CRISE ÉCONOMIQUE OU CRISE DE CIVILISATION ?

Abstract: 

CRISE ÉCONOMIQUE OU CRISE DE CIVILISATION ?[1]

The Chronicle highlights the economic and political aspects of the ongoing crisis in the European Union, and wonders whether such crisis might not be that of civilisation. The basis of the western civilisation is modernity, of which the political and cultural resources are being exhausted. Some of the symptoms of the decadence of this civilisation are the relation to nature with its negative environmental consequences, inadequate utilisation of measures of precautions to deal with them, and the loss of moral references. However, there are some reasons to hope: it is not too late to rebuild the shattered foundations. All that is needed is to foster solidarity, to promote a sober and egalitarian society and economy which are in harmony with nature, and to wage an ethical revolution which values the relational dimension of life of solidarity and sustainability. Inshort, the answers lie in fostering the common good, as defined by the Catholic Church.

 

 


[1]Cet article est rédigé suite à une conférence donnée à Namur, en tenant compte des réflexions de Philippe Lamberts, député européen, co-président du Parti des Verts, à qui il avait été demandé de réagir.

  1. La question dans son contexte

 

La crise est à l’avant-plan épuisée et à l’ordre du jour de tous les médias et des conversations depuis quelques années en Europe. Les politiques d’austérité, les menaces qui pèsent sur la protection sociale, la mise en cause de l’index ou de la continuité des indemnités de chômage, les fermetures ou restructurations d’entreprises et le chômage qui ne cesse de croître, la multiplication des mendiants dans nos rues… Tout cela est l’expression de cette crise. On peut se rassurer en se disant que c’est un mauvais moment à passer, et qu’avec un peu de sagesse et de volontarisme, on retrouvera de la croissance.

 

Mais la crise est aussi politique. La Belgique fédérale a connu une difficulté majeure à constituer un gouvernement après les élections législatives, et la coalition actuelle est certainement fragile et peu cohérente. La question se pose : la Belgique unitaire va-t-elle continuer à exister ? Or cette conjoncture politique n’est pas isolée : plusieurs États ont connu ces dernières années de grandes difficultés à constituer les coalitions nécessaires à la mise en place d’un gouvernement. L’intégrité nationale est mise en cause aussi dans plusieurs pays : un référendum se profile sur l’indépendance de l’Écosse. Des questions sont posées en Espagne, en Italie… Et l’Union Européenne connaît une crise de gouvernance et l’euroscepticisme ne cesse de croître. Crise économique, atmosphère de crise politique: pour autant peut-on ou doit-on parler de crise de civilisation ?

2.       Les symptômes d’une crise de civilisation

On peut dire sans doute que la modernité occidentale est à bout de souffle ; ses ressources politiques et culturelles sont largement épuisées. Les symptômes d’un tel diagnostic sont multiples. J’en relève quelques-uns, sans prétendre à l’exhaustivité.

2.1.  Le rapport à la nature

Le paradigme de la toute-puissance de la raison technoscientifique montre ses limites. Selon Descartes, « connaissant la force et les actions du feu, de l’eau, de l’air [...], nous pourrions les employer [...] à tous les usages auxquels ils sont propres, et ainsi nous rendre comme maîtres et possesseurs de la nature » (Discours de la méthode, 6e partie). Mais New York et le New Jersey font l’expérience que la nation la plus puissante aux plans économique, industriel et scientifique est incapable de maîtriser une tornade et de s’en protéger efficacement, même si elle a pu résister bien mieux que Haïti la voisine.  De plus cette raison technoscientifique est incapable d’apporter la sagesse politique dans le monde : la violence des guerres et des conflits contemporains en témoigne.

 

L’épuisement des ressources : La société industrielle est de plus en plus consommatrice de ressources limitées : ressources énergétiques, pétrole et gaz principalement, métaux, entre autres ceux issus des terres rares. L’utilisation agricole et industrielle de  l’eau assèche cette ressource vitale pour l’usage domestique. La surpêche épuise les ressources halieutiques. Il y a déséquilibre manifeste entre démographie, modèles de développement et modes de production et de consommation.

 

La destruction des sols, la pollution des eaux: la production tant agricole qu’industrielle détruit les sols et pollue les eaux jusqu’aux nappes phréatiques, la production agricole par l’utilisation d’engins lourds sur les champs et de grandes quantités de pesticides et engrais, la production industrielle par ses rejets sur les sols ou dans les eaux.

 

Le climat : malgré les contestations orchestrées principalement par de grands lobbies industriels, le consensus s’impose que la température moyenne de notre globe s’élève comme conséquence des activités humaines, et que cette élévation de la température va dérégler en profondeur notre climat si nous ne changeons pas rapidement nos comportements. La fréquence des cyclones et ouragans et surtout leur violence, l’augmentation des pluies ou des sécheresses selon les régions semblent liés déjà à ce phénomène. La montée du niveau des mers risque d’engloutir des régions côtières entières sans protection, surtout dans des régions pauvres fortement habitées.

2.2.  L’apprenti sorcier ?

Nos industries sont arrivées à utiliser efficacement beaucoup d’éléments naturels inconnus ou sans usage jusque récemment (pensons aux terres rares et aux métaux stratégiques dont elles sont la source) ; nous créons constamment de nouvelles molécules. L’alimentation industrialisée a certes des exigences sanitaires plus élevées que n’étaient celles de la production et de la cuisine artisanales, mais elle utilise aussi de multiples produits dont certains sont loin d’être inoffensifs ou dont on ne connaît pas bien les effets. Il se fait qu’après coup on découvre parfois que cela cause des dommages graves.

 

L’utilisation des biotechnologies et leur application au corps humain offre de nouvelles possibilités multiples. Elles contribuent à l’amélioration de la santé et à la diminution des souffrances. Les possibilités techniques d’un être humain amélioré sont envisagées (en ce sens, comme le suggère un article de journal, Lance Armstrong annonce-t-il l’homme de demain ?). Tout le possible scientifiquement et techniquement est-il souhaitable ? Est-il responsable ?

 

L’introduction des nanotechnologies, présentes déjà dans de nombreux produits, mais envisageables dans le domaine médical, est porteuse de promesses, mais ici encore, on en évalue difficilement les conséquences possibles.

 

L’atome est une formidable source d’énergie, largement non polluante dans la production de l’électricité, mais la sécurité totale n’existe pas, et l’ampleur des catastrophes en cas d’accident majeur est incalculable. De plus on n’a aucune solution entièrement satisfaisante en ce qui concerne le traitement des déchets.

 

Quelle utilisation raisonnable du principe de précaution ? Il est souvent impossible de prévoir toutes les conséquences négatives possibles de l’introduction de nouvelles technologies ou de nouveaux produits. Si le principe de précaution impliquait qu’il faille absolument éviter tout risque, toute créativité et toute possibilité de progrès seraient paralysées et stérilisées. Mais comment mesurer les risques acceptables en les évaluant avec rigueur autant que possible et avec prudence ?

3.       La perte ou l’éclatement des références

Personne d’entre nous ne souhaiterait sans doute vivre comme nos arrière-grands-parents, avec l’absence totale de confort que connaissait la majorité de la population, une longévité moyenne qui était la moitié de celle que nous connaissons, les maladies sans traitement et les souffrances qu’elles engendraient, l’absence de culture, etc. Il n’y a pas lieu d’idéaliser le passé. L’impression générale est cependant que la génération qui nous suit connaîtra davantage de difficultés que nous.

 

Les années d’après-guerre, de 45 à 75, « les trente glorieuses » comme on les a appelées, étaient marquées par un consensus de sens assez général: grâce à la dynamique économico-industrielle, demain serait meilleur qu’aujourd’hui. De fait, pendant cette période, les conditions de vie se sont considérablement améliorées pour la grande majorité de la population de nos pays (salaires, protection sociale, équipement des familles, accès aux études supérieures, vacances et loisirs, etc.), et les inégalités se sont fortement réduites.

 

Mais il est vrai qu’un noyau dur de pauvreté persistait, celui qu’on a alors appelé le Quart Monde. On espérait à cette époque que la pauvreté et la faim dans le monde pourraient, dans un avenir assez proche, être vaincus par le développement. Il y avait large consensus, ce qui ne veut pas dire absence de tensions sociales : une lutte pour le partage des gains de productivité et de richesse était bien présente, mais cette lutte obtenait des résultats tangibles. Or cette mécanique a commencé à se gripper au milieu des années 70. Et certains ont parlé à un certain moment des « trente piteuses » après « les trente glorieuses ». Depuis dix ans, les choses ne se sont pas arrangées, au contraire.

 

La conjoncture présente est marquée par le contexte de mondialisation, par une concurrence internationale de plus en plus dure. Le spectre des délocalisations hante les esprits. Mais la réalité sociétale est bien plus complexe qu’une crise de production et de répartition.

 

L’avènement de la modernité fondée sur la raison et l’idéologie libérale dominante depuis plusieurs générations ont eu des effets sociétaux et culturels considérables, qui ne sont pas tous négatifs, loin de là, mais qu’il convient d’évaluer.

 

Il y a d’abord la valorisation de l’autonomie humaine, et par là tout à la fois la promotion de la liberté et celle de l’individu. Cette valorisation de l’autonomie est un acquis éminemment positif, acquis que l’Église a de la difficulté à reconnaître. L’individualisme montant a mis en cause les systèmes d’autorité et a entraîné une sécularisation de la société : la religion dominante, chrétienne en Europe et aux États-Unis et plus spécifiquement catholique en Belgique ou en France et dans le Sud de l’Europe, a cessé d’encadrer la société qui s’est libérée de ce qui était vécu comme un carcan.

 

Il en est résulté un développement de la liberté de pensée et de croyance, revendiquée comme un droit humain fondamental, et par là une pluralisation des convictions. Cette société définitivement pluriconvictionnelle rend les consensus culturels et éthiques beaucoup plus problématiques. La présence d’une minorité significative musulmane complique encore la situation. On avait cru que le religieux allait progressivement s’effacer de l’horizon sociétal public, et voici qu’il se réaffirme fortement. Cela engendre de multiples crispations.

 

Il est résulté aussi de cette dynamique de société ce que Danièle Hervieu-Léger appelle une exculturation du christianisme : bien que la société se soit largement sécularisée et que la séparation plus ou moins claire ou brutale entre Église et État ait été acquise dans la plupart des pays depuis plus d’un siècle, culturellement un nombre de paradigmes chrétiens continuaient à faire consensus. Le calendrier chrétien et ses fêtes principales tout comme la pause du dimanche faisaient partie des évidences : la révolution française a bien essayé d’imposer son calendrier sécularisé, mais cela n’a pas tenu. Aujourd’hui, de façon plus ou moins explicite, des questions se posent à ce sujet : réduire le nombre de fêtes d’origine chrétienne et introduire dans le calendrier les grandes fêtes musulmanes ou juives, ou bien accepter que se vivent des calendriers de jours fériés parallèles, banaliser le dimanche ou supprimer le dimanche comme jour commun de pause dans le travail, en ayant en parallèle le samedi pour les juifs, le vendredi pour les musulmans… ?

 

Le modèle familial relevait aussi de l’évidence : il a fallu bien du temps avant que le divorce soit socialement et légalement accepté (à Malte, il ne l’est pas encore), et l’Église catholique a mis tout son poids pour l’en empêcher. Aujourd’hui, dans une série de pays, – les Pays-Bas puis la Belgique ont été les premiers, – s’est imposée une redéfinition du mariage, union de deux personnes qu’elles soient hétérosexuelles ou homosexuelles. En France, ce sont à l’heure actuelle les controverses autour du mariage pour tous. Quels seront les effets à long terme de ce changement de paradigme ? Personne ne peut le dire. Les débats, par ailleurs, tournent autour de la dignité humaine, proclamée et revendiquée par tous, mais dans le cadre d’un conflit sur le contenu et les exigences de cette dignité : procréation médicalement assistée et éventuellement grossesse pour autrui, avortement, statut de l’embryon, euthanasie, conditions de l’adoption, etc. Il est clair qu’il n’y a plus de consensus autour de ces questions, et que pourtant des décisions politiques doivent être prises, ne fût-ce que parce qu’il faut placer des limites s’imposant à tous.

 

La prégnance de l’économique dans sa version libérale a pour conséquence la généralisation d’une idéologie de concurrence. La concurrence entre entreprises est un principe positif lié au marché, y compris dans une perspective d’économie sociale de marché, mais ce principe déborde largement le marché : concurrence entre les individus (il faut être compétitifs : seul contre tous), concurrence entre les régions et les États. En fait c’est l’idée même de solidarité qui est mise en cause à tous les niveaux. La concurrence entre les États prédomine à l’heure actuelle sur la coopération qui est un principe fondateur de l’Union européenne. La prédominance de cette idéologie de la concurrence dans tous les domaines a aussi pour conséquence un accroissement des inégalités, même dans les pays dont l’économie paraît relativement plus solide (comme l’Allemagne qui connaît une catégorie croissante des employés pauvres) ou en développement rapide (comme la Chine ou l’Inde).

 

Mais cette prégnance de l’économique et du financier avec la priorité donnée au profit a aussi des effets culturels profonds. Il n’y a pas d’économie de marché possible sans profit, celui-ci étant indispensable à l’investissement et à la recherche-développement. Mais le profit n’est que l’un des facteurs constitutifs du fonctionnement de l’entreprise, qui a une fonction et une responsabilité sociétale. La financiarisation de l’économie a largement détourné le profit de certaines de ses fonctions principales, en particulier celle d’assurer un salaire digne pour les travailleurs et l’investissement en vue de l’avenir, au bénéfice des seuls actionnaires. Avec pour conséquence la priorité donnée au court terme. Cette priorité est elle-même largement entretenue par les échéances politiques des élections et le poids des pouvoirs économiques et financiers sur les décideurs.

 

Du point de vue sociétal, l’idéologie de la concurrence s’imposant aux différents secteurs de la société et l’horizon temporel rétréci de l’exigence de profit ont engendré une culture du tout tout de suite : la dimension du temps et de la durée ne trouve plus sa place, d’où entre autres la fragilisation de tous les liens sociaux, tant au niveau relationnel et interpersonnel (fragilité du mariage, avec toutes les souffrances que cela entraîne), qu’au niveau de l’ensemble de la société, avec le déclin des liens de solidarité s’ils ne sont pas immédiatement profitables. L’affaiblissement du mouvement syndical et pour une part sa corporatisation en sont aussi un symptôme.

 

Cette crise est lourde de menaces. L’humanité d’aujourd’hui est confrontée à deux bombes à retardement. L’augmentation des inégalités et la pauvreté de secteurs très important des sociétés sont insupportables et pourraient engendrer de grandes violences si on continue dans cette voie. Les limites de la planète physique briseront notre système productif et de consommation, et donc notre mode de vie, si on ne le change pas. La logique du toujours plus n’est plus tenable.

4.       Des raisons d’espérer

Sommes-nous pour autant dans l’impasse ? Notre société et l’humanité sont-elles condamnées à cet éclatement concurrentiel et conflictuel, à cet écart croissant des inégalités, avec leur potentiel de violence, et à l’horizon de leur propre extinction ou peut-être leur survie minimale du fait de l’incapacité de prise en charge commune et d’intégration de la dimension temporelle ? La question doit certainement se poser, et il y a urgence à le faire. Un sursaut est sans doute possible et à espérer, mais il y a urgence.

 

En 1950, Schuman rebondissant sur une proposition d’Adenauer d’une union économique et politique avec la France, proposition inacceptable en l’état, lance le processus européen par une méthode douce et de petits pas. L’idée d’une réconciliation entre les États qui étaient à peine sortis de la guerre qu’ils s’étaient faite entre eux, était inimaginable. Au cours d’un siècle France et Allemagne avaient tragiquement été dévastées par trois guerres. Les ressentiments étaient profonds et tenace. Schuman et Adenauer ont eu raison de parier sur un avenir différent, de croire que l’impossible deviendrait possible. Ils ont réussi parce qu’ils ont pu montrer qu’il y avait intérêt à mettre en commun les industries du charbon et de l’acier pour reconstruire l’économie des deux pays.

 

Il est vrai que les questions et défis d’aujourd’hui sont d’une autre ampleur, parce qu’ils sont mondiaux et bien plus complexes, et qu’ils portent sur l’avenir même de l’humanité et plus immédiatement de notre société européenne, de sa culture, de sa civilisation. Mais la crise peut être un choc salutaire. Les replis régionalistes ou nationalistes et la poursuite de la concurrence entre États au lieu de la coopération ne permettront pas de sortir de la crise économique et financière. Ce n’est que dans un sursaut de solidarité européenne qu’une issue positive est possible, et donc plus d’Europe et mieux d’Europe. Mais cela suppose aussi plus de participation et de responsabilité démocratique. Des voix minoritaires mais progressivement plus nombreuses en appellent en ce sens.

 

Par ailleurs, il est devenu intellectuellement évident que notre système de production et de consommation conduit à l’impasse. Il faut encore que politiquement et culturellement on se mobilise pour ouvrir d’autres voies : une société et une économie plus sobre, plus en harmonie avec la nature, plus égalitaire.

 

Mais la révolution nécessaire est aussi éthique : la revalorisation de la dimension relationnelle de la vie, de la solidarité et de la perspective longue du temps. Or précisément, la dimension du temps est de fait réintroduite par la problématique de l’environnement et du climat. Il est à espérer que ce paradigme du temps long, de la coopération indispensable et de la solidarité actuelle et intergénérationnelle s’inscrive progressivement dans la culture et prenne la place du paradigme individuel du tout tout de suite dans un univers concurrentiel.

 

En fait, il s’agit de réajuster :

 

  1. notre rapport aux autres : c’est tous ensemble, dans la solidarité et la coopération que nous pourrons en sortir ;
  2. notre rapport à la nature, qui n’est pas un fonds inépuisable de ressources à notre disposition, mais appel à une existence en harmonie ;
  3. notre rapport aux choses, dans la mesure et la sobriété, contre la surconsommation et le toujours plus ;
  4. notre rapport au temps, en réintégrant la durée longue, contre les impératifs du profit ou de l’intérêt immédiat ;
  5. notre rapport à l’espace, à l’inverse d’une urbanisation de mégapoles ingérables.

Au cœur de ces cinq rapports qu’il y a à réajuster s’impose la reconnaissance de nos limites et des limites de notre terre, contre notre rêve de toute-puissance, le rêve de s’affranchir de toute limite.

 

Le changement nécessaire se heurte cependant à d’importants obstacles :

 

  1. le discours idéologique qui canonise la théorie selon laquelle plus de croissance et d’enrichissement des riches rejaillira spontanément et par diffusion en une diminution de la pauvreté, théorie jamais démontrée, de multiples indices indiquant que cette corrélation est fausse ;
  2. la répartition diffuse de l’intérêt à ce que le système continue : on attend spontanément que l’argent placé ou l’assurance pension apporte le maximum d’intérêt sans s’interroger sur la façon dont cet intérêt est obtenu, avec pour conséquence des catastrophes comme Dexia ;
  3. le sentiment d’impuissance : cela nous dépasse, c’est trop compliqué, et de toute façon on ne peut rien y faire ;
  4. la conviction qu’il n’y a pas d’alternative : il n’y a pas un système économique et productif alternatif crédible.

N’est-il pas trop tard ? On ne sait pas. Peut-être ! Mais si on ne fait rien, ce sera certainement trop tard. Le changement nécessaire suppose :

 

  1. une prise de conscience collective de la gravité de la situation et du sens de l’urgence ;
  2. la mobilisation la plus large possible : il ne suffit pas de changer les élites ; il y a nécessité de leadership qui ne se présente pas comme ayant la solution, mais capable de sensibiliser et d’orienter.

Cet avenir différent, qui s’exprime dans le slogan « Un autre monde est possible », demande à être modestement anticipé dans le quotidien des pratiques. Sur ce terrain, la responsabilité de chacun et chacune est engagée, la responsabilité des associations et des institutions. Et aussi la responsabilité des communautés chrétiennes et des Églises. Il y a urgence à instaurer des lieux démocratiques de débat sur le sens de notre vie ensemble en société.

 

Des manières de faire nouvelles s’expérimentent : liens entre producteurs et consommateurs dans le domaine de l’alimentation, partage des savoirs et des compétences au niveau local, modes de financement alternatif, agriculture familiale et paysanne, etc. Mais aussi à un autre niveau : responsabilité sociale des entreprises (RSE), chartes déontologiques signées par des entreprises (Global compact), etc. Tout cela montre le chemin du possible.

 

Il y a urgence à risquer les démarches préparant une autre société, un autre avenir. Il n’y a aucune certitude de réussite, mais il est de plus en plus sûr que si on laisse les choses aller comme elles vont, on va collectivement à la catastrophe. Du point de vue éthique, on peut dire qu’il y a urgence à revaloriser le bien commun au sens où le définit l’enseignement social de l’Église catholique : la recherche des conditions économiques, sociales et politiques qui permettent d’assurer à toutes les personnes et à tous les groupes sociaux (au niveau local, national, européen et mondial) l’accès à leur meilleur épanouissement. Aujourd’hui, on est très loin du compte.

 

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