UNE VISION BIBLIQUE DU DEVELOPPEMENT JESUS ET LE PROJET DE LA LIBERATION ECONOMIQUE DES PAUVRES

Abstract: 

This paper attempts to build up an ethics of economic development that is based on a biblical reading. It outlines the biblical foundations of economic development through Amartya Sen and Martha Nussbaum’s capabilities approach. This approach shows how they are fulfilled to serve Jesus’ project of economic liberation of the poor. The argument is built on two main assumptions. The first is that God created people and their economic development. However, sin has undermined this development because it leads to poverty. The second assumption is the mission of Jesus, which is the liberation of humanity with economic liberation of the poor. Based on these assumptions and the definition of development as the progressive improvement of life quality, the proclamation of the gospel, God spells, should not be reduced to the sole call for people to heaven as if the world does not exist. Instead, the Word of God calls people from nothingness, servitude, absurdity and death to life, truth and abundant life as a ground floor for sustainable peace as it is obvious in our quenchless search for an endless sate and need for material and spiritual possession. That is a permanent evidence of dramatic poverty.

1.       La question dans sa matrice

Avant d’entrer dans le vif du sujet, il nous faut d’abord savoir ce que c’est que le développement. Evidemment, nous savons que le développement a plusieurs aspects. Nous parlons du développement humain, du développement social, du développement économique, et même du développement psychologique. Je prendrai le développement dans une perspective holistique, globale, c’est-à-dire, le développement comme l’amélioration de la qualité de la vie, c’est-à-dire, le passage des conditions moins humaines aux conditions plus humaines, progressivement en triomphant des difficultés rencontrées sur le chemin. Une telle compréhension du développement dépasse de loin la conception économiste du développement comme croissance économique autant elle est préoccupée par la promotion de tout homme et de tout l’homme comme le dirait Lebret (Gmünder 2004). Quel lien y a-t-il entre la religion, particulièrement, celle à laquelle nous appartenons, le Christianisme et le développement tel que nous nous proposons de le définir ?

En 2005, nous avons publié le volume d’Ethique et Société sur le thème : Religion, paix et développement. Dans l’éditorial du 1er numéro de ce volume, nous trouvons ce tableau du développement en lien avec la religion.

Religion[1]

Nbre de pays

Indices de développement Humain 2001

PNB par habitat 1993 ($)

PNB par Habitat 2002 ($)

Juive

1

0,905

13400

15010

Confucianiste

7

0,861

12556

14893

Protestante

23

0,749

10809

13564

Catholique

46

0,741

4630

5885

Orthodoxe

12

0,739

1737

2014

Musulmane

35

0,604

881

959

Bouddhiste

8

0 ,624

591

839

Hindouiste

1

0,590

360

480

Animiste

10

0,401

332

281

Source : www. religionetdéveloppement.info

Dans l’éditorial, je m’étais alors posé un certain nombre de questions que je voudrais adapter en fonction du sujet que nous sommes en train de traiter. Le concept de développement est-il dans le vocabulaire de notre religion ? Comment est-il utilisé dans les textes fondamentaux et dans la doctrine ? Ma religion favorise-t-elle le développement économique ? Sur quelle échelle de développement se trouve mon pays par rapport aux autres pays ma religion n’est pas dominante ? Quel rôle les Chrétiens jouent-t-ils dans cet état de fait ? Quels sont les facteurs religieux qui peuvent influer positivement ou négativement sur le développement ? Quels sont les préceptes de ma religion qui peuvent agir directement ou indirectement sur le développement de la société ?

La  question au centre de cette réflexion est La vision biblique du développement avec comme point focal, Jésus et le projet de la libération économique des pauvres. Je voudrais partir de certains présupposés sous forme de thèses: Le premier présupposé peut s’énoncer ainsi : En créant l’homme, Dieu a voulu son développement incluant le développement économique. Le péché a freiné ce développement, et partant le développement économique : d’où la pauvreté. Le deuxième énoncé est ainsi libellé : La mission de Jésus sur terre est une mission de libération. Et cette libération inclue la libération économique des pauvres. En suivant cet ordre de présupposés, je développe deux points en deux temps respectifs. En premier lieu, j’expose les fondements bibliques du développement. En deuxième lieu, je mets en évidence comment Jésus accomplit l’esprit de ces fondements dans sa mission de la libération, particulièrement la libération des pauvres, une libération qui est en même temps leur développement. L’enjeu derrière notre analyse est que, comme le dit le secrétaire Général du Projet Pain pour le Prochain, « l’annonce de l’évangile ne peut pas se réduire à chercher à mener l’homme au ciel comme si le monde n’existaitPlutôt l’évangile, la bonne nouvelle du salut consiste au « passage de la servitude, de l’absurdité et de la mort vers la liberté, la vérité et la vie en abondance » (Gmünder 2004 : 3). Tel est d’ailleurs le socle de la paix durable.

2.      Les fondements bibliques du développement

J’ai retenu un certain nombre de fondements bibliques du développement qui m’engagent dans une recherche de l’éthique du développement économique de la bible. Comme les lecteurs pourront le soupçonner, à l’horizon de mon analyse, il y a un point qu’il faut contempler : Un développement économique sans éthique plonge le monde dans la soif jamais désaltérée.

 

2.1.    Création de l’homme et sa responsabilité

Le premier fondement du développement c’est la création de l’homme et la responsabilité que Dieu lui a donnée : Le livre de la Genèse (Gn 1: 26-28) nous dit que chaque personne est créée à l’image et la ressemblance de Dieu, dotée d’un grand potentiel créatif (de la raison, des valeurs, la conscience, les talents, la créativité, etc). L’appel à être fécond et prolifiques, de remplir la terre et de la soumettre est un appel à réaliser ce potentiel, et donc à se développer. L’implication c’est que tout ce qui nous empêche de mettre ce potentiel à profit est un obstacle au développement. L’inverse est aussi vrai. Tout ce qui favorise la mise à profit de ce potentiel est une ouverture au développement. Dans la théorie des capabilités d’Amartya Sen et de Martha Nussbaum, ce qui peut favoriser le potentiel humain en vue du développement ce sont certaines capabilités fonctionnelles, c’est-à-dire des aptitudes à être ou aptitudes à faire notamment, la vie, être nourris, la santé, ne pas être sujet à une mort prématuré, la pensée et l’imagination (l’exercice de ses sens), etc (cf. (Nussbaum 2012: 55ss).

2.2.   Le Travail

Le deuxième fondement que nous retrouvons dans la Genèse c’est le travail. Le développement suppose le travail. Il n’y a pas de développement sans travail. Dieu a travaillé pendant 6 jours et s’est reposé le 7ème jour. Karl Marx parle du Grand Soir l’homme jouira du fruit de son travail selon ses besoins. Dieu a créée l’homme et la femme à son image pour travailler productivement. Il a même donné à l’homme du travail à faire : Cultiver, garder le jardin d’Eden et nommer toute chose (Gn 2 : 15. 19-24). Il s’agit donc d’être à l’œuvre comme Dieu lui-même est à l’œuvre. Quand Jésus faisait des guérisons le jour du sabbat, il disait qu’il est à l’œuvre comme Dieu son Père est toujours à l’œuvre, au travail. Dans 1 Th 4 : 11-12,  Saint Paul, le rappelle et martèle davantage quand il dit : ayez à cœur de vivre dans le calme, de vous occuper de vos propres affaires, de travailler de vos mains, pour que votre conduite soit honorable au regard des gens en dehors, et que vous n’ayez besoin de personne. Donc le travail est lieu même de l’indépendance et de la dignité.

Dans son Encyclique, Sur le Travail Humainpublié en 1981, Jean Paul II, cimente ce fondement en ces mots :

En devenant toujours plus maître de la terre grâce à son travail et en affermissant, par le travail également, sa domination sur le monde visible, l'homme reste, dans chaque cas et à chaque phase de ce processus, dans la ligne du plan originel du Créateur; et ce plan est nécessairement et indissolublement lié au fait que l'être humain a été créé, en qualité d'homme et de femme, «à l'image de Dieu». Ce processus est également universel: il concerne tous les hommes, chaque génération, chaque phase du développement économique, et en même temps c'est un processus qui se réalise en chaque homme, en chaque être humain conscient(Jean Paul II 1981 : art.4).

L’implication directe est que,

  1. Le développement doit éradiquer le chômage.
  2. Par son travail, l’être humain doit pouvoir survivre, se réaliser et s’épanouir. En retour, la survie, l’autoréalisation et l’épanouissement produisent plus de développement.
  3. Le travail doit être décent pour que l’image et la ressemblance de Dieu ne soit pas ternies, dénaturées. En substance, il ne faut pas qu’il y ait exploitation ou oppression dans le travail. Le travail qui nous conduit vers réalisation de l’image et de la ressemblance de Dieu est le chemin vers la perfection de Dieu qui est la finalité ultime du développement.

 

Le travail n’est une marchandise sui generis ou une force anonyme de production comme pourrait le faire croire  les principes d’une économie matérialiste et/ou utilitariste.

2.3.   La relation avec Dieu et le prochain

Le troisième fondement consiste dans les relations justes, la relation verticale avec Dieu et la relation horizontale avec les autres membres de la société. Il n’y pas de développement sans Dieu de qui nous tenons l’existence, l’être et la vie d’une part. Gen 3 nous dit que quand Adam et Eve se sont rebellés pour obéir aux créatures qui leur sont soumis, Dieu les a expulsés du jardin (Gen 3, 23). D’autre part, il y a la relation avec les autres dans la société. En effet, Dieu n’a pas créé l’être humain comme un singleton. Il a créé l’homme et son semblable. Cela veut dire que tout développement est le développement avec… Le développement sans relation avec les autres tourne au conflit comme nous pouvons le voir dans le cas d’Abel et Caïn dont nous parle Gen 4, 1-16.

Les relations justes comme base du développement, c’est cela que nous retrouvons même dans la communauté trinitaire, la relation entre les membres de la trinité divine nous donne un modèle d’un mandat social de servir dans et à travers la communauté. Dans l’économie du salut, dans le développement de l’histoire du salut, Dieu le Père  crée, Dieu le Fils sauve, le Saint Esprit sanctifie. La relation verticale avec Dieu et la relation horizontale avec le prochaine inspire la division du travail que tout développement requiert. C’est pour cela que dans le modèle de développement que je propose, l’Etat, la population et le marché comme la communauté des affaires doivent travailler ensemble en synergie pour que le développement qui en résulte soit la glorification même de Dieu (Ntibagirirwa 2014). Mais aussi, au niveau du développement international, je souligne ce que le Pape Paul VI dit de la fraternité des peuples quand il parle du devoir des pays développés dans le développement tel que nous le trouvons dans son encyclique Sur le Développement des peuples,

Leurs obligations s'enracinent dans la fraternité humaine et surnaturelle et se présentent sous un triple aspect: devoir de solidarité, l'aide que les nations riches doivent apporter aux pays en voie de développement; devoir de justice sociale, le redressement des relations commerciales défectueuses entre peuples forts et peuples faibles; devoir de charité universelle, la promotion d'un monde plus humain pour tous, où tous auront à donner et à recevoir, sans que le progrès des uns soit un obstacle au développement des autres(Pape Paul VI, 1967, art 44).

L’implication c’est que le développement suppose la collaboration, la coopération et l’entraide mutuelle entre les personnes et entre les peuples. Dans le développement, il n’y personne qui se suffit.

 

2.4.   Le processus du salut ou libération

Le quatrième fondement est à trouver dans l’histoire ou le processus même du salut. Le développement est la voie de la libération. Le développement fondé sur la bible est rédempteur. Toute l’histoire du salut est une histoire de la libération : la libération de l’Egypte, la libération d’Israël des peuples forts qui attaquaient, etc. La libération du péché est la libération de tout ce qui peut nous priver de notre potentiel créateur et innovateur, notamment,  l’oppression par les autres (Judges 5 :11), l’oppression des circonstances, ce qui nous prive de la liberté (Is 41 :1-11), ce qui disloque la communauté comme lieu du développement (les conflits, les guerres, les divisions, la mésentente). L’implication est que le développement authentique doit être libérateur. Il s’agit de sortir de tout ce qui peut nuire à l’épanouissement, c’est-à-dire tout ce qui ne favorise pas l’essor des capabilités fonctionnelles ou les aptitudes à être ou à faire : la mort, l’ignorance, l’exploitation et l’oppression qui nuisent à la liberté, la maladie, le manque de logement,  le manque de loisir, la haine, etc. 

2.5.   L’intendance des dons divins

Le cinquième fondement biblique du développement est l’intendance des dons divins. Dans le développement, nous devons nous considérer comme des intendants de la richesse de la création de Dieu et nous devons fructifier cette richesse pour faire valoir le royaume et la gloire de Dieu. C’est ce que nous dit le Ps 23:1 : Au Seigneur le monde et sa richesse, la terre et tous ses habitants. En nous développant, nous participons dans le cours de l’histoire dont Dieu est le début et la fin, en même que c’est notre façon de faire connaitre les voies de Dieu sur la terre et son salut parmi toutes les nations (Ps 66 : 3). 

 

 

Le Pape Paul VI le précise dans l’Encyclique Populorum progressio:

Un humanisme clos, fermé aux valeurs de l'esprit et à Dieu qui en est la source, pourrait apparemment triompher. Certes l'homme peut organiser la terre sans Dieu, mais "sans Dieu il ne peut en fin de compte que l'organiser contre l'homme(Paul VI 1967 : art.42).

L’implication de ce fondement est que nous devons organiser le développement comme étant au service de Dieu et pour la gloire de Dieu. D’autre part, dans le processus du développement, nous devons être capables de reconnaitre la relativité des biens économiques et de les traiter comme des dons divins à administrer et à partager, car la propriété originelle de tous les biens est à Dieu en premier lieu en tant qu’il est le créateur.

2.6.   Notre foi en Jésus

Le sixième fondement est notre foi en Jésus. Evidemment tout ce que je viens de dire vient de ce que nous avons la foi en Jésus en qui l’histoire du salut trouve son achèvement (cf. He 1: 1-3). Cette foi permet une compréhension correcte du développement, en réalisant un humanisme intégral et solidaire. La lettre de Saint Paul aux Colossiens nous rappelle que le Christ est le premier né de toute créature et que tout est créé pour lui et par lui ; qu’en lui habite toute plénitude (Col 1 : 20). Le développement consiste en notre effort individuel et collectif pour élever notre condition humaine, transcender les obstacles pour participer à la plénitude de Jésus, cette plénitude qu’il communique à son corps qui est l’Eglise (Col 1 : 18). Il s’agit de travailler à éradiquer le péché, le mal qui, sans cesse, cherche à compromettre le bien dans les réalisations humaines.

L’implication est que sans la référence à Jésus, le développement peut-être une entreprise du mal comme on peut le voir par les maux d’un développement décousu dont les caractéristiques sont la corruption, l’exploitation, la recherche du profit à tout prix, le développement inégalitaire où les riches mangent ou maltraitent les pauvres, etc. 

2.7.   Souci permanent des pauvres

Le 7ème fondement biblique du développement est le souci permanent des pauvres. La bible est pleine de passage où le souci des pauvres est très souligné. Dt 15 : 4ss suggère que toute production, toute richesse doit tenir compte des pauvres comme si la pauvreté devrait être éradiquée dans la société juive et comme si l’objectif était une société économiquement parfaite. C’est dans ce cadre que le prophète Amos a été dur vis-à-vis de ceux qui s’écartaient de cet objectif par l’exploitation du pauvre, l’injustice, la corruption, etc. 

La bible parle de trois grandes catégories des pauvres qui sont explicitement soulignées dans le livre du Deutéronome, à savoir: les étrangers, les orphelins et les veuves qui sont les catégories les plus vulnérables (Dt 24 :17-22). Au-delà du fondement biblique, il y a une raison théologique qui sous-tend l’obligation de charité et de partage avec  ces groupes pour le peuple d’Israël, notamment, le fait que les Hébreux eux-mêmes ont été des esclaves en Egypte et ont goûté à la pauvreté.

Le développement requiert de travailler pour éradiquer la pauvreté, parce que, selon Gutierez, la pauvreté dans toutes ses dimensions (sociale, économique, politique) signifie mort, mort injuste, mort prématurée des pauvres, mort physique mais, aussi, poursuit Gutierez, mort culturelle. La pauvreté plonge les enfants de Dieu dans l’insignifiance. Le pauvre est celui qui n’a pas de travail, donc pas de sources de revenu pour survivre, le pauvre est celui qui peut attendre plus longtemps pour avoir un médecin, celui qui n’a pas de poids social, qu’on vole par des lois injustes ou lourdes, celui qui n’a pas de poids pour changer la situation (Gutierrez 1993 : 126-127). Développement veut dire que nous devons travailler pour faire triompher le Dieu de la vie et ressusciter les pauvres des conditions inhumaines ou moins humaines. Ainsi, dans les Proverbes, Salomon dira: La fortune du riche, voilà sa place forte, le mal des petits, c’est leur indigence (Pr 10 :15). Donc il faut éradiquer la pauvreté comme un mal qui nuit à l’épanouissement des enfants de Dieu.

2.8.   La destination universelle des biens

Le huitième fondement biblique à souligner est la destination universelle des biens. La destination universelle des biens est un principe selon lequel tout être humain doit bénéficier des biens terrestres. Dieu a donné la terre à l’homme et la femme (Gen 1: 28-30). Les apôtres eux-mêmes ont vécu selon ce modèle. Ils redistribuaient les richesses et personne ne revendiquait la propriété d’aucun de ses biens car tout leur était en commun (Ac 4: 32-37). L’expression claire de ces références bibliques est celle de Gaudium et Spes qui le dit ainsi: « Dieu a destiné la terre et tout ce qu’elle contient à l’usage de tous les hommes et de tous les peuples, en sorte que les biens de la création doivent équitablement affluer entre les mains de tous, selon la règle de la justice, inséparable de la charité ».  

Dans toute la bible, l’économie y est présentée comme le discours et l’activité concernant les ménages, l’acquisition, la distribution, l’usage et le partage des nécessités de la vie. Le discours sur le sabbat, la mise en garde des riches, etc va dans ce sens. Le souci de prévenir l’accumulation des richesses – et donc le phénomène d’inégalité qui en résulte –, ainsi qu’empêcher l’exploitation des êtres humains et de la nature est à comprendre dans ce sens. « Malheur, s’écrie Isaïe, à ceux qui ajoutent maison à maison et joignent champ à champ, au point de prendre toute la place et de rester les seuls habitants du pays » (Is 5 : 8). D’où une législation qui porte à la fois sur le travail, les dettes, la propriété foncière et le repos de la terre. L’idée derrière ce principe est un développement égalitaire, un développement qui crée des riches d’un côté en faisant attention aux pauvres de l’autre (Maréchal, 2005, p. 71), un développement qui élèvent les riches sans abaisser les pauvres. En fait ce fondement biblique nous ouvre aussi au code de bonne gouvernance économique respectueux du bien commun (Maréchal 2005 : 75).

Nous pouvons noter quelques implications de la destination universelle des biens comme fondement biblique du développement :

En premier lieu, la propriété privée que l’Eglise reconnait aux individus comme légitime doit tenir compte du bien commun comme lieu où la distination universelle des biens est prise en considération. En deuxième lieu, la distination universelle des biens interroge une conception individualiste de l’homme et, en conséquence, du développement pour canaliser l’activité économique vers l’humanisation du développement. La troisième implication est la conséquence du deuxième. La destination universelle des biens doit être la base de tout partage des ressources et la distribution des richesses par l’impôt, les taxes et l’accessibilité égale aux biens à travers des services publics (écoles, hôpitaux, routes, logements).

2.9.   Interdépendance et la solidarité

Enfin, le neuvième fondement biblique du développement c’est l’interdépendance et la solidarité. La destination universelle des biens va avec l’interdépendance et la solidarité. On ne peut pas parler de la destination universelle des biens de la terre sans parler de l’interdépendance et la solidarité. Au commencement, Dieu créa l’homme et la femme, et les deux deviendront un (Gen 1 : 26-27 ; Gen 2 : 18-24). La bible nous donne aussi des figures variées avec des activités variées.  On se souvient qu’Abel fait paître les moutons et Caïn cultivait le sol (Gen 4, 2) ;  Moïse gardaient des moutons (Ex 3, 1), Saül cultivait les champs (I S 11 : 5), David faisait paître les brebis (I S 17 : 34), Amos était berger et cultivait les sycomores (Am 1 :1 et 7 : 14), Joseph époux de Marie était charpentier, les quatre premiers disciples de Jésus étaient des pêcheurs et ont évolué plus tard avec Lévi qui était collecteur d’impôts (Lc 5, 1-11). Le développement exige qu’il ait diversité d’activités économiques et division du travail.  Cette diversité d’activités est bien exprimée par Saint Paul dans sa première lettre aux Corinthiens quand ils parlent des dons spirituels ou charismes (1 Cor 12 : 4-11 ; 1 Co 12:27-30), quand il appelle les Ephésiens à l’unité (Eph 4:11-13),  mais aussi par Pierre dans sa première lettre quand il rappelle que  les dons spirituels sont au service des frères et sœurs en vue de la gloire de Dieu (1 P 4 :11).

Encore une fois, le modèle de l’interdépendance et de solidarité le plus parlant est le modèle trinitaire (Dieu le Père créateur, Dieu le Fils sauveur et l’Esprit Saint sanctificateur)  dans l’économie du salut ou l’histoire du développement du salut.

Tel est l’arrière-plan du projet de la libération économique des pauvres qui habite Jésus. En quoi consiste ce projet au centre de la vie et de la mission de Jésus ?

3.      Jésus et la libération économique des pauvres

La libération économique des pauvres fait partie de tout le projet de Dieu de nous sauver, le projet de redonner et redorer le cachet de notre « image et ressemblance de Dieu » qui a été terni par le péché.  C’est donc pour dire que la pauvreté économique est, en partie, un effet du péché. Quand Dieu a créé l’homme, tout était très bon ! Le péché n’appauvrit pas seulement spirituellement mais aussi matériellement. Evidemment, quand on parle des pauvres, on entend directement la pauvreté matérielle. Mais ce n’est pas seulement la pauvreté matérielle des riches peuvent être pauvres quand la poursuite des biens matérielles pour eux-mêmes les vident de leur humanité à tel point qu’ils utilisent les autres comme un moyen vers leur richesse. C’est cela qu’on appelle l’asservissement matériel qui consiste en la préoccupation excessive avec des biens matériels. C’est sur cette base que les riches sont tellement mis en garde dans la Bible. Le prophète Amos est le prototype de cette mise en garde comme nous l’avons déjà vu.

C’est dans cette perspective que nous pouvons comprendre la descente de Jésus chez les riches comme Zachée et Levi collecteur d’impôt, certains pharisiens, etc. Il ne faut pas confondre cette pauvreté des riches avec la pauvreté spirituelle. Cette pauvreté spirituelle est souvent comprise comme le détachement par rapport aux biens matériels. Mais, la pauvreté spirituelle est ce à quoi nous sommes tous appelés. La pauvreté spirituelle suppose la vertu d’humilité. Il s’agit, comme le dit si bien Gustavo Gutierrez, de l’enfance spirituelle. La pauvreté spirituelle permet de reconnaitre Dieu comme amour, de reconnaitre les autres personnes, comme nos sœurs et nos frères, accepter l’amour gratuit de Dieu (Gutierrez 1993 : 125).

Le projet de la libération économique des pauvres consiste à donner la vie en abondance à tout être humain pour le sortir de la dépendance et reprendre la ressemblance de Dieu dans laquelle il a été créé. Cela implique toute une responsabilité. Jésus prend sur lui cette responsabilité de libérer les pauvres économiques de deux manières: en s’engageant et en accomplissant (je ne suis pas venu abolir mais accomplir). J’insisterai sur le premier aspect et brièvement sur le second.

3.1.    L’engagement de Jésus pour les pauvres

En venant dans le monde, Jésus a adopté la pauvreté. Ce que nous pouvons appeler la pauvreté comme engagement. Il s’est fait solidaire avec les pauvres pour lutter contre la pauvreté, il s’est engagé pour les pauvres avec les pauvres contre la pauvreté. Les théologiens de la libération en Amérique Latine et ailleurs ont parlé à juste titre de l’ « option préférentielle pour les pauvres ». Chaque mot de ce principe a une signification : Option se réfère à l’engagement ; Préférentielle se réfère à la pauvreté spirituelle ; et enfin, pauvre se réfère à pauvreté matérielle. Jésus avait une préférence spéciale pour les pauvres. Sa pauvreté spirituelle le rapproche de ceux qui sont pauvres matériellement (les affamés, les assoiffés, ceux qui sont nus, les malades, etc). Nous voyons bien son engagement dans le discours programme au début de sa mission que nous trouvons dans Luc 4, 18-19 :

L’esprit du Seigneur est sur moi, parce qu’il m’a conféré l’onction pour annoncer la Bonne Nouvelle aux pauvres. Il m’a envoyé proclamer aux captifs la libération et aux aveugles le retour à la vue, renvoyer les opprimés en liberté; proclamer une année d’accueil par le Seigneur(Lc 4 :18-19).

Jésus ne s’est pas seulement contenté de le dire, il l’a fait concrètement. Il a joint l’acte à la parole.  Il l’a fait par des guérisons : Jésus guérit les malades et les infirmes, il a ouvert les yeux des aveugles, il a ouvert les oreilles des sourds, il a fait marcher les paralysés et a ressuscité les morts. Ainsi, quand Jean Baptiste a envoyé ses disciples pour aller s’enquérir si vraiment Jésus était celui qui devait venir ou s’il fallait en attendre un autre, Jésus a répondu à ses envoyés:

Allez reporter à Jean ce que vous avez vu et entendu : Les aveugles retrouvent la vue, les boiteux marchent droit, les lépreux sont purifiés et les sourds entendent, les morts ressuscitent et la bonne nouvelle est annoncée aux pauvres, et heureux celui qui ne tombera pas à cause de moi(Lc 7: 22-23).

Pourquoi cette mission? Pourquoi Jésus a commencé par les pauvres ? C’était pour les restaurer dans la vie en plénitude, cette vie que Dieu a donné aux êtres humains quand il les créa à son image et à sa ressemblance et qu’il a vu que c’était très bon.. Il s’agissait de rendre l’humain indépendant des circonstances qui sont les conséquences du péché.

3.2.   Comprendre l’action de Jésus par l’approche des capabilités

Dans le développement comme liberté de Amartya Sen et Martha Nussbaum dont j’épouse la pensée économique, l’engagement avec les pauvres pour les pauvres pour lutter contre la pauvreté consiste à re-doter les humains des capabilités fonctionnelles fondamentales, substantielles sans lesquelles l’activité économique,  cette activité du développement est impossible. Pour ceux qui rencontrent l’idée des capabilités pour la première fois, la capabilité est une aptitude à la réalisation. Elle nous réfère à ce que les gens sont capables d’être et de faire.

Pour qu’un malade participe à l’activité économique, il faut d’abord le soigner pour qu’il soit en bonne santé ;  pour qu’un affamé participe au développement, il faut d’abord qu’il soit  nourri (la multiplication des pains et du poisson est à comprendre dans cet ordre d’idées) ; pour qu’un infirme participe à son développement, il faut d’abord qu’il retrouve confiance en lui-même, le faire découvrir ses capacités et ses talents. Dans une société où le péché était cause de marginalisation, il fallait d’abord dé-marginaliser les marginaux, c’est-à-dire leur montrer qu’ils ont de la valeur aux yeux de Dieu, découvrir leur dignité humaine pour qu’ils puissent participer dans la vie de la société et le faire sans honte. Que dire par cette démarginalisation ? Je veux dire que le pardon des péchés est une libération économique des marginalisés, la libération des esprits mauvais des gens qui étaient possédés était d’abord une libération économique. Parce que la marginalisation sociale était causée, en grande partie, par la perte du pouvoir socioéconomique, par l’exploitation et l’oppression économique. C’est le cas des prostitués que Jésus a pardonné et réintégré dans la société (Lc 7 : 36-50), celui des publicains (Lc19 :1-10 ; Mt 9 :9-13), celui des deux démoniaques gadaréniens qui vivent au cimetière (Mt 8, 28-34 ou mieux Lc 8, 26-39). Enfin, l’annonce de la bonne  nouvelle était une éducation, car la bonne nouvelle est une éducation par excellence.

Quand Jésus ressuscite les morts, il leur donne cette capabilité fonctionnelle de la vie. L’homme créé à l’image et à la ressemble de Dieu doit être capable de mener sa vie jusqu’au terme de sa vie humaine normale. Il s’agit de ne pas mourir prématurément, ou avant que sa vie  ne soit tellement réduite qu’elle ne vaille plus la peine d’être vécue. Dans le livre de Job, la bible parle de Job qui est mort rassasié de jours (cf. Job 42 : 17). Quand Jésus guérit les malades ou purifie les lépreux, il leur donne la santé du corps pour les rendre capables d’être en bonne santé, incluant la santé reproductive comme c’était le cas pour cette femme qui souffrait de d’hémorragie depuis 12 ans (dans Lc 8 : 43-48).  Quand Jésus guérit les infirmes, il les faits retrouver l’intégrité du corps pour les rendre capables de se déplacer librement, d’être protégés des violences ou autre agression. Quand il nourrit les foules affamées, il leur donne la possibilité d’être nourris, quand il prêche la bonne nouvelle, Jésus restaure la capacité d’imagination et la pensée pour que les gens puissent utiliser leur sens d’imaginer, de penser, de raisonner et de faire cela d’une manière vraiment humaine, d’une manière informée et cultivée par une éducation adéquate. C’est ainsi que les gens disaient que Jésus enseignait avec autorité parce qu’il leur disait quelque chose qui les faisaient progresser, quelque chose qui les ouvre aux nouvelles frontières (Nussbaum 2012 : 55-57).

En définitive, Jésus visait à promouvoir les capabilités qui sont en même temps les zones de liberté, il visait à leur donner des libertés substantielles, c’est-à-dire un ensemble de possibilités de choisir et d’agir, à savoir ce qu’ils sont et ce qu’ils peuvent faire pour eux-mêmes et pour les autres (Sen 1992; Sen 1999). Vous comprenez alors pourquoi on ne voit jamais ou rarement Jésus donner quelque chose de ponctuelle, comme un peu d’argent. Jésus donne plutôt cette liberté d’indépendance pour que les gens puissent s’autodéterminer, puissent être utiles pour eux-mêmes et pour les autres. Autrement dit, Jésus leur a donné ce que Korten appelle de l’ « énergie sociale » pour pouvoir bondir et avancer vers l’avenir de Dieu (Korten 1990 : 124).

Les apôtres ont adopté cette même attitude, comme on le voit avec l’histoire de la guérison de l’homme qui mendiait au temple dont nous parlent les Actes des Apôtres (3, 1-10 ):

Quand il (l’infirme) vit Pierre entrer au temple, il les sollicita pour obtenir une aumône. Pierre alors, ainsi que Jean, le fixent et lui dit : Regarde-nous ! L’homme les observait, car il s’attendait à obtenir d’eux quelque chose. Pierre lui dit : De l’or ou de l’argent, je n’en ai pas ; mais ce que j’ai, je te le donne : au nom de Jésus le Nazaréen, marche. Et le prenant par la main droite, il le fit lever… d’un bond il fut debout et marchait… et tout le monde le vit marcher et louer Dieu.

Redevenu normal, cet homme ne mendie plus pour survivre de jour en jour, désormais il prend soin de lui-même pour vivre toute sa vie. Autrement dit, grâce à cette liberté substantielle, désormais, cet infirme peut participer à l’activité économique, pourvoir pour lui-même et ne pas dépendre des autres pour mendier. Il peut se rendre au temple par lui-même, rendre grâce à Dieu pour cette liberté, il peut nourrir, soigner et abriter les siens comme le font les autres et donner les deniers du temple, etc. (Voir Speckman, 2007, p. 218sv).

 

3.3.   Je suis venu accomplir: établir la justice économique

Ce titre vous est certainement connu. C’est dans l’évangile de Mt 5 : 17, dans ce fameux discours ou Sermon sur la montagne que Jésus dit : Je ne suis pas venu abolir mais accomplir. Ce discours sur la montagne commence par les béatitudes où Jésus fait deux choses importantes, prendre clairement le côté des pauvres comme bénéficiaires du Royaume et préciser alors les conditions du bonheur. Ces bénéficiaires sont les pauvres en esprit, ceux qui ont faim et soif de justice, les artisans de paix, ceux qui ont le cœur pur, ainsi que les miséricordieux et les persécutés pour la justice.

Le bonheur ne consiste pas seulement à des conditions telles que les vêtements, la nourriture, le logement, les soins médicaux… et encore le droit de parole et la participation à la vie de la communauté.  Mais aussi l’existence de ces conditions exige qu’il y ait une justice. Ainsi, toujours dans ce discours sur montagne (Mt 7 :33), Jésus dira « Chercher d’abord le Royaume de Dieu et la justice de Dieu et le reste vous sera donné par surcroit. » Un des aspects de cette justice, c’est la justice économique. La justice économique suppose certaines vertus. J’en épingle deux ou trois qui sont évidentes dans les béatitudes.

D’abord l’humilité. C’est cette vertu qui caractérise les pauvres en esprit, les pauvres spirituels dont j’ai déjà parlé. Cette vertu nous permet de réaliser que les grands et les petits sont tous égaux devant Dieu et que tous comptent sur Dieu Père et sa providence.  Quand les grands, les riches sont solidaires avec les pauvres, la justice va jusqu’à se transformer en amour qui est la justice suprême.

En deuxième lieu, il y a cette vertu d’être paisible comme un homme de paix ou un artisan de paix. En fait la paix va toujours avec la justice. Elles sont inséparables. Saint Augustin disait: «si tu enlèves la justice qui garantit la paix, les royaumes de la terre deviennent des gangs de criminels à grande échelle ». Nous ne pouvons pas nous épanouir économiquement là où il n’y a pas de paix.

En troisième lieu, être miséricordieux. La miséricorde est l’expression de la bonté du cœur, le signe de notre humanité qui voit les besoins de l’homme au-delà de l’ordinaire. Pour bien le comprendre, il suffit de lire la parabole des ouvriers de la Onzième heure dont Matthieu parle en Mt 20 : 1-28. Le premier comme le dernier ouvrier compte sur la miséricorde de Dieu.

Donc, pour Jésus, libérer le pauvre économiquement passe par la justice économique. Pour libérer le pauvre fondamentalement, il faut parler de la justice économique (Maréchall 2004).

Gustavo Gutierrez disait : si vous parlez de la pauvreté, vous aurez probablement la réaction des personnes qui vous disent que vous êtes très généreux. Mais si vous parlez des raisons de la pauvreté, ils peuvent dire : mais celui-là est-il chrétien, n’est-il pas politicien. Il donne l’exemple d’un congrès missionnaire qui a eu lieu à Philadelphie où un très grand personnage de l’Eglise aurait dit : « Je viens d’un pays pauvre, vous êtes riches, vous les américains, aidez-nous. Les participants auraient applaudi abondamment. Mais au même congrès, Dom Herder Camara disait: «Je viens d’un continent pauvre, l’Amérique Latine. Notre pauvreté tient beaucoup aux corporations multinationales qui travaillent dans notre pays, et votre pays aide les corporations multinationales. Et on l’aurait applaudi plutôt d’une façon polie et moins abondamment, parce qu’il n’avait pas dit : « aidez-nous, mais plutôt : « Changer, tacher de changer votre gouvernement» (Gutierrez 1993 : 128-129).

Ainsi, en parlant des béatitudes ou des conditions du bonheur ou plutôt de la justice économique, Jésus veut nous faire entrer tous, riches et pauvres dans l’universalité de l’amour de Dieu où personne n’est exclu. Quand il y a la justice économique, les oubliés, les opprimés, les pauvres, les abandonnés sont dé-marginalisés et réintégrés dans la société où ils retrouvent leur dignité humaine participant à la vie de leur société. En d’autres termes, le code de la gouvernance économique telle que nous le trouvons dans la bible exige désormais la conversion du cœur.

Dans les évangiles, il y a au moins deux cas qui nous sont donnés pour nous faire comprendre cette justice économique qui doit nous aider à nous retrouver en vérité. Le premier est celui de Zachée dont Luc 19 : 1-10 nous parle. Zachée est chef des collecteurs d’impôts, une catégorie de fonctionnaires détestés parce qu’ils travaillent pour le système oppresseur, exploiteur susceptible d’être socio- économiquement corrompu. Ces fonctionnaires ne pouvaient pas entrer dans le temple parce que leur profession était considérée comme impure à cause de la malhonnêteté dont ils étaient entachés. C’est pour cela que les pharisiens étaient toujours gênés de voir Jésus manger avec eux. Parce que Zachée désirait voir Jésus, Jésus s’est approché de lui sans le condamner, mais plutôt en le rapprochant de la justice de Dieu. Jésus s’est adressé non pas à l’homme Zachée corrompu, mais à sa vertu humaine de l’hospitalité, à sa capacité de solidarité, sa capacité de partager et surtout d’ouverture économique bénéfique aux pauvres. La proximité de Jésus lui a permis d’intégrer la justice économique et mettre ses valeurs d’hospitalité, de solidarité et de partage au profit des pauvres. Zachée dit au Seigneur : Seigneur, je fais don aux pauvres de la moitié de mes biens et, si j’ai fait du tort à quelqu’un, je lui rends le quadruple (Lc 19 : 7-8).  Donc, la justice pour les pauvres consiste à chercher Jésus qui annonce la justice et dénonce l’injustice.

L’autre exemple est celui de l’homme riche et pauvre Lazare dont parle Lc 16 : 19-31. Le vice du riche est de ne pas avoir vu Lazare, de s’intéresser à sa propre sécurité et de la sécurité des siens même dans l’enfer. La justice économique que Jésus annonce dans les béatitudes consiste à veiller à ce que Lazare n’aille pas au ciel affamé et à l’homme riche d’aller en enfer rassasié. La justice économique concerne les riches et les pauvres.

Conclusion 

Nous avons souligné quelques fondements bibliques du développement et en arrière-plan apprécié le projet de libération économique des pauvres en empruntant l’approche par les capabilités. Nous pouvons conclure que la lecture biblique peut nous aider à fonder une éthique économique comme définition, promotion et diffusion dans la vie économique des règles de jeu, des principes et normes éthiques qui permettent de mettre l’économie au service de tout l’homme et tout homme (Hugon 2003: 2).

 


[1]8 pays qui ont des caractéristiques particulières comme les grands producteurs du pétrole ne sont pas inclus.

Référence Bibliographique: 

Bible, TOB 2004.La Bible. Paris: Cerf.

Gmünder, P R 2004. Evangile et développement: Pour rebâtir l'Afrique. Bafoussam.

Gutierrez, G 1993. Option pour les pauvres: Bilan et enjeux. Theologiques, 1(2), 121-134.

Hugon, P 2003. L'économie éthique publique: biens publiques mondiaux et patrimoines communs. Paris: UNESCO.

Maréchal, J.-P 2005. L'éthique économique de la bible. L'économie politique, 3(27), 66-81.

Maréchal, J.-P 2005. L'éthique économique de la Bible. Economie Politique, 27, 66-81.

Maréchall, J.-P 2004. Aux Origines bibles de l'économie normative. Ecologie et Politique, 2(29), 215-226.

Ntibagirirwa, S 2014. Philosophical Premises for African Economic Development. Geneva: Globethincs.

Nussbaum, MC 2012. Capabilités: Comment créer les conditions d'un monde plus juste? Paris: Nouveaux Horizons.

Paul VI, Pape 1967. Sur le Développement des peuples. Rome: Vaticana.

Pope, J. P 1981. Sur le Travail Humain. Rome: Vaticana.

Sen, A 1992. Inequality reexamined. Cambridge, MA: Harvard University Press.

Sen, A 1999. Development as freedom. New York: Anchor books.

Speckman, M 2007. A biblical vision for Africa's development. Peitermaritzburg: Cluster publications.

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