ENTRE L’ETAT POLICIER ET L’ETAT ETHIQUE Y A-T-IL RACCOURCI ?

Abstract: 

:This editorial journal article regulates the ethics at the horizon where State leaders and their citizens should journey to. It argues that no shortcut relates the rule of force and the rule of ethics. Rather, the articles design a diversified process that corresponds to different levels of the population’s political and moral maturity, namely, law, justice, and then ethics as the final destination of State organization. Three cornerstones are required to back the achievement of this ethics: the understanding of politics as wisdom rather than a game, a paradigm shift from political ethnization to the politics of citizenship identification, and from anthropological poverty to spiritual empowerment as a ground-floor for people’s dignity. Therefore, the article draws a panoramic view of the papers in this issue.

1.       Introduction

 

La question de l’Etat éthique… il faut se la poser ! D’abord parce que, fondamentalement, toute société, toute personne, tout citoyen aspire au mieux, aux meilleures conditions de vie, et à l’épanouissement dans sa société. En deuxième lieu, parce que poser la question de l’Etat éthique, c’est se poser la question des conditions de légitimité et de légalité d’un Etat au plus haut niveau de l’accomplissement politique.

Nous parlons souvent de l’Etat de droit pour déplorer le chaos ou l’usage de la force. Pourtant l’Etat de droit ne semble être qu’un moment d’un processus à la recherche d’une société mieux ordonnée, s’il faut parler dans les termes de John Rawls (1971), vers l’Etat éthique. D’autres moments sont l’Etat policier et l’Etat de justice. La question est de savoir comment passer de l’Etat policier à l’Etat Ethique. Est-ce possible ? Y’a-t-il un raccourci ? Peut-on passer de l’Etat policier à l’Etat éthique sans passer par l’Etat de droit et l’Etat de justice ? Il s’agit d’une question qui est aussi sous-adjacente à la théorie du contrat social de Thomas Hobbes, Locke, Montesquieu, Rousseau et Kant. Probablement informé par l’ordre du moment, ces penseurs ont parlé respectivement de l’état de nature comme étant un Etat de chaos ( l’homme est un loup pour l’homme), présocial, pré-civil ou pré-légal. Il n’est pas rare de voir des comportements sociaux, politiques et même économiques qui rappellent cette situation, pourtant  hypothétique. Comme l’éditorial éclaire la lecture du présent numéro, trois aspects de l’Etat seront définis avant de proposer les conditions pour converger vers l’Etat éthique. Considérons l’Etat policier en premier lieu.

2.      Etat de police ou Etat policier

Comme point de départ,  je n’entrerai pas dans la question de vouloir définir l’Etat puisqu’ il s’agit ici de pointer l’horizon éthique auquel il doit tendre. Je commence donc par l’Etat policier. Comme le concept le suggère, l’Etat policier est celui qui utilise les méthodes policières pour faire valoir les prérogatives de son pouvoir. Cela peut aller jusqu’à utiliser la violence justifiée ou arbitraire. C’est ce type d’Etat que nous retrouvons dans les régimes totalitaires ou dictatoriaux et dont la conséquence est le règne de la terreur ou le règne du chaos.

Au-delà de cette définition plutôt simple, retenons celle qui a été présentée par Raymond Carré de Malberg (1920 : 488) et qui définit l’État policier comme :

celui dans lequel l'autorité administrative peut, d'une façon discrétionnaire et avec une liberté de décision plus ou moins complète, appliquer aux citoyens toutes les mesures dont elle juge utile de prendre par elle-même l’initiative, en vue de faire face aux circonstances et d’atteindre à chaque moment les fins qu’elle se propose: ce régime de police est fondé sur l’idée que la fin suffit à justifier les moyens.

La marque caractéristique de l’Etat policier est que l’autorité n’a pas à se référer aux règles du droit nécessairement. Les citoyens obéissent sans droit de contestation. La contestation rencontre l’opposition de la force.

Bien que les politologues et les autorités politiques parlent de la violence légitime de l’Etat, il ne leur serait pas aisé de parler de la légalité de la violence. Même si l’ordre était la finalité poursuivie, elle n’aurait pas de base morale pour exonérer l’usage de la force, même dans les circonstances qui, apparemment le requiert. La fin ne justifie pas les moyens. Ainsi, l’antithèse de l’Etat policier est l’Etat de droit.

 

3.      Etat de droit

 

Le concept de l’Etat de droit est aujourd’hui passé dans le vocabulaire de l’appréciation de l’ordre politique. Comme le dit Eric Millard (2001) :

 

Le concept de l’Etat de droit est une des conditions de tout projet politique en quête de reconnaissance ou de légitimité… il est entendu par tous que l’Etat de droit est paré de vertus positives aptes à réaliser la démocratie et à protéger les libertés, en tant qu’il implique que la liberté de décision des organes de l’Etat est, à tous les niveaux, limitée par l’existence de normes juridiques supérieures, dont le respect est garanti par l’intervention d’un juge.

 

Ainsi, pour déplorer un quelconque désordre social, politique ou militaire, les gens regrettent l’absence de l’Etat de droit, comme si celui-ci était la finalité morale de la gestion politique. De fait, l’Etat de droit est tellement estimé qu’il passe comme la garantie de la démocratie et des droits humains, de la justice et de l’ordre politique. Cela n’est pas sans raison d’autant plus qu’il semble mieux de répondre à la loi dont les citoyens sont sujets que de répondre à l’homme dans l’ordre de l’Etat. Selon Jean Jacques Rousseau, la loi protège chacun de l’arbitraire et de l’égoïsme des volontés particulières. Elle part de tous et s’applique à tous. L’implication est que, désormais, tout le monde est engagé de son propre aveu à obéir aux lois dont il est l’auteur. Voilà pourquoi, dans un Etat moderne, la première chose supposée pour garantir la légitimité politique c’est la loi fondamentale ou la Constitution, suivie d’autres règles de droit.

 

Mais qu’est-ce que l’Etat de droit  pour être ainsi estimé? Selon Norman Palma, « l'Etat de droit se manifeste par-delà le despotisme. Ce mouvement marque le passage de la souveraineté détenue par le despote - plus ou moins éclairé -, à la souveraineté comme expression de la volonté du peuple » (Palma 1997 :60). Palma poursuit en disant que le concept d'Etat de droit est celui dans lequel la moralité commence à s'objectiver au niveau du pouvoir. Le mot « commence » est important puisqu’il signifie que l’Etat de droit n’est pas la finalité de ce que l’Etat doit être ou devenir. Ce n’est qu’un moment.

 

Dans l’Etat de droit, on peut retrouver certaines pratiques moralement inacceptables. C’est ainsi que l’Afrique du Sud sous le régime de l’apartheid pouvait se faire passer comme un Etat de droit, tout comme les Etats Unis avant l’émancipation des femmes et des Noirs. On pourrait en dire autant pour des Etats dominés par des minorités ou par des majorités ou les monarchies constitutionnelles les inégalités dites naturelles sont acceptées comme telles. Ainsi donc, l’Etat de droit n’est pas nécessairement le lieu règnent la justice, la justice pour tous et la justice équitable. Des fois même les Etats policiers disent être des Etats de droit. Il y a toujours une distance entre ce qu’un Etat de droit est, ce qu’il doit être et ce qui est souhaitable. Cependant nous pouvons faire l’éloge de l’Etat de droit en ce sens que le despotisme et l’autoritarisme qui tendent à se hisser au-dessus de la loi est exclu, condamné ou au moins déploré.

 

L’Etat de droit n’est donc pas toujours juste ou démocratique. L’existence de la loi fondamentale, à elle seule, ne garantit pas non plus ni le bonheur politique ni les droits humains dans un tel Etat de droit.  Comme le déplore Palma, le rituel démocratique qui consiste à avaliser les décisions du pouvoir par le peuple ne fait pas partie de la logique essentielle de l’Etat de droit. La participation des citoyens ne peut pas aller au-delà du droit pour être une pratique démocratique, « qui protégerait le peuple contre lui-même, qui ferait des individus la source du pouvoir (souveraineté du peuple), le moyen du pouvoir (corps électoral, référendum) et la fin du pouvoir (droits de la personne)» (Millard 2001 : 4-5). La vraie démocratie suppose des principes de justice comme équité, une justice pour tous de telle manière que tous les citoyens soient soumis aux mêmes droits légaux et aux mêmes conditions politiques. D’où la nécessité de l’Etat de justice.

 

4.      L’Etat de justice 

 

Comme le concept le sous-entend, l’Etat de justice est celui dans lequel les citoyens sont soumis au pouvoir de la justice. Dans toute société, la finalité de la justice est la création d’une communauté de personnes égales tous sont exposés aux meilleures conditions d’une vie épanouie. Dans sa Théorie de la justice, John Rawls (1971 :3) partait d’une prémisse qu’il énonçait ainsi: « Chaque personne possède une inviolabilité fondée sur la justice que même le bien-être de la société ne peut enfreindre ». Telle est la condition fondamentale de l’égalité des citoyens qui défie tout utilitarisme et tout égoïsme sociopolitique. A ce propose, Rawls souligne ces deux  principes de justice, dite justice comme équité:

 

Chaque personne a un droit égal au système le plus étendu de libertés de base égales pour tous qui soit compatible avec un même système de libertés pour tous. Les inégalités sociales et économiques sont autorisées à condition : Qu’elles soient au plus grand avantage du moins loti; Qu’elles soient attachées à des positions et à des fonctions ouvertes à tous dans les conditions de juste égalité des chances (Rawls 1971:72)

 

Donc, nous pouvons dire que les conditions d’égalités et de libertés sont le fondement même de l'Etat de justice.

La question est de savoir quel est le régime politique susceptible d’assurer cette égalité et cette liberté. Evidemment, tout le monde pourrait répondre que c’est la démocratie.  Or, tous les régimes même les plus autoritaires et dictatoriaux se vantent d’être démocratiques. Sans entrer dans les détails pour se confronter à la question de de savoir de quelle démocratie il s’agit ; disons simplement quela vraie démocratie incarne les valeurs fondamentales, universelles et particulières, qui constituent le socle même des droits humains à savoir la dignité, l’égalité et la liberté des individus et des peuples (voir Ntibagirirwa 2010 : 3-8). J’ai toujours considéré la démocratie comme étant une forme de gestion socio-politique liée à l’évolution de la connaissance et de la conscience de soi, de sa dignité, donc un accomplissement socio-historique atteint au fur et à mesure que les citoyens deviennent politiquement conscients ou mieux, prennent conscience de leur maturité politique. C’est à cette condition que nous pouvons réussir la démocratie comme un gouvernement du peuple pour le peuple. Dans ce sens, la démocratie ne se définit pas tellement comme le gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple, mais plutôt, comme un « gouvernement par discussion » qui suppose un raisonnement public (Sen 2009: xiii). La discussion ou le raisonnement public suppose l’égalité, la liberté d’esprit, la conscience et la maturité politique. Sur cette base, l’Etat de justice dépasse l’Etat policier du fait que là où il y a raisonnement public, il n’y pas d’arguments de la force, et il dépasse l’Etat de droit par son fondement sur des principes de justice comme équité.

Le problème de l’Etat de justice est celui d’une égalité perçue de manière distributive. Or cela ne veut pas dire que les citoyens libèrent leurs propres énergies au point  de se doter des capacités nécessaires. Comme l’affirme Martha Nussbaum dans son œuvre si louable, Political Emotions: Why love matters for justice (2013), la distributivité de la justice ne permet de percevoir chaque citoyen au-delà des satisfactions personnelles (Nussbaum 2013: 119). Les citoyens ne peuvent pas se limiter à être de simples conteneurs des satisfactions, appelés à jouir seulement des « préférences adaptives», c’est-à-dire des préférences adaptées à ce que l’on peut avoir seulement. L’être humain aspire à plus de valeur. Il s’agit donc ici d’une critique qui a été élaborée par Amartya Sen contre la théorie de la justice de Rawls. La justice est « offerte » par des institutions supposées être justes aux citoyens comme un des biens de base plutôt que d’être un accomplissement issue d’un sursaut moral des citoyens et leurs institutions sociopolitiques (cf. Sen 1992: 27, 2009: x-xi). Or les biens de base ne nous permettent d’apprécier suffisamment le degré de la liberté des citoyens. Le risque serait alors l’égalité et la liberté dans le sens horizontal au lieu de l’égalité et la liberté dans le sens verticale. Ainsi donc l’Etat éthique vient remédier à ce problème.

 

5.      L’Etat éthique

 

L’Etat éthique est un horizon contemplé par ceux qui recherchent l’ordre politique durable. C’est cet Etat que contemplait Platon quand il a envisagé, au point d’être un criminel ennemi de la société ouverte[1], le roi-philosophe comme celui qui connait non seulement ce qui est bien, vrai et juste, mais aussi la vérité, le bien et la justice. 

 

Que voulons-nous dire par Etat éthique? Dans la théorie du contrat social, l’Etat éthique est assimilé à la société civile ou état juridique ou état civil considéré comme un état meilleur par rapport à l’état de nature où l’homme est limité et est un danger pour lui-même et pour les autres. Il s’agit d’un état idéel et idéal dans lequel l’individu s’affranchit de l’état de liberté naturelle pour embrasser la volonté générale dans un Etat de lois issues de tous. Il serait contradictoire de parler d’Etat éthique comme Etat juridique. Une telle compréhension ne risquerait-elle pas de nous faire tomber dans les insuffisances de l’Etat de droit et l’Etat de justice que nous voulons dépasser ?  

 

Pour Kant, cependant, l’Etat éthique est la finalité, une destination finale à laquelle doit tendre l’état civil. Il s’agit de dépasser le droit «dans la mesure où il conduit la communauté humaine à sortir de l'état de nature » et à entrer dans un état civil pour tendre vers la destination finale, l’Etat éthique. Le passage de la liberté naturelle à l’Etat juridique lui-même, est une exigence de la raison qui suppose comme devoir de vertu, l’union avec les autres. Mais, comment éviter de tomber dans une éthocratie qui risque de n’être qu’une pure utopie, un idéalisme éthéré d’autant plus que l’être humain n’est pas un ange ?

 

En tenant compte de cette réalité humaine, nous pouvons nous laisser tenter par cette compréhension de l’Etat éthique comme étant une société dans laquelle le citoyen «se soumet à la loi conformément à sa prudence politique, c’est-à-dire à sa responsabilité morale politique [tandis que] le gouvernant agit politiquement en dirigeant les citoyens par des lois sages vers une vie heureuse (la vie bonne) dans la communauté (Braz 2005). Il s’agit d’équilibrer entre la vertu et la loi. L’être humain est capable de vertu et de loi en même temps que la loi vient soutenir la vertu. C’est le lien entre le droit et la morale. D’autre part, on ne peut pas espérer que sur base de la seule bonne volonté, bien qu’animée par la vertu, les êtres humains se décideront dans la concorde à travailler au bonheur de la communauté. Comme Aristote le dit : L’homme est le plus noble des animaux, mais il est le plus bas de tous s’il se détourne de la loi et du droit.

 

Où voulons-nous en venir en fin de compte ? L’Etat éthique n’est certainement pas un Etat sans Etat comme pourrait le suggérer l’idée du royaume de la vertu. Il s’agit d’une situation où, principalement, l’Etat- coercition (par l’homme ou par la loi) s’efface au fur et à mesure que s’affirment les éléments toujours plus importants de la société ordonnée (Gramsci 1983 :15-6). Dans un Etat éthique, l’engagement du citoyen dans la recherche de ce qui est bien et juste dans la société est plus un dévouement qu’un engagement en vue du profit individuel ou sectaire, pour reprendre les mots de Norman Palma.

 

 

 

Voici quelques pistes qui convergent vers l’Etat éthique.

 

5.1. De la politique comme jeu à la politique comme sagesse

 

La première condition pour passer à l’Etat éthique est la compréhension de la politique comme une sagesse. L’idée de la politique comme sagesse m’est familière alors que je l’avais évoquée dans un articleLe Leadership Burundais à travers les âges de la politique, publié dans la Revue « Au Cœur de l’Afrique », en 1996. Face à une politique qui était effectivement réduite à la politique politicienne, je suggérais de retrouver le sens de la politique comme gestion rationnelle de la cité, la politique comme sagesse.  Il s’agit d’équilibrer la sagesse théorique et la sagesse pratique dans la détermination de ce qui est politiquement beau, bon et bien. Mon rêve était que, dans la politique vue sous cet angle, la gestion du pouvoir devrait être une éducation civique des citoyens. D’où l’article, De la Gestion du Pouvoir à l’Education Civique publié dans « Au Cœur de l’Afrique », en  1997. Quand les citoyens d’un Etat voient le pouvoir comme une éducation civique et que les autorités le conçoivent comme telle, l’idée de l’Etat éthique est en route pour devenir une réalité.

 

5.2.            De l’ethnisation politique à la politique de la citoyenneté

 

La deuxième condition pour s’engager sur la voie de l’Etat éthique est le passage de l’ethnisation politique à la politique de la citoyenneté. La citoyenneté est un concept de l’Etat moderne, c’est-à-dire, celui d’une société qui sort des appartenances claniques et tribales, et, partant, de tous les intérêts sectaires pour valoriser l’appartenance à l’Etat comme citoyens. Il s’agit de s’affranchir et de se libérer des liens sectaires pour embrasser la volonté générale dans un Etat de lois issues de tous pour tendre vers sa destination finale qui est celui d’un Etat éthique.

5.3.            De la pauvreté anthropologique à un enrichissement spirituel

 

La troisième condition est de s’affranchir de la pauvreté anthropologique pour s’enrichir spirituellement. Il s’agit de retrouver ses énergies intérieures pour une fière création et innovation en se posant trois questions fondamentales : Qui suis-je ? Où suis-je ? Comment vivre alors étant donné ce que je suis et où je suis. La question « qui suis-je » est une question qui nous aide à nous redéfinir ; et dans ce processus de se redéfinir et se ressaisir ? La question « où suis-je ?» est une question d’espace et de temps. On se redéfinit dans l’espace et par temps pour s’ajuster aux nouvelles exigences et circonstances. Enfin, la question « comment vivre étant donné ce que je suis » est la concrétisation des deux questions précédentes. Il s’agit de vivre en fonction de son identité réévaluée et en fonction des exigences de l’espace et du temps (toujours). Cela nécessite de s’accorder à l’ordre du temps en redynamisant son identité et sa densité ontologique. Un aspect de ce processus c’est de se reposer la question de ce que l’être humain dans une société d’humains et comment vivre avec des humains, ses semblables, au-delà des lois manipulables selon les desseins et les humeurs de certaines autorités et de certains citoyens. Voilà une question d’éthique politique !

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C’est dans cet esprit que les articles de ce numéro sont circonscrits. Nous en proposons alors une vue panoramique du contenu.

6.     Vue panoramique du contenu de ce numéro

 

Dans L’Accord d’Arusha et la violence politique au Burundi, Siméon Barumwete revisite les crises socio-politiques qui jonchent l’histoire du Burundi depuis l’indépendance jusqu’aujourd’hui. Chemin faisant, il fait l’éloge de l’Accord de Paix d’Arusha 2000 dont l’objectif était d’institutionnaliser l’éthique de la non – violence afin de recouvrer la paix et la sécurité durable. Barumwete souligne que la violation de cet Accord explique la recrudescence de la violence commise à la fois par les forces de l’ordre et par les groupes armés. Aussi, il suggère que le chemin de l’éthique consensuelle conduit à la sécurité de tous. Or le processus du consensus est le début de la voie vers l’idéal de l’Etat éthique dans lequel le bien commun est garanti en vérité.

 

Dans L’Accord d’Arusha et la loi fondamentale à l’épreuve du débat sur la sécurité au Burundi, Jean-Marie Katubadi éclaire, en les interrogeant, les manifestations du 26 avril 2015 à Bujumbura et la violence qui s’en est suivi. Cet éclairage suscite un double questionnement : celui de la construction d’un système politique qui puisse réduire le recours à la force et celui de la possibilité de fonder la stabilité sur l’acceptation mutuelle et le consensus afin de barrer la route à la domination ou la discipline. N’est-ce pas la question du pouvoir et de la gouvernance dans un Etat éthique en gestation ? 

Dans Sécurité publique et sécurité privée au Burundi: le monopole de la violence légitime en question, Gérard Birantamije poursuit l’itinéraire qu’ont emprunté les sociétés de sécurité privée et de gardiennage pour les confronter à la sécurité publique. Birantamije se demande si le développement de la sécurité privée et des sociétés de gardiennage dans le contexte fragile comme celui que connait le Burundi ne risque pas de compromettre le monopole de la violence légitime de l’Etat. L’enjeu est ici de savoir comment la responsabilité de l’Etat et du citoyen peuvent converger vers la haute finalité qu’est le bien commun dans l’Etat éthique.  

Dans De la bonne puissance pour une démocratie plus authentique au cœur des Grands Lacs Africains,Laurien Ntezimana,réfléchit sur les conditions de l’avènement d’une démocratie plus authentique dans la région. Il utilise le concept de la «bonne puissance» comme instrument permettant de déconstruire la récurrence de la violence dans cette région et de démasquer les élections prétendument démocratiques. Ntezimana propose une méthode dite « de troisième niveau » pour faire éclore une démocratie plus authentique dont nos pays ont besoin. Une démocratie authentique nécessite le raisonnement public et ne peut s’éclore en vérité que dans l’Etat éthique.

Enfin, dans La sécurité comme bien commun en Afrique, Pascal Niyoyizigiye fait la chronique Africaine sur la question de la sécurité. La sécurité est devenue complexe et tend à se libéraliser conceptuellement et politiquement dans la politique désormais pluraliste. Un regard panoramique lui permet de conclure que la sécurité est un bien commun. Une région du continent africain ne peut être en sécurité tant qu’il y a un pays ou une sous-région qui est menacé(e) par l’insécurité. Il rappelle que l’éthique du consensus en matière de la sécurité est telle que, sur le plan continental, l’Union Africaine s’est vu obligée de créer le Conseil de Paix et de Sécurité (CPS) pour s’occuper justement des problèmes de sécurité dans les pays de la région. La suggestion est que ce conseil doit être consolidé.

Bonne lecture !




[1]Karl Popper considère Platon, Hegel et Marx comme des ennemies de la société ouverte. Pour en savoir plus, je recommande son livre en deux tomes, The open society and its enemies (1966).

Référence Bibliographique: 

Braz, A 2005. Droit et Ethique chez Kant : Idée d’une destination communautaire de

l’existence. Paris : Publications de la Sorbonne.

De Malberg, R C 1920. Contribution à la théorie générale de l’Etat. Paris :

Dalloz.

Gramsci, A 1983. Notes sur Machiavel sur la politique et le prince moderne.

Cahiers 13, 14 et 15. Paris : Editions Sociales.

Millard, E 2001. L'Etat de droit : Idéologie contemporaine de la démocratie.  In

J.M. Février & P. Cabanel. Question de démocratie, pp.415-443, Mirail : Presses Universitaires du Mirail

Nussbaum, M C 2013. Political Emotions : Why love matters for justice. Cambridge,

MA : Havard University Press.

Ntibagirirwa, S 2010. Démocratie : la vôtre ou la nôtre. Ethique et Société,

6(1) : 3-8.

Palma, N 1997. Introduction à la théorie et à la philosophie du droit. Paris: Université

de Paris.

Popper, K R 1966. The open society and its enemies. Princeton: Princeton University

Press.

Rawls, J 1971. A Theory of Justice. Harvard: Harvard University Press.

Sen, K A 1992. Inequality reexamined. Cambridge, MA: Harvard University Press

Sen, K A 2009. The idea of justice. London: Allen Lane.

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