l’état qualitatif des ressources en vue d’en garantir l’utilisation efficiente et durable),

-          tentative de contrôle (qui constitue une des étapes de la surveillance et procède généralement d’un éventail d’itinéraires techniques dont les instruments juridiques et ayant pour objectif de soutenir la gestion des ressources),

-          établissement des procédures pour agir rapidement en réponse aux dangers naturels ou d’origine anthropique,

-          identification, bonne gestion et capitalisation d’énormes potentialités économiques du bassin (hydroélectricité, écotourisme, transport ferroviaire, agriculture spéculative, industrie agro alimentaire, etc.),

-          Organisation des cadres d’échanges entre experts du bassin comme les fameuses « conférences du Nil 2002 »,

-          implication de la population dans les contraintes écologiques liées à la gestion des eaux du Nil ainsi que dans la conception et l’application des projets de développement,

-          investigations sur l’influence et l’étendue de certains phénomènes comme El NINO (au niveau du bassin et l’évaluation de l’impact environnemental régional dans l’East African Community),

 

Cette liste de priorités donne une idée sur l’ampleur des défis à relever à l’échelle du bassin. Certains pays riverains comptent parmi les plus pauvres de la planète. Avec une explosion démographique et une demande accrue en ressources en eaux, pour ne citer que ces défis, tous les domaines accusent des retards dans le développement et toutes les activités à entreprendre deviennent pratiquement des priorités. A y observer de près cette liste met en relief les priorités des priorités. Tous les pays du bassin aspirent au développement économique et social. Les efforts nationaux doivent être couplés aux efforts à entreprendre dans le bassin. Les visions doivent changer.

 

Ces priorités sont ambitieuses mais l’optimisme est permis. En effet la paix et la stabilité sont les principaux garants du développement. Si, de bonne foi, les pays riverains du Nil parviennent à arrêter ensemble les priorités communes, c’est un signe qu’ils peuvent concevoir des programmes et projets durables et cette reprise de conscience ne laisse pas indifférents les bailleurs de fonds. On le verra plus loin avec la forte mobilisation enregistrée en juin 2001 lors de la première réunion du Consortium International de Coopération pour le Nil. Sans anticiper sur la conclusion il y a lieu d’espérer un retour à la paix avec ces priorités. Pour s’en convaincre, si deux à trois pays se mettent d’accord pour construire un barrage hydroélectrique il serait impensable qu’en même temps ils préparent une guerre pouvant anéantir cet ouvrage commun.

 

6.2.2. Programmes et projets de l’IBN

 

Pour concrétiser la vision commune, l’IBN a formulé un Programme d’Action Stratégique formé de deux composantes : le Programme de la Vision Commune et les Programmes d’Action Subsidiaire. Plus de 70 experts nationaux, y compris huit experts techniques, provenant de 9 pays, furent impliqués dans la préparation détaillée du programme. Le portefeuille complet des projets du Programme de la Vision Commune comprend :

 

-          la gestion environnementale et transfrontalière,

-          les échanges régionaux d’électricité dans le bassin du Nil,

-          l’utilisation efficace de l’eau pour la production agricole,

-          la gestion et la planification des ressources d’eau,

-          le développement de la confiance et la participation des parties prenantes (communication),

-          la formation appliquée,

-          le développement socio-économique et le partage des avantages.

 

Les sept projets touchent les principaux secteurs liés au domaine de l’eau ainsi que les thèmes transversaux que les pays riverains considèrent essentiels à une approche intégrée et compréhensive de la gestion et du développement des ressources en eau étant entendu que ce développement serve de catalyseur pour un accroissement du secteur socio économique et un renforcement de la coopération régionale. La plupart de ces projets ont déjà démarré. C’est le cas de la gestion environnementale et transfrontalière.

 

Deux Programmes d’Action Subsidiaire ont été mis sur pied pour deux sous-bassins. Celui du Nil oriental qui regroupe l’Egypte, le Soudan et l’Ethiopie et celui de la région des lacs équatoriaux du Nil qui réunit les six pays de la partie sud du bassin, de même que l’Egypte et le Soudan. Sept projets ont été retenus pour le sous bassin du Nil oriental pour la gestion des ressources en eaux, la gestion des inondations, l’irrigation et le drainage:

 

-          modèle de planification de l’Est du Nil,

-          développement des ressources en eaux,

-          alerte sur les inondations,

-          transmission de l’interconnexion soudano-éthiopien,

-          commerce de l’énergie de l’Est du Nil,

-          irrigation et drainage,

-          gestion des eaux usées.

 

Le sous bassin des lacs équatoriaux a retenu douze projets en rapport avec la lutte contre la pauvreté, le développement économique, le développement agricole et le développement de l’énergie hydroélectrique :

 

-          augmentation de la productivité agricole,

-          développement de la pêche aux lacs Albert et Edouard,

-          développement des ressources hydrauliques au bassin du Mara,

-          développement des ressources hydrauliques au bassin de la Kagera,

-          développement des ressources hydrauliques au bassin du Malakasi- Malaba- Sio,

-          Réduction de la jacinthe d’eau au bassin de la Kagera,

-          Développement de l’énergie hydroélectrique des chutes de Rusumo,

-          Préparation des études de faisabilité pour l’énergie électrique,

-          Interconnexion entre le Kenya et l’Ouganda,

-          Interconnexion entre le Burundi, la RDC et le Rwanda,

-          Interconnexion entre le Burundi et le Rwanda,

-          Interconnexion entre le Rwanda et l’Ouganda.

 

La plupart de ces projets n’attendent que des financements pour démarrer. Et une fois mis en exécution, ils constitueront un cadre qui attirent les investissements et pourront contribuer au développement régional.

 

6.2.3. Le partenariat avec les institutions internationales

 

Le partenariat suppose au moins deux parties, des objectifs compatibles, une volonté de travailler en synergie et un partage des risques et des résultats.  Il suppose aussi la prise des décisions en commun et le partage des avantages et responsabilités. Le Consortium International de Coopération pour le Nil (CICN) a été une des principales concrétisations du partenariat entre l’IBN et les institutions internationales. Sa première réunion a eu lieu à Genève en Suisse du 26 au 28 juin 2001. Elle visait à recueillir des fonds nécessaires à la réalisation d’un groupe de projets du Programme de la Vision Commune et à la préparation d’autres projets d’Action Subsidiaire.

 

Les bailleurs de fonds comprenaient notamment la Banque Mondiale, le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), l’Agence Canadienne de Développement International (ACDI), l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), le Fonds pour l’Environnement Mondial (FEM).  Pour précision, le  FEM est un mécanisme financier qui accorde des dons et des fonds concessionnels aux pays en développement pour des projets et activités visant à protéger l’environnement mondial. En février 1997 le FEM comptait 160 Etats membres.

 

Les bailleurs ont répondu positivement à l’appel du bassin. En effet, faisant suite à la réunion de Genève, un Cartel des fonds du bassin du Nil, administré par la banque mondiale, a été créé en 2003 et plusieurs bailleurs ont donné leur contribution. Les bailleurs avaient comme attentes des pays riverains engagés et prêts à payer des contre parties des financements des projets, maximiser l’appropriation et le contrôle du processus de l’IBN, et assurer une gestion régulière et efficiente des fonds.

 

 

 

 

Conclusion

 

L’objectif principal de l’analyse était de montrer que de bonnes politiques environnementales régionales, bien conçues dans un esprit coopératif, peuvent contribuer à la restauration et/ou à la consolidation de la paix. Nous avons porté notre attention à Initiative du Bassin du Nil.

 

Au niveau mondial le sommet planète Terre a constitué un événement sans précédent dans l’histoire de l’humanité. Il a rassemblé à Rio de Janeiro, le plus grand nombre de Chefs d’Etat jamais réunis. Il a mobilisé l’attention de la communauté mondiale sur les défis les plus urgents auxquels la terre est confrontée. Le sommet a abouti à l’adoption d’un plan d’action global : l’agenda 21 pour tenter de les résoudre (Keating 1992).

 

A l’échelle du bassin du Nil les pays riverains ont compris que l’union fait la force. On pourrait ajouter que l’union fait la paix. Avant l’instauration de l’IBN le manque de confiance était une réalité. Ceux qui ont pris part aux premières réunions de mise en place de l’IBN savent que les Ethiopiens, les Soudanais et les Egyptiens manquaient cruellement de terrain d’entente. Sur terrain l’Egypte et le Soudan considéraient l’eau du Nil comme leur affaire, une ressource vitale pour l’Egypte à contrôler jalousement. Ils se souciaient faiblement des pays en amont. Ils surveillaient «leur eau » à la loupe et aux jumelles à telle enseigne que toute tentative de construire un ouvrage, sous forme de barrage, était considérée comme une sorte de déclaration de guerre. Il fallait à tout prix maintenir le débit du fleuve. A un moment donné l’Ethiopie réclamait le droit prioritaire d’utilisation « de ses eaux » pour les besoins de l’expansion de son économie et de sa population. Voilà les défis que l’analyse a passés en revue.

 

Aujourd’hui les visions doivent changer, beaucoup de choses doivent être obtenues après concertation. Malgré leur diversité et leurs contrastes, les pays du bassin du Nil ont compris qu’ils ont tout à gagner à la coopération qui, rappelons le, a commencé à petite échelle. Les partenaires ont apporté une importante contribution mais il fallait que les pays concernés restaurent cette vision commune à l’échelle du bassin. Petit à petit l’Egypte, l’Ethiopie et le Soudan  comprennent que les ressources en eaux du bassin ne sont pas leur affaire. Elles doivent être partagées équitablement et les bailleurs trouvent un terrain déblayé. En témoignent les projets, déjà définis et en cours d’exécution pour certains,  qui touchent tous les secteurs et qui, en définitive, concourent à la protection des ressources en eaux. A titre d’illustration le développement régional de l’énergie électrique peut réduire la dépendance actuelle de la biomasse qui a comme conséquence la dégradation des ressources en eau. En effet la plupart des pays riverains recourent à la biomasse « bois » pour faire cuire des aliments. L’énergie électrique, une fois produite en quantité suffisante, pourrait permettre de sauver cette biomasse en se substituant au bois de chauffage.

 

En définitive, au niveau éthique, c’est une question de réalisme et de bon sens. La coopération était une nécessité et une question de survie avant même l’ère de la mondialisation. Cela est une réalité au niveau du globe et le sommet de Rio de Janeiro n’a fait qu’un rappel insistant. Aucun pays, fût-il une puissance, ne peut vivre en autarcie. Au niveau du bassin du Nil, et des autres bassins fluviaux, les pays en amont ne peuvent empêcher l’eau de couler. Ils doivent gérer les ressources en eaux en bon père de famille en tenant compte des besoins des pays en aval qui ne pourraient survivre sans ce fleuve.

 


[1]Council of Ministers

Référence Bibliographique: 

Margaret G. Muthoka, G M, Assumpta B. Rego, AB & Z.K. Rimbui 1998,

Environmental Education.Nairobi: Longhorn

Secrétariat de l’Initiative du Bassin du Nil 2001. Programme de la Vision Commune

et Programme d’Action Subsidiaire.Entebbe: IBN

Keating, M 1993. Sommet de la terre 1992, un programme d’action, version pour le

grand public de l’Agenda 21 et des autres accords de Rio.  Genève : Centre pour Notre Avenir à Tous.

Iskandar, C A 2002.  La coopération multilatérale et la question de l’eau au bassin du

Nil, Mémoire d’obtention du DEA de relations internationales, Université  à l’IEP de Paris (inédit)

Initiative du Bassin du Nil 2011.  Profils des pays riverains, http://nilebasin.org

(consulté en 15 septembre 2011

Kinezero, M 2009. Rapport d’une étude sur l’ «évaluation des besoins en renforcement des

capacités en matière de transfert de technologies dans le domaine du changement climatique », Bujumbura

Kinezero, M 2000.  Rapport d’une étude sur l’« analyse de l’équitabilité du partage des

bénéfices découlant de l’exploitation des ressources biologiques », Bujumbura.

Domaine: 

Rubrique: 

Français

Revue Ethique et Société
Fraternité St. Dominique
B.P : 2960 Bujumbura, Burundi

Tél: +257 22 22 6956
Cell: +250 78 639 5583; +257 79 944 690
e-mail : info@res.bi
site web: www.res.bi

 

Fraternité Saint Dominique de Bujumbura

Nous, Dominicains du Burundi sommes des membres d'un Ordre religieux international et multiséculaire dont le charisme fondateur s'articule autour de...

Lire la Suite

Couvent Saint Dominique de Kigali

Nous, Dominicains du Rwanda sommes des membres d'un Ordre religieux international et multiséculaire dont le charisme fondateur s'articule autour de

Lire la Suite