LA PAIX DANS LA RÉGION DES GRANDS LACS : DE LA SÉCURITÉ COMME CESSATION DES HOSTILITÉS À LA PAIX INTÉRIEURE

Abstract: 

This article focuses on the challenge to managepeace and security which are two pandemic related realities, especially in the Great Lakes of Africa. The objective is to deepen the understanding of the relationship between both concepts; peace and security, in the context of permanent conflicts in Africa. Indeed, peace depends on security. This means that there should be security as a condition for peace to materialize. In other words, where there is no peace, there is no security, and alternatively, where there is insecurity, there is no peace. Thus, peace and security play a complementary distribution role. Convincingly, there cannot be peace and security at the same time. This is why peace and security are more required in places where conflicts have lasted longer than in areas without conflicts. The Great Lakes Region of Africa and Burundi, in particular, has remained a sensitive case to date. As a result, it is the degree of crises effectiveness that can measure the proposed solutions to diversified crises in the region since causes of crises should be identified first to get adequate solutions to them. Therefore, the puzzling question remains, “How to genuinely pass from peace as absence of war or cessation of hostilities to peace in people’s heart as a sustainable requirement for a pacific social coexistence?”  That is the question this article attempts to answer in this article.

1.                   Introduction

Aborder le thème de la paix dans le cadre précis de la Région des Grands Lacs africains (RGLn’est pas une tâche facile eu égard à la complexité des enjeux socio-politiques en place depuis fort longtemps. Convaincu qu’un fait déclencheur des conflits doit être considéré comme s’inscrivant dans la suite de ses antécédents, je trouve que l’analyse de la situation socio-politique que traversent les pays de la RGL, serait tronquée si elle passe sous silence les différentes crises qui ont suivi les indépendances.

Mais alors, comment s’expliquent les conflits répétitifs qui ont endeuillé d’innombrables familles ? Quelles solutions ont-elles préconisées ? Pourquoi n’ont-elles pas tenues? Sous quel visage la situation sécuritaire actuelle au Burundi laisse-t-elle entrevoir son avenir et quelle forme de gouvernance proposer pour la paix ? Quelle forme de gouvernance est susceptible de conduire à une cohésion sociale durable et de , à un développement authentique? Autant de questions qui demandent une sorte de dépistage des maux de la sous-région et une prescription d’un remède qui pourrait être efficace étant donné la gravité de la maladie.

Ma réflexion comporte trois articulations:

-          Aperçu de l’histoire conflictuelle des États de la RGL (De l’indépendance jusqu’à nos jours) ;

-          Les solutions proposées en vue de restaurer la sécurité et la paix pour le cas du Burundi; “Radioscopie” (regard projectif) sur l’avenir du Burundi.

-          La conclusion suivra.

 

  1.  Aperçu de l’histoire conflictuelle de la Région des Grands Lacs                     

Les pays africains, spécialement ceux de la RGL, ont accédé à l’indépendance dans un contexte complexe. Qu’il suffise de rappeler jusqu’à quel point les colonisateurs, surtout les Belges, ont exporté leurs références ethniques dans la région pour dresser les unes contre les autres, les identités socio-ethniques (Hutu et Tutsi) qui existaient au Rwanda et au Burundi. Cela a favorisé l’implantation de leur administration basée sur le système dit “diviser pour régner” (divide et impera). Ils ont fait une lecture des réalités sociales de nos pays avec les lunettes des considérations anthropologiques occidentales alors prévalantes. C’est dans ce contexte que fut menée la lutte pour les indépendances.

 

2.1.    Crises de la sous-région, trente ans après les indépendances

En analysant l’histoire de la RGL à partir des années de l’accession aux indépendances, mon attention se tourne surtout vers les deux pays frères, le Burundi et le Rwanda, pour la simple raison qu’ils ont une organisation précoloniale et un passé colonial presque commun ; ils connaissent également le problème récurrent des tensions entre Hutu et Tutsi à des degrés divers. Ce problème s’étend sur l’Est de la République Démocratique du Congo qui, pourtant, avait réussi pendant les trente ans qui ont suivi l’indépendance, à susciter et maintenir un sentiment d’identité nationale (cf. Braeckman 1996 : 10).

L’indépendance acquise dans les deux États, Burundi et Rwanda,  le 1er juillet 1962, est survenue sur fond des tensions ethniques. Au Burundi, des tensions étaient observables entre les Hutu et les Tutsi d’une part et entre le Parti démocratique chrétien (PDC) de Joseph Birori et Jean Ntidendereza de la dynastie de Batare, soutenus par la tutelle et l’Union pour le progrès national (UPRONA) du Prince Louis Rwagasore de la dynastie de Bezi d’autre part (cf. Kubwayo in AGnews 2002). C’est dans ces tensions incessantes que Rwagasore, leader de l’indépendance, sera assassiné le 13 octobre 1961. Au Rwanda, la révolution de 1959 met fin à la royauté. Comme le font remarquer Elias et Helbig (1991 : 73), « le régime colonial d’abord, puis pour le Rwanda les deux régimes qui se sont succédés et, pour le Burundi, les régimes qui ont dirigé le pays après la période plus ou moins clivée de 1960-1965, ont tous démontré qu’ils avaient besoin des divisions ethniques pour se renforcer et se légitimer à leurs propres yeux ». Cela ne cessera d’être une réalité et c’est ce qui explique les crises intermittentes dans ces États : un événement se produit comme en représailles à un fait passé, entraînant ainsi les peuples dans une spirale de violence. La guerre de 1990 et le génocide de 1994 au Rwanda ne peuvent se comprendre sans remonter à la Révolution de 1959, et même reculer davantage.

Au Burundi, la liste des années sombres prend la forme d’une litanie terrifiante. Les dates des massacres les plus évoquées au cours des trente ans après l’indépendance sont 1965, 1969, 1972, 1988, 1991 et 1993. Il serait prétentieux hic et nunc de chercher à entrer en détails dans le déroulement des événements tellement la littérature se révèle abondante à ce sujet. Pour ne citer que des monographies, il y a entre autres les productions de Jean-Pierre Chrétien, notamment Burundi, la fracture identitaire : logique de violence et certitudes ethniques (en collaboration avec  Mukuri) (2002); La crise d’août 1988 au Burundi (1989) ; Le défi de l’ethnisme : Rwanda et Burundi : 1990-1996 (1997) ; celle de Reyntjens : L’Afrique des Grands Lacs. Rwanda, Burundi : 1988-1994 (1994), sans oublier celles des nationaux comme Burundi : de la nation aux ethnies ou la naissance d’une élite tribalisée (1998)de Mariro et Burundi : de la révolution au régionalisme (1992) de Marc Manirakiza.

Ce que nous pouvons retenir des trente années écoulées depuis 1965, c’est que le Burundi était sous le régime de la République avec des chefs d’État militaires qui détenaient le pouvoir par putsch. Le pluralisme politique mis en place à la veille de l’indépendance a cédé le pas au parti unique, l’UPRONA, et cette situation a marginalisé les Hutu pour ce qui est du savoir (surtout l’enseignement supérieur), du pouvoir et de l’avoir. Cet état de fait auquel s’ajoutent les différents moments de troubles sanglants, a poussé certains des moins favorisés à se résigner, d’autres à prendre le chemin de l’exil. On assiste à une sorte d’échange dans les deux pays : les Tutsi chassés du Rwanda par les Hutu au pouvoir depuis 1959 trouvent bon accueil au Burundi et en Ouganda, et bon nombre de Hutu trouvent refuge au Rwanda, en Tanzanie et en RDC. C’est dans ce sens qu’en évoquant le Rwanda et le Burundi quant à leur histoire conflictuelle, Reyntjens parle de « faux jumeaux » et de « frères ennemis aux sources du Nil » ; il justifie ce deuxième qualificatif en pariant qu’« il est moins que certain que le Burundi aurait connu l’expérience de ses grands drames si la révolution rwandaise [celle de 1959] n’avait pas eu lieu » (1994 : 51). Il aurait ainsi joué le rôle d’instigateur lors des tentatives de coup d’État au Burundi en 1965 et 1972, générant des massacres à caractère génocidaire. Les bourreaux affirment avoir agi pour contrecarrer un génocide en gestation. Ce qui est sûr, c’est qu’il manque de vérité sur les mobiles de ces troubles. Or c’est la vérité qui nous rendra libres (Jn 8,32) qui nous fera tourner la page une fois pour toutes. Espérons que grâce à la Commission Vérité et Réconciliation (CVR), les Burundais pourront enfin savoir ce qui s’est passé réellement.

L’implication est la formation récurrente des rébellions visant à renverser la tendance. C’est dans cette logique qu’il faut situer, pour le cas du Burundi, le déclenchement des massacres de Ntega et Marangara (au nord) en août 1988 où, après les tueries des Tutsi attribuées aux rebelles du PALIPEHUTU-FNL, les militaires font des représailles contre la population hutu. Ce triste événement qui a  fait environ vingt mille victimes a suscité une prise de conscience de la part des dirigeants pour dépasser l’ethnisme. Le Burundi sera encore déstabilisé par les mêmes rebelles dans des attaques perpétrées à Bujumbura et au nord-ouest en octobre 1991. Le carnage le plus macabre fut celui de 1993 suite à l’assassinat par des militaires burundais, du président hutu Melchior Ndadaye (trois mois après son élection démocratique) et de certains de ses proches collaborateurs entre autres les Hon. Pontien Karibwami et Jules Bimazubute, Juvénal Ndayikeza et Richard Ndikumwami respectivement président, vice-président de l’Assemblée nationale, ministre de l’intérieur et directeur de la documentation nationale. Ces massacres auront fait, d’après les estimations de l’ONU, environ trois cent mille morts.

Ce qu’il faut constater dans toutes ces violences, c’est que les Hutu et les Tutsi se lancent la balle quand il s’agit de qualifier tel ou tel autre massacre de génocide et chaque groupe ethnique se croit dans la vérité. Quant à ceux qui sont au pouvoir, ils s’ingénient à justifier leur répression sanglante chaque fois qu’une situation d’insécurité éclate. Voici en guise d’exemple la Déclaration que la délégation du Burundi a présentée aux Nations Unions, le 28 juillet 1972, à propos des massacres qui venaient d’être opérés, telle que la rapporte Chrétien :

Nous informons l’opinion internationale sur le fait que le gouvernement burundais s’est strictement conformé à la loi de notre code pénal qui reconnaît la responsabilité individuelle de tout citoyen. Il a infligé une punition mérité à des criminels qui ont plongé notre pays dans une nuit de cauchemar, comme le ferait n’importe quel gouvernement placé dans une situation semblable… Vous avez pu constater la participation massive de mercenaires mulélistes, qui sont d’origine zaïroise, et qui voulaient se servir du Burundi comme base d’attaques contre leur pays… Vous avez également appris le rôle de l’ex-roi Ntare V du Burundi qui, à la faveur des événements, était prêt à lancer une armée de mercenaires qu’il avait patiemment constituée depuis six ans… (Chrétien 1991: 22-23).

On voit combien les uns et les autres cherchent à pencher sur le côté qui les arrange surtout quand on évoque l’événement pour servir d’appui à l’une ou l’autre revendication. Cependant, ce qu’il faut noter, c’est qu’à chaque crise, les protagonistes ont toujours tenté de trouver une solution allant souvent dans le sens de garder les acquis pour les uns et de conquérir une part plus ou moins grande du “gâteau” national pour les autres. Mais avant d’en parler, il importe de passer en revue les mutations qu’a connues la RGL au cours des deux dernières décennies.

2.2.   Les mutations des deux dernières décennies dans la RGL

Le bouillonnement historique que la RGL depuis les années 1993 à nos jours ne saurait s’interpréter qu’en remontant aux années 1990 quand la vague démocratique s’empare des nations africaines. En effet, c’est en ce moment que l’Afrique entre dans une nouvelle phase de son histoire en acceptant avec quelque résistance, la transition démocratique. Comment en effet, pouvait-il en être autrement dans les pays comme ceux de la sous-région où le partage du pouvoir entre les différentes composantes de la société était quasi inexistant ? On comprend pourquoi les espoirs suscités par ce système de gouvernance – entre autres la reconnaissance du pluralisme, de l’opposition politique et la proclamation des droits et libertés, la construction progressive de l’État de droit et l’organisation d’élections disputées débouchant sur une alternance politique (cf. Guèye 2009) – ont vite volé en éclat, le Burundi ne faisant pas exception.

 

Ces vingt dernières années ont été marquées par des faits traumatisants, mais aussi par des efforts visant à les surmonter pour asseoir la paix et le développement durables. De la RDC au Burundi en passant par le Rwanda, le processus démocratique s’accompagne d’une insécurité qui augmente le nombre de réfugiés et suscite la formation des groupes rebelles. En RDC, la démocratisation fut proclamée par le président Maréchal Mobutu Sese Seko en avril 1990, lui qui venait de gouverner le pays depuis novembre 1965. Deux ans après, en février 1992, il y eut écoulement de sang à Kinshasa suite à une répression contre les participants à une “marche de l’espoir” visant à réclamer une nouvelle Constitution qui intègre les valeurs démocratiques. En ces années, l’inflation de la monnaie galope et les militaires non-payés se livrent avec violence au pillage. C’est dans cette situation de manque d’enthousiasme chez ceux qui devaient défendre le pays qu’en 1996 la rébellion naissante, l’Association des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo (AFDL), composée de rwandais et ougandais et des Congolaiss fatigués par la répression mobutiste, ne tardera pas à envahir Kinshasa. On peut se demander pourquoi la présence des Rwandais et des Ougandais. La réponse est que le Zaïre – nom donné au Congo par Mobutu en 1971 – venait d’accueillir sur son sol, en Ituri, les réfugiés Hutu rwandais fuyant les attaques de l’Armée Patriotique Rwandaise (APR) à la suite du génocide de 1994 contre les Tutsi. Mobutu est renversé et c’est Laurent-Désiré Kabila, chef de la rébellion, qui s’autoproclame président le 17 mai 1997. Il devient autoritaire comme son prédécesseur en confisquant tous les pouvoirs, étranglant ainsi le pluralisme à peine né et il rebaptise le pays avec un nom nouveau : République Démocratique du Congo (RDC) même si les traits fondamentaux de la démocratie n’étaient pas évidents. Une année après, Kabila ne conjugue plus avec ses anciens alliés, le Rwanda et l’Ouganda qui aussitôt lui déclarent la guerre que Reyntjens nomme par le titre de son ouvrage, “la grande guerre africaine”[1] (Reyntjens 2009). Le président Laurent Désiré Kabila est assassiné le 16 janvier 2001 et fut succédé par son fils Joseph Kabila qui met en place en 2003 une transition démocratique chargée de préparer les élections dont il devient vainqueur deux fois de suite en 2006 et en 2011.

 

Qu’en est-il du Burundi ? Pendant que le Burundi s’apprêtait à célébrer son 30e anniversaire de son indépendance, le président Major Pierre Buyoya lance le pays dans une transition démocratique par l’organisation du référendum d’une nouvelle Constitution incluant les principes démocratiques entre autres le pluralisme politique. Le référendum adopte la Constitution le 9 mars 1992. Une année après, le 1er juin 1993, les premières élections pluralistes postindépendances sont organisées et sont remportées par Melchior Ndadaye, candidat du Front pour la Démocratie du Burundi (FRODEBU). Malgré la nomination comme premier ministre d’une Tutsi Sylvie Kinigi qui devait former un gouvernement qui tient compte de toutes les tendances, certains Tutsi gardent la peur de cette victoire légale du parti majoritairement hutu et passent par l’armée composée essentiellement de Tutsi pour contourner cette nouveauté politique. L’horreur couvre le pays à partir du 21 octobre. Les Hutu n’ont pas supporté cette décapitation de la démocratie, eux qui voyaient dans son instauration l’occasion incontournable d’accession au pouvoir, vue leur majorité parmi les composantes ethniques du pays, gardant sans doute en mémoire les atrocités subies lors des massacres précédents surtout ceux de 1972. À l’intérieur du pays, ils se jettent sur les Tutsi et l’armée réagit par une répression sanglante. La capitale qui semblait épargnée connut, vers mars-avril 1994, une sorte de balkanisation des quartiers (quartiers réservés aux Hutu et ceux réservés aux Tutsi avec chasses à l’homme ciblées dans les rues en plein jour). Des milices voient le jour notamment la Génération Démocratique du Burundi (GEDEBU) et les Forces pour la Défense de la Démocratie (FDD)[2] du côté des Hutu, et les “Sans échecs” et “Sans défaite” du côté des Tutsi. En plus des morts, ces violences ont fait de nombreux réfugiés dans les pays voisins et des déplacés regroupés à l’intérieur du pays, des camps dont certains sont encore présents sur le territoire burundais.

 

Après environ trois mois de gouvernement intérimaire du pays assuré par le premier ministre Mme Kinigi, Cyprien Ntaryamira issu du parti FRODEBU est élu président de la République le 14 janvier 1994 et il ne dura que deux mois puisqu’il est emporté par l’attentat contre l’avion de son homologue rwandais Juvénal Habyarimana le 6 avril, au-dessus de Kigali, au retour d’un sommet à Dar es-Salaam en Tanzanie. Ce sera au Président Sylvestre Ntibantunganya, alors président de l’Assemblée nationale, de lui succéder le 30 septembre de la même année, après une courte durée comme président ad intérim. Il est lui aussi renversé le 25 juillet 1996 par coup d’État qui ramène le major Pierre Buyoya au pouvoir. Dans l’entretemps, des groupes rebelles d’obédience hutu se sont formés avec pour base arrière la RDC et la Tanzanie, les principaux étant le PALIPEHUTU-FNL, le CNDD-FDD[3] et le FROLINA. Leurs attaques intempestives sur l’ensemble du territoire vont pousser les politiciens aux négociations d’Arusha (Tanzanie), négociations qui ont abouti à un accord de partage du pouvoir, le 10 août 2000. La transition démocratique est assurée successivement par les présidents Pierre Buyoya de l’UPRONA et Domitien Ndayizeye du FRODEBU et a été suivie par des élections en 2005 et en 2010, remportées à chaque fois par Pierre Nkurunziza, candidat du CNDD-FDD.

Vers fin 2014, des débats controversés ont surgi sur le statut/qualification de la période de présidence de Nkurunziza allant de 2005 à 2010, ce qui poussa le CNDD-FDD à désigner encore une fois Nkurunziza comme leur candidat pour les élections présidentielles de 2015. Aussitôt éclatèrent dans la capitale, des manifestations contre le “troisième” perçu comme violation de la Constitution et l’Accord d’Arusha. Ces manifestations ont dégénéré en une insécurité grandissante. Le 13 mai, il y eut tentative de coup d’État en vue de sauver l’accord d’Arusha et de restaurer la sécurité mise à mal par les manifestations, si l’on en croit les auteurs.

 

Nous pouvons donc nous poser certaines questions: pourquoi ces crises répétitives ? Pourquoi les Burundais semblent ne pas tirer des leçons de l’histoire ? Pourquoi les propositions de sortie de crise ne tiennent pas pour longtemps? Pourquoi la paix durable reste-t-elle une utopie dans RGL en général ? Des questions auxquelles qui demandent une réponse.

 

  1. Des solutions pour la sécurité et de la paix au Burundi

Comme nous venons de le voir, les violences qui se sont succédé au Burundi – comme d’ailleurs dans les autres pays de la RGL – sont conséquentes à une idéologie ethnocentrique coloniale succédant aux conflits entre les dynasties (quelquefois aussi entre les clans) et que les différents dirigeants postcoloniaux n’ont cessé d’alimenter, suscitant l’orgueil des uns sur les autres, les moins favorisés ne pouvant que se soumettre au moment où les plus clairvoyants d’entre eux se coalisaient pour voir comment remédier à l’inquiétante situation. Un simple coup d’œil sur les solutions avancées pour juguler aux conflits interethniques révèle que celles-ci peuvent se répartir en trois principaux groupes.

3.1.    Les solutions d’allure répressive ou de tendance belliqueuse

J’ai déjà évoqué des cas de répression exercée par le pouvoir en se servant des forces de l’ordre, des tentatives de renversement du pouvoir par la force, des massacres opérés par les rebelles et quelquefois aussi par la population (comme ceux de 1993), etc. Dans un cas comme dans un autre, on croit trouver un moyen de remédier à la situation. Cependant, si ces moyens peuvent installer le pays à une accalmie, la situation “se normalise” après le versement du sang souvent innocent et laisse beaucoup de cœurs meurtris, ce qui peut générer des traumatismes psychiques et susciter un esprit de vengeance qui gangrenent la société. Les Burundais savent bien exprimer cet état de fait : «guhekera ku nyonzo» (littéralement [litt.] porter l’enfant sur le dos ayant un abcès).Mahatma Gandhi enseignait qu’il faut combattre la violence par la non-violence. Mais des questions demeurent : et si le système ne change pas malgré les actions non-violentes ? Faut-il, pour changer la donne, suivre la maxime selon laquelle « on ne fait pas de l’omelette sans casser les œufs » ? Ne serait-ce pas pratiquer le principe des Romains : Si tu veux la paix, prépare la guerre, qui, au lieu de rétablir la vraie paix, appelle chaque nation ou groupe humain à être sur le qui-vive, établissant un climat de peur et de tensions perpétuelles ou une sécurité dans la surpuissance ?

 

3.2.    La Charte de l’unité et le processus de démocratisation

La première catégorie de solutions ayant montré ses failles, les Burundais ont recouru à d’autres susceptibles de relever la nation. C’est notamment la stratégie adoptée par le régime de la troisième République, après les événements de 1988 à Ntega et Marangara. Le président Buyoya a eu l’intuition d’impliquer toutes ethnies par l’intégration des Hutu – jusqu’alors exclus – dans les affaires administratives et par la promotion de l’unité nationale. Une “Commission nationale chargée d’étudier la question de l’unité nationale”[4] fut créée. Cette Commission composée de douze Tutsi et douze Hutu est mise en place le 28 septembre 1988 et un mois après le président Buyoya a nommé comme premier ministre Hutu, Adrien Sibomana pour former un nouveau gouvernement à parité Hutu-Tutsi (Brisset 1990 : 4).

Cette Commission a pu élaborer une Charte de l’unité nationale rendue publique en avril 1990, adoptée par référendum le 5 février de l’année. Il est intéressant de remarquer que cette Charte ne devrait pas être simplement théorique vu le caractère contraignant d’un bon nombre d’articles au sujet de la présence obligatoire des diverses composantes de la population burundaise dans les institutions qui régissent la nation. Il s’agit entre autres des articles 55, 65, 84, 101 et 158 qui parlent respectivement de l’organisation et de la direction des partis politiques, de la présentation d’un candidat aux élections présidentielles, de la composition du gouvernement, de la composition des listes des candidats aux élections législatives et du choix des membres du Conseil de l’unité nationale. Toutefois, dans son analyse de la Charte de l’unité nationale, Reyntjens s’étonne qu’en parlant des “diverses composantes de la population” concernant les élections législatives, ni dans cette Charte ni dans un rapport de la Commission constitutionnelle d’août 1991, il n’est fait mention des clans « qui jouent pourtant un rôle important au centre du pouvoir » (in Revue Politique africaine).

La question qui ne peut rester en suspens est celle de savoir le statut de la Charte de l’unité nationale et la conviction du peuple burundais et surtout des dirigeants qui jurent sur elle lors de leur investiture, à commencer par ceux qui étaient en place quand elle fut adoptée. À la première partie de la question, il faut répondre avec Reyntjens (cf. Ibid.) que cette Charte pose un problème constitutionnel à plus d’un titre. D’abord, dans le serment, la Charte précède la Constitution[5] comme si elle est supérieure à celle-ci. Mais on peut dire que cette confusion est réglée par l’art. 141 de la Constitution de 1992 qui stipule que « dans l’exercice de ses fonctions, le juge n’est soumis qu’à la Constitution et à la loi. » La Constitution ne dit rien sur la révision de la Charte, ce qui serait d’ailleurs une contradiction puisqu’elle-même se dit “irrévocable” et “inamendable”. On peut lire dans ses dispositions finales ce qui suit : « Aucun régime, aucune institution, aucune loi, aucune disposition de quelque nature que ce soit n’est habilité à l’abroger ni à s’y soustraire. » Même le Conseil de l’unité nationale dont parle la Constitution n’a pas de prérogative sur la Charte elle-même. Enfin, en tant que document qui s’intègre mal dans un agencement juridique à statut constitutionnel, le risque est grand que la Charte de l’unité nationale soit mal utilisée afin de justifier l’exclusion d’un parti ou d’un candidat aux élections.

Concernant la conviction des citoyens burundais et de ceux qui prêtent serment sur la Charte de l’unité nationale, il faut parler surtout des dirigeants suivant l’adage burundais qui dit « Umwera uva i bukuru ugakwira hose » (litt. : La blancheur des chefs se répand partout). À ce propos, il serait difficile de juger l’intention ou le sentiment qui anime en ce moment tel ou tel dirigeant. Mais, toujours est-il que dans la vie humaine aussi bien individuelle que collective, l’homme a besoin des repères pour s’orienter vers le bien. La Charte de l’unité nationale en est un. Par ailleurs, force est de constater que l’élaboration de cette Charte prend en compte l’idéal démocratique, véritable expression de la justice politique.

3.3.   Négociations et l’Accord d’Arusha : Opportunités pour la paix et la stabilité

Durant la décennie (1993-2003) où le Burundi connaissait une des plus graves déstabilisations de son histoire, les protagonistes de la vie politique ont vu qu’il n’y a d’autre moyen de sauver la nation que de s’asseoir ensemble et de dialoguer même si parfois l’objectif était de négocier des postes à occuper. Ce fut le cas des négociations de Kigobe en janvier 1994 et de Kajaga en février de la même année (cf. Anganda Luhata, in Revue Mouvements et enjeux sociaux 003/2002). Ce fut aussi le cas pour les pourparlers ayant abouti à la Convention de gouvernement signé le 10 septembre 1994. Tous ces cadres de dialogue n’ont pas ramené la sécurité et la paix malgré le franc et ouvert débat de tous les participants sur les problèmes du pays. Tout autre est le dialogue qui a abouti à l’Accord d’Arusha. Qu’a-t-il de plus spécifique ?

Selon le Rapport du Centre for Humanitarian Dialogue, l’Accord d’Arusha ne peut se comprendre qu’à la lumière des événements qui l’ont, soit préparé, soit complété (2008 : 15). Dans cette première catégorie, le Rapport évoque les Sommets du Caire et de Tunis de 1995 et 1996, les pourparlers de Sant’Egidio, à Rome (1996-1997) et le processus conduisant à l’Accord (1998-2000). Ce qu’il faut avant tout savoir, c’est qu’après le putsch du 25 juillet 1996 qui a chassé du pouvoir le président Sylvestre Ntibantunganya et installé l’ancien président le Major Pierre Buyoya, le pays a été frappé par des sanctions dont un embargo total. L’une et la plus importante des conditions pour que ces sanctions soient levées, c’était que soient lancées des négociations immédiates et inconditionnelles entre tous les groupes concernés. C’est dans ce cadre que se situent les pourparlers secrets entre le pouvoir de Bujumbura et la principale rébellion CNDD-FDD sous l’égide de Sant’Egidio.

Concernant le processus ayant accouché l’Accord d’Arusha comme tel, il importe de relever certains aspects qui ont lancé le pays sur la voie d’une paix  comme silence des armes résultant de l’arrêt des affrontements entre l’armée régulière et les rebelles. L’Accord tel que le présente le texte final a été le fruit d’intenses débats publics entre les partis, le Gouvernement et l’Assemblée Nationale sous l’encadrement de la communauté internationale et de la région. Ces dernières « avaient dans l’esprit de faire du Burundi un laboratoire d’expérimentation pour les solutions africaines aux problèmes africains dans la région des Grands Lacs » (Rapport de l’ICG 2000).

Dans un pays où tous les conflits ont toujours eu un cachet ethnique à l’instar de ceux du voisin le Rwanda, les protagonistes et le médiateur ont jugé bon qu’à l’agenda des négociations figurent les discussions sur les quotas ethniques dans tous les secteurs clés de la vie du pays. L’histoire témoigne que ce fait qui exigeait des concessions unilatérales du camp tutsi aux camps hutu et twa, a pu stabiliser le pays malgré les subdivisions qui ne respectaient pas comme telles les proportions ethniques existantes. La différence avec ce qui a eu lieu en 1994, c’est qu’il n’y a visiblement pas cette fois-ci ceux qui sont déterminés à maintenir le pays dans le désordre.

En plus de la question des quotas qui est traitée dans l’un des Protocoles, les pourparlers se sont penchés sur des questions plus importantes pour accorder le pays au diapason des autres États démocratiques. Cela s’est fait au sein des cinq commissions auxquelles correspondaient les cinq Protocoles de l’Accord. Le Protocole I concerne la nature du conflit burundais, les problèmes de génocide et d’exclusion et les solutions à y apporter ; le Protocole II porte sur la Démocratie et la bonne gouvernance ; le Protocole III traite de la Paix et de la sécurité pour tous ; le Protocole IV parle de la Reconstruction et du développement et enfin, le Protocole V se concentre sur les Garanties pour l’application de l’Accord.

Le texte signé avait subi des amendements non moins importants entre autres la séparation des pouvoirs en ce qui concerne la magistrature, la limitation à 67% de la représentation d’une ethnie chez les administrateurs communaux ainsi que les fameuses réserves émises par le gouvernement et les partis à dominance tutsi (G10) ayant trait notamment à la définition du système électoral, au problème de l’amnistie, à la part du G7 (partis à dominance hutu) et du G10 dans la gouvernance transitionnelle, à la possibilité de ratifier l’accord sans qu’il y ait cessez-le feu. Ces amendements se présentent comme un projet d’accord dans un autre et dissimulent difficilement un résidu de l’esprit qui régnait lors des négociations de 1994. Toutes ces résolutions constituent, malgré certaines limites, le fondement et la justification de la relative paix dont le Burundi vient de jouir depuis environ dix ans. 

  1. Vers quels lendemains s’acheminent les Burundais ?

Durant les dix dernières années le Burundi a connu une période de stabilité du point de vue de la paix et de la sécurité par rapport aux années précédentes, quoiqu’il n’ait pas manqué des exécutions extrajudiciaires, des assassinats politiques et des violences contre l’État, comme le montre l’article de Siméon Barumwete (cf. Barumwete 2015 : 166-174). Mais, au regard de la recrudescence des violences depuis le 26 avril 2015, au lendemain de la désignation de Pierre Nkurunziza comme candidat aux élections présidentielles par son parti le CNDD-FDD, une question rebondit : vers quels lendemains s’acheminent les Burundais ? Pour répondre à cette question, il faut confronter le problème de gouvernance adapté à la situation burundaise. Ce point, une fois mûri, pourrait inspirer même les pays de la sous-région étant donné que les problèmes liés aux avis divergents sur la question des mandats présidentiels est en train de les toucher de plein fouet comme nous pouvons le voir en RDC, au Rwanda et au Congo Brazzaville.

 

4.1.    Quel type de gouvernance adapté à la situation burundaise ? 

Depuis les années 1990, le Burundi est entré dans le processus de démocratisation. Les analystes convergent tous sur l’idée que la démocratie est un régime politique le moins mauvais de tous, en tant qu’elle est étymologiquement la gouvernance du peuple, émanant du peuple lui-même et s’exerçant, par conséquent, pour lui. La démocratie est le régime par excellence qui, comme le dira Jacques Maritain, reconnaît le primat de l’homme de l’humanité commune (cf. Maritain 1945 : 76-77), en respectant et en faisant respecter ses droits civiques : droit à la vie, à la propriété, à l’éducation, etc. Elle est le système politique dans lequel le peuple est souverain, ce qui veut dire que c’est lui qui décide de sa propre destinée. C’est donc le type de gouvernance qu’il faut pour les peuples, y compris le peuple burundais. Mais, ce n’est pas là la question pour le Burundi et pour les pays de la RGL ; le problème est plutôt de savoir quel type de démocratie il faut pour avoir la paix entre les différentes composantes de la société d’autant plus qu’il n’y a pas qu’une seule forme de démocratie. Quel modèle de démocratie est-il adapté au Burundi pour arrêter définitivement la spirale de violence qui l’a longtemps défiguré ? Pour répondre à cette question, passons en revue les principales formes de démocratie.

 

4.1.1.La démocratie représentative

Elle est la forme la plus connue et la plus générale au point que toutes les autres formes en sont des spécifications. Elle provient du fait que tout le monde ne peut gouverner tout le monde, sans dire que tout groupe social a besoin des dirigeants pour ne pas vivre dans l’anarchie où chacun dicte sa loi. Le peuple se choisit des représentants en qui il met sa volonté afin qu’il jouisse de ses droits. Pour cela, il faut des gens qui entrent en compétition et cela n’est bien fait que quand le pluralisme politique est en place.

4.1.2.La démocratie concurrentielle

Cette forme de démocratie n’est réellement présente que là où règne le pluralisme. Celui-ci désigne, surtout en Occident, soit « le fondement de tout régime politique marqué par le caractère librement concurrentiel de la lutte pour le pouvoir », soit « un ensemble de théories politiques qui proclament que, dans un système social, les rôles d’autorité se trouvent différenciés et répartis entre plusieurs catégories dirigeantes autonomes et plus ou moins concurrentielles » (Dadié et Gerstle 1979 : 87). Remarquons qu’en parlant du pluralisme, on ne doit pas se limiter au multipartisme ; ce concept inclut l’hétérogénéité sociale, régionale, culturelle, religieuse, linguistique etc. qui est souvent source de conflits en Afrique. Tout le problème est de pouvoir gérer ce pluralisme afin de parvenir à une intégration sociale qui génère la paix. Ainsi, les différents régimes politiques constituent en quelque sorte des réponses à ce problème, des réponses plus ou moins adaptées pour chaque pays. La caractéristique majeure de la démocratie concurrentielle est qu’il s’agit d’un régime qui met l’accent sur la compétition entre plusieurs partis politiques et sur l’alternance au pouvoir entre ces partis grâce au suffrage majoritaire. Ce qui compte dans ce cas, c’est le principe : “un homme une voix”, ou comme disent les Anglo-saxons, One person, one vote.       

4.1.3.La démocratie consociationnelle

C’est une forme de démocratie qui était appliquée à partir des années 1970 dans les pays occidentaux comme les Pays-Bas, la Belgique, la Suisse, l’Autriche et le Canada. Ces pays avaient en commun de profonds clivages du corps social. Pour le principal représentant du consociationalisme dans la littérature contemporaine, Arend Lijphart, « il y a démocratie consociative lorsque le gouvernement est assumé par l’ensemble de l’élite groupé en cartel, afin d’assurer le fonctionnement stable d’une démocratie à la culture politique fragmentée » (Lijphart 1969). Lanciné Sylla commente ainsi cette “définition” :

Ce cartel d’élites peut bien être une grande coalition des partis politiques ou une alliance de leurs dirigeants, de telle sorte qu’un régime politique multipartitaire peut tout aussi bien fonctionner comme une démocratie consociationnelle, pourvu que les élites politiques, les chefs des partis, acceptent le compromis (au lieu de la compétition).

Et il ajoute : Ce compromis, ce consensus au niveau des élites politiques est le facteur indispensable au maintien de la stabilité politique dans les sociétés dont le pluralisme socio-politique est de nature à ébranler de façon constante l’équilibre social et la stabilité politique des régimes (Sylla 1983 : 35).

Sylla constate avec étonnement que la plupart des régimes africains ayant connu une certaine stabilité politique au lendemain des indépendances – en guise d’exemple, la Côte d’Ivoire – y sont parvenus pour avoir promu au sommet de la hiérarchie politique une large alliance entre les dirigeants des diverses catégories du corps social. Ce qui nécessite un consensus.

4.1.4.La démocratie délibérative ou consensuelle

Pour ce type de démocratie, les acteurs politiques mettent en avant le consensus raisonnable, même s’il n’est pas toujours facile d’y parvenir. Chacun doit pouvoir relativiser ses positions afin d’intégrer, s’il le faut, le point de vue de l’autre et favoriser la généralité. La démocratie y trouve sa rationalité propre, qui consiste en sa dimension aussi bien fonctionnelle que normative. La communication et le débat restent les fondements des décisions prises pour donner vigueur aux institutions et doivent s’orienter vers le bien commun. Je partage la critique de Pierre Bourdieu selon laquelle la délibération est souvent influencée par « la situation sociale des locuteurs et les relations de pouvoir dans lesquelles ils sont pris » (cf. Sintomer & Talpin 2011). Mais, dans ce cas, c’est la démocratie elle-même qui est étranglée, car elle cède la place à la démagogie qui flatte le peuple alors qu’en réalité on cherche à conserver le pouvoir au détriment du peuple. Cependant, il me semble que la présentation d’un code procédural qui guide les débats et qui requiert les avis du peuple via ses représentants (députés), s’ils ont des aptitudes requises, peut donner des résultats fiables.

De ces quatre formes de démocratie, la question est de savoir laquelle serait la mieux adaptée au Burundi et même dans la RGL pour retrouver enfin la paix durable. La présentation à peine faite révèle que les formes de démocratie peuvent faire appel l’une à l’autre. C’est le cas notamment de la démocratie consociationnelle qui a besoin du consensus, élément clé de la démocratie délibérative, dite aussi consensuelle. Pour le cas du Burundi, force est de constater qu’avec l’Accord d’Arusha signé en 2000, la tendance était de parvenir à l’instauration de cette dernière forme de démocratie : la démocratie consensuelle. Il est vrai que ce n’était pas aussi tranché, mais les équilibrages dans le partage du pouvoir à base ethnique en sont, sans doute, une preuve. Si l’on analyse de plus près les événements récents (2015), on se rendra compte que le problème tourne autour de la forme même de la démocratie qui doit s’implanter dans le pays. Plus précisément, c’est la démocratie consensuelle qui semble être le nœud du problème.

En effet, la plupart de ceux qui réclamaient le respect de l’Accord d’Arusha le faisait parce qu’ils craignaient qu’en le sabotant, l’application stricte du principe de la démocratie concurrentielle, à savoir le suffrage majoritaire, ne rafle tous les postes du pouvoir au profit de l’ethnie majoritaire. De l’autre côté, il y en a qui cherchaient à en finir avec cet Accord parce qu’ils voyaient que le consensus qui y a prévalu, a accordé plus qu’il ne faut aux minorités. Mais, au-delà de ces tendances, il y a lieu de se demander, comme d’ailleurs l’a fait Jean-Yves Calvez (2003 : 57), si, réellement, la loi de la majorité suffit pour définir et fonder la démocratie. La question se fait encore plus incisive lorsque le peuple n’est pas bien formé civiquement et démocratiquement, ce qui est souvent le cas dans les pays africains. En se prononçant par le suffrage universel, en prenant une décision qui engage l’avenir de la nation, le peuple doit être éclairé sur certaines valeurs sans lesquelles la démocratie elle-même est mise à mal et cela vaut également pour les leaders politiques. C’est ce que souligne le pape Jean-Paul II dans l’Encyclique Centesimus annus publiée en 1991: « S’il n’existe aucune vérité dernière qui guide et oriente l’action politique, les idées et les convictions peuvent être facilement exploitées au profit du pouvoir. Une démocratie sans valeurs se transforme facilement en un totalitarisme déclaré ou sournois » (n. 46). Ainsi à l’idée de Calvez selon laquelle le vote majoritaire constitue l’obstacle à la démocratie (cf. 2003 : 61), j’oppose celui de l’instruction et de la sagesse du peuple : si nous parvenons à un niveau d’instruction et de sagesse où le peuple ne sera plus manipulé par l’idéologie ethnocentriste, l’expression majoritaire du vote ne sera plus un problème. De fait, le peuple sera bien éveillé sur le choix des dirigeants qui cherchent son développement authentique. Il faut tout un changement de mentalité. Néanmoins, je suis de l’avis de Calvez quand il écrit que les hommes ont besoin de se sentir davantage obligés les uns envers les autres et, commentant Jean-Jacques Rousseau, il dit : « il n’y a de société de liberté, de démocratie, que par un réel abandon mutuel, ou par une reconnaissance mutuelle – reconnaissance de l’autre par moi » (Ibid. : 59).

Ainsi le système de gouvernance susceptible de faire parvenir les Burundais et les peuples de la RGL à une paix réelle et durable serait la résultante des démocraties consociationnelle et délibérative. Comme l’a montré Lanciné Sylla, la démocratie consociationnelle a pu maintenir la stabilité politique dans les pays qui connaissaient des clivages sociaux. L’histoire du Burundi et de la sous-région en général n’est-elle pas pétrie par des clivages et des guerres interethniques. Mais, comme cette forme de démocratie a tendance à se ramener au système du parti unique, il faudrait l’orienter et la soutenir par la démocratie délibérative ou consensuelle. Cette forme de démocratie qui conviendrait aux pays de la RGL n’est donc rien d’autre que la démocratie “consociatio-consensuelle”. Mais alors y  a–t-il des pierres d’attente pour le cas du Burundi.

4.2.   Pierres d’attente pour une démocratie qui favorise la paix

L’analyse jusqu’ici a montré que, dans le passé, il y a des solutions qui ont mis le Burundi sur la voie d’une paix relativement stable. Cela ne peut-il pas constituer une sorte de pierre d’attente pour une démocratie capable d’amener la paix souhaitée et, par-là, des raisons d’espérer ? Il faudrait prendre en compte les efforts du dialogue et de la concertation ayant accouché l’Accord d’Arusha. Mais, pour que la démocratie “consociatio-consensuelle” puisse s’implanter au Burundi, il faut améliorer les points faibles du processus qui a abouti audit Accord, ces failles qui ont fait que dès sa signature, certains doutaient déjà de son efficacité (cf. Chrétien 2000 : 136).

L’attention doit porter sur quatre principaux secteurs : l’organisation, le déroulement, la conclusion et l’après-signature de l’Accord d’Arusha.

4.2.1.L’organisation 

La médiation conduite d’abord par Julius Nyerere (de 1996 à sa mort en octobre 1999), ensuite par Nelson Mandela, ainsi que les autres partenaires internationaux en l’occurrence l’ONU et l’OUA, a conçu le règlement du conflit burundais en l’inscrivant dans la géopolitique de la sous-région surtout en ayant en mémoire le génocide qui venait de se perpétrer au Rwanda en 1994. S’il peut s’avérer, comme l’écrit Chrétien, que « le rapprochement avec la situation rwandaise est […] incontournable [du fait qu’]on observe dans les deux cas un écho permanent des événements du pays voisin mais plutôt sous la forme d’un chassé-croisé depuis les années 50 » (Chrétien 2000 : 138). Ce qui produirait des résultats conduisant tout simplement à un semblant de paix. Par principe, il faudrait que tous les protagonistes de la crise en cours participent au dialogue, mais le défi majeur est que ce sont les mêmes politiciens ayant participé aux négociations d’Arusha qui vont encore se retrouver à la table du dialogue. Ont-ils vraiment un nouveau regard sur les réalités ? Se sont-ils enfin convertis de cet esprit de quête acharnée des postes du pouvoir ? Quel type de démocratie envisager pour le Burundi ? 

4.2.2.Le déroulement 

Le grand défaut qui a entouré les pourparlers débutés officiellement en juin 1998 à Arusha est que, si l’on en croit le rapport du Centre for Humanitarian Dialogue de mai 2008, pendant que se déroulaient les débats qualifiés d’inclusifs, il y avait des négociations parallèles entre l’UPRONA et le FRODEBU. Ce qui explique l’apparition des réserves dans le texte présenté pour signature et qui ne figuraient pas dans les cinq Protocoles connus (cf. p. 12). En réalité, ce parallélisme “négociatif” des dynamiques n’a cessé d’accompagner les processus visant à restaurer la sécurité et la paix au Burundi depuis 1993. N’est-ce pas une mégalomanie qui relègue au second plan les autres qualifiés en kirundi de « imperekeza » (litt. : ceux qui accompagnent les autres) ? Comment une telle situation peut conduire à une paix solide ? Il est vrai que, partout ailleurs, il y a toujours des tête-à-tête en coulisses mais c’est pour pouvoir convaincre lors des séances plénières.

S’agissant de la question des quotas ethniques, comme l’a signifié la Conférence des Évêques catholiques du Burundi (CECAB) dans ses Messages du 6 décembre 2013 (n. 4) et du 6 mars 2015 (n. 7), les dispositions portant sur « les modalités de partage du pouvoir et le respect des mandats politiques... » telles que débattues lors des négociations d’Arusha et reprises dans la Constitution actuelle, ont été « prises à dessein pour remettre petit à petit le pays sur les rails ». Ainsi, le moment venu, la question des quotas ethniques ne devrait plus revenir sur la table des négociations. À ce sujet, le grand défi est de transcender cette tendance à se réclamer et se définir selon le prisme de l’appartenance ethnique, régionale et/ou clanique, de se savoir citoyen Burundais avant d’être de telle ou telle ethnie.

4.2.3.La conclusion 

Les négociationsd’Arusha ont été marquées par une lenteur dans les débats, lenteur due à la pertinence des questions qui se posent mais aussi au per diem de 150$ par séance (cf. Chrétien 2000 : 148). Ce qui a fait que le médiateur Mandela a pris la détermination de “bousculer” les participants pour décrocher un accord. Cette accélération ne pouvait pas ne pas influer sur les clauses de l’Accord. L’idéal serait qu’un temps bien déterminé et relativement court soit fixé dès le début du dialogue pour ne pas s’attarder inutilement sur des détails anodins, en ayant surtout le souci de trouver des solutions pour faire sortir le peuple des souffrances qui l’accablent : les négociations d’Arusha n’avaient que trop duré (26 mois de débats publics). Aussi ne faudrait-il pas signer comme les yeux fermés le texte final sans vérifier s’il correspond réellement au fruit des débats publics : les réserves insérées au texte final de l’Accord d’Arusha ne résultaient pas de ce genre de débat mais d’un arrangement entre quelques-uns.

4.2.4.L’après-signature

 La mise en application de l’Accord est la mesure de la bonne volonté des dirigeants chargés de cette opération. On comprend alors que tout dialogue et toute négociation doivent être animés d’un réalisme et d’une clarté remarquables pour formuler des décisions qui sont susceptibles de rétablir la paix entre tous les citoyens. Dans ce sens, il faut qu’il y ait une commission mixte de suivi de l’application de l’Accord. Pour ce qui est de l’Accord d’Arusha, la difficulté était les rebelles qui n’avaient pas encore déposé les armes et avec qui il fallait encore négocier le cessez-le feu.

Y a-t-il des raisons d’espérer ? La réponse ne peut être qu’affirmative. Malgré certaines limites, l’Accord d’Arusha a pu quand même rassurer les Burundais en comparaison à ce qu’ils vivaient les années antérieures. Voici quelques raisons sur lesquelles se fonde l’espérance pour le Burundi.

Premièrement, l’Accord d’Arusha étant le fruit du dialogue et de la concertation, c’est cette voie qu’il faut toujours emprunter chaque fois qu’il y a des situations de trouble. La force de la concertation réside dans le fait qu’elle est l’unique cadre où s’exposent les problèmes qui hantent le pays ; c’est comme s’il s’agissait d’un abcès qu’on vient d’ouvrir afin de mieux soigner la partie infectée. Le handicap majeur est le fait de ne pas vouloir servir la vérité ou quand la concertation ne rassemble les véritables protagonistes des questions qui se posent.

Deuxièmement le Burundi a connu depuis toujours des gens responsables, animés d’un esprit patriotique, qui sont capables de se sacrifier pour le bien d’un grand nombre, soit en abandonnant de multiples avantages, soit en donnant même leur vie. C’est le cas du prince Louis Rwagasore et le président Melchior Ndadaye. 

Troisièment, le rôle des Bashingantahe (ces sages) reste un tremplin pour une nation juste et paisible, tendue vers un avenir radieux. En effet, ils offrent une belle image du pays par leurs interventions discrètes au sein de la société pour réconcilier ceux qui ont des différends à travers l’arbre-palabre, contrairement à la justice moderne qui semble creuser un fossé entre les deux parties en conflit. Le problème est que l’institution des Bashingantahe, qui relève de la culture traditionnelle burundaise, a progressivement connu un recul. Avec la création du Conseil des Bashingantahe, l’intérêt pour  cette institution gagne petit à petit du terrain. Cependant le slogan d’ “Ubugabo” tend à prendre la place de “Ubushingantahe”. A débattre ! Toujours est-il que la recherche de la paix au Burundi va de pair avec le retour aux valeurs culturelles fondamentales.

Quatrièmement, le degré de religiosité au Burundi, – du moins en nombre –, est une autre raison pour espérer un avenir meilleur pour le pays. De fait, une nation dont les citoyens observent les exigences de leur croyance est sensée s’imprégner de la paix car il n’y a de confession religieuse qui n’inclut pas dans sa doctrine des valeurs morales. Dans son analyse de la philosophie politique d’Alexis de Tocqueville, Pierre Manent montre que la religion est essentielle à l’avancée de la démocratie, mais « [elle] est extérieure à sa définition, à sa nature. Elle ne lui appartient que comme la bride au cheval, pour la guider et la modérer » (Manent 1993: 121). Seulement ce qu’on redoute dans la religion, c’est le fondamentalisme qui trempe dans des exactions ainsi qu’une religiosité de surface qui ne prend pas au sérieux les exigences de sa propre croyance, se rendant méconnaissable en cas de conflit, sans oublier le risque de devenir l’« opium du peuple » comme le dénonçait Karl Marx. Le défi pour les Burundais est de vivre en accord avec leur croyance.

 

4.3.   L’ouverture à soi et à l’autre : base d’une paix intérieure

Le concept de paix, de par ses définitions, se révèle riche en significations, ce qui montre que la paix se présente sous plusieurs modalités : on parle de paix pour signifier successivement le silence des canons (ou cessation des hostilités), l’accord ou l’entente entre les personnes qui ne sont pas en conflit ou qui se sont réconciliées, l’absence de trouble social, la tranquillité physique d’une personne vivant des moments et dans un milieu calmes, la quiétude morale ou la sérénité (cf. Enclyclopaedia universalis Multimédia 2014). Je m’arrêter un instant sur le dernier. En quoi consiste réellement la sérénité ou quiétude morale ? Quelles sont les conditions de possibilité d’un tel état d’âme, conditions qui, en définitive, établissent une paix perpétuelle (cf. Kant 1991) ?

La quiétude morale, la sérénité, ne signifie en rien l’immobilisme ou le fait de ne pas donner son avis sur les faits de peur qu’on entre en disputes ou qu’on se regarde en chiens de faïence avec quelqu’un d’autre. Au contraire, la sérénité c’est la paix intérieure, l’état d’âme de celui qui est posé, c’est-à-dire qui n’agit pas et ne réagit pas selon les émotions et surtout pas suivant les passions. Dans la vie courante, pour signifier que quelqu’un a la quiétude morale, on dit qu’il vit en paix avec tout le monde. Pour signifier qu’un tel est serein, on dit qu’il est “égal à lui-même”, ce qui veut dire qu’il ne change pas de personnalité en fonction des situations en place, qu’il ne fuit pas, ne se dérobe pas devant son être mais assume son être-en-situation, mieux son être-au-monde pour reprendre l’expression chère au philosophe allemand Martin Heidegger.

À la question de savoir comment accéder à cet état d’âme, je répondrais qu’il y a deux mouvements à réaliser de façon simultanée. Le premier consiste à entrer en soi-même par le recueillement ou la pensée méditante (cf. Heidegger 1966 : 136-137) afin de prendre conscience de l’être qu’on est en toute sa richesse, une “histoire d’amour”, comme diront les spirituels. Ce mouvement permet de transcender, de faire un dépassement de toute considération identitaire pour se reconnaître homme, une “portion de l’humanité”, tout en sachant que ce dont on fait le dépassement on ne le nie pas, mais on se l’approprie en son essence la plus intime. C’est justement parce que nous devons nous reconnaître comme faisant partie de l’humanité que Kant peut nous adresser ces impératifs catégoriques : « Agis de façon telle que tu traites l’humanité, aussi bien dans ta personne que dans toute autre, toujours en même temps comme fin, et jamais simplement comme moyen» et aussi « Agis seulement d’après la maxime grâce à laquelle tu peux vouloir en même temps qu’elle devienne une loi universelle » (1999 : 108 et 97). Ainsi, le premier mouvement qui consiste à s’ouvrir à soi, ne nous enferme pas sur nous-mêmes, il nous ouvre du coup sur un second mouvement : le mouvement vers l’autre. Quiconque est incapable de rentrer en soi-même, de faire l’expérience de l’intériorité, ne saurait entretenir une relation authentique avec l’autre.

Cette ouverture à soi et aux autres n’est pas automatique, il faut toute une éducation : les adultes doivent nécessairement changer de mentalité et ne pas continuer à vivre sous le poids d’un passé sombre. L’adage burundais le dit bien « Intibagirantibana » (traduction adaptée : sans l’oubli du passé, pas de vivre ensemble possible). Ceux qui sont infectés par l’esprit de haine, de vengeance, d’exclusion de l’autre, d’égoïsme et de la boulimie du pouvoir … doivent se laisser réhumaniser. D’ailleurs, c’est nous tous qui, d’une manière ou d’une autre, avons besoin de cette réhumanisation car, par exemple, lors des différents règlements de compte qu’a connus le Burundi, qui n’a pas tué ou chassé quelqu’un de son domicile, s’est peut-être réjoui de sa mort ou de son exil. De cette manière, on participe à la négation de l’humain, négation de ce qui relie les êtres humains entre eux, une expulsion “hors du monde” selon les paroles d’Hannah Arendt et cela atteint ce que nous avons de plus profond (cf. Pouligny 2003 : 420) : l’âme. Ainsi, l’État doit-il s’y investir pour élaborer et introduire dans l’enseignement, dès l’École fondamentale, des programmes de civisme qui insistent sur les concepts de paix, de tolérance et de développement intégral, c’est-à-dire de tout homme et de tout l’homme.

 

Conclusion

Le concept de paix qui évoque souvent celui de la sécurité intéresse quiconque s’enquiert de la réalité des pays de la RGL et du Burundi en particulier. Les solutions avancées pour endiguer ces conflits sont de plusieurs ordres et ont pour auteurs non seulement les acteurs de la vie politique et sécuritaire, mais aussi les étrangers qui n’ont cessé de manifester leur intérêt à la sous-région, un souci aussi prononcé qu’il laisse croire à un non-dit : la recherche des richesses minières. Les États de la RGL doivent tout de même se convaincre de la nécessité de dépasser les clivages ethniques qui remontent du temps de la colonisation, le recours à la répression et aux règlements de compte comme solutions aux problèmes d’insécurité, pour devenir des États éthiques, des États de droit, où le droit d’exister de toutes les différences est reconnu comme sacro-saint. Qui plus est, il faut passer de la paix comme absence de guerre à la paix intérieure, la seule qui peut donner libre cours au vivre ensemble et à la cohésion sociale.

 

Nous comprenons donc que même dans les pays qui semblent décoller économiquement, il manquerait quelque chose d’essentiel si leurs citoyens n’ont pas la paix intérieure, si à tout moment ils redoutent les attaques de potentiels ennemis, s’ils vivent comme en étau des Services de renseignement. Quant au Burundi, c’est cette sérénité, cette quiétude morale qui reste ce sans quoi il ne pourra jamais renaître de ses cendres et s’atteler au développement qui se veut intégral. Ne disons-nous pas en kirundi « Uwimbuye ikigega c’amahoro ntabura ic’amahonda » (litt. : Qui possède un grenier de paix ne peut manquer de celui du sorghos). La paix durable conditionne le développement durable.

 


[1]Cette appellation est due au nombre de pays belligérants, de morts mais aussi de la durée.  Dans cette guerre, qui s’est achevée en 2003 Laurent-Désiré Kabila a fait appel à l’Angola, au Zimbabwe et à la Namibie.

[2]Cette milice évoluera en une rébellion armée.

[3]Après la signature du cessez-le-feu, les deux formations seront agréées comme partis politiques.

[4] Selon Reyntjens, il y a un fait peu connu : « le Burundi en avait déjà fait l’expérience avant 1965. En septembre 1964, le président de l’UPRONA Bamina réunit une “Conférence de réconciliation nationale”, qui n’eut pas de résultats tangibles, si ce n’est la suppression formelle des factions “Casablanca” et “Monronvia” et l’apaisement apparent de quelques conflits personnels. Début 1965, un rapport de 61 pages fut publié sur la “réconciliation nationale”, mais cette tentative de pacification ne connut pas de lendemain dans le contexte turbulent de l’époque. » (1994 : 68)

[5]Lors de son investiture, le président de la République (et les autres hauts responsables du pays) « jure fidélitéà la Charte de l’unité nationale, à la constitution [de la République du Burundi] et à la loi » (art. 66 de la constitution de 1992 et art. 106  de celle de 2005 qui régit le pays jusqu’à maintenant).  

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