DE LA BONNE PUISSANCE POUR UNE DEMOCRATIE PLUS AUTHENTIQUE AU CŒUR DES GRANDS LACS AFRICAINS

Abstract: 

This article attempts to reflect on the requirements   for an authentic democracy in the heart of   the complex Great Lakes of Central Africa upheaval.  Indeed, it laboriously aims to dig out the fundamental contribution that lies in the understanding of the concept “good power” that is embedded in real greediness for power.  This ramifies in three dimensions that particularly work interchangeably. The first recalls stability or peace, the second militates for energy or power and the third vies for unity or oneness. Thus, the concept of “good power” demonstrates the levels of conscience and the logic in the possession of real selfish power that ignites the recurrence of violence in the Great Lakes region. Consequently, selfish power ironically reveals the uncontrollable flaws that drive the supposedly democratic elections. Therefore, the article lays a foundation stone on the methodology for an authentic democracy. This should build on the powerful and massive voice of people, as a wide avenue and a window of opportunity to invest effort in a substantiate leadership through the empowerment of the population to choose their esteem and competent leaders. 

1.          Introduction

 

Le but de cet article est de contribuer à la réflexion concernant les conditions de l’avènement d’une démocratie plus authentique dans la région perturbée du cœur des Grands Lacs Africains, entendez le Burundi, la République Démocratique du Congo et le Rwanda.

Pour espérer provoquer de façon pertinente un changement social positif, il convient de pratiquer une démarche à deux temps : le constat loyal et le travail de vérité. Le constat loyal vise à établir un diagnostic honnête de la situation. « Loyal » ici fait signe vers le refus de toute complaisance. Le travail de vérité quant à lui consiste à mettre en route les bons processus. Il s’agit ici d’adopter une méthode capable d’induire les mutations de mentalité nécessaires à la véritable révolution qui est bien différente du « toujours plus de la même chose » qui résulte de l’utilisation de la violence.

2.         Constat loyal

 

Qui dit constat dit regard, observation. La position de l'observateur, on le sait, entre pour beaucoup dans sa perception. Il importe donc de toujours préciser son promontoire, pour qu’on puisse juger de la qualité du constat.

 

2.1.             Mon promontoire

 

Le promontoire se définit par trois paramètres : la « situation de classe » (j'entends par la localisation passive, due à l'histoire et à la société), la « position de classe » (j'entends par la localisation active, due à la volonté propre), et le cadre de référence. Très relatif à la position de classe, le cadre de référence est cependant travaillé -plus ou moins sourdement-, par la situation de classe, pouvant donner ainsi des perceptions biaisées, plus ou moins gravement, à l'insu de l'observateur. C'est la raison pour laquelle toute perception de situation doit accepter d'être corrigée et complétée à partir d'autres promontoires, sous peine de devenir une simple propagande idéologique[1].

D’abord ma situation de classe ! Je suis Rwandais. L’histoire de mon pays, comme celle du Burundi, a créé trois fausses ethnies dont deux artificiellement mais mortellement antagonistes. La société rwandaise me situe du côté des dits « Hutus », nonobstant les mesures prises par l’autorité en place pour supprimer la mention ethnique des documents officiels comme du langage courant. Je viens du Sud du Rwanda, l’ancienne ville de Butare rebaptisée aujourd’hui Huye[2].

Qu’en est-il de ma position de classe ? Je me sens et je me veux d’abord un être humain. En tant qu’« émanation singulière de la Vie Universelle », - identité réelle de toute créature-, je me sens chez moi partout et frère de tout le monde. J’assume avec bonheur mon étiquette de Rwandais et j’ai démontré, dans l’histoire récente du Rwanda, que la manipulation ethnique n’avait aucune prise sur moi[3].

Enfin mon cadre de référence !Théologien de formation (Kinshasa et Leuven), catholique sans limitations (« romain » ou « orthodoxe » sont des limitations de « catholique » que je récuse), la « bonne puissance » constitue mon cadre de référence. La bonne puissance (« amaboko mahire » en langue du Rwanda) est la capacité de donner la vie, y compris en risquant d’y perdre la sienne (le meilleur exemple est celui d’une femme qui enfante) ! Son contraire est la fausse puissance (« amaboko matindi » en langue du Rwanda), qui est la capacité de donner la mort (le meilleur exemple ici est celui d’un guerrier bardé d’armes).

Elaboré à Leuven entre 1988 et 1990, testé et trempé dans le feu de la « décennie maudite » (1990-2000) de l’histoire des Grands Lacs, le principe de bonne puissance est mon moule à fabriquer les faits ! L’on sait en effet que « les faits sont faits », une manière élégante de dire que chaque conteur mijote l’histoire à sa propre sauce ! Moi je perçois et je parle à partir de,-et pour aller à-, la bonne puissance ! Je demande donc au lecteur de bien vouloir prendre le temps de se familiariser avec ce principe important pour la suite, ici résumé.

La bonne puissance qu’est-ce que c’est ?La bonne puissance est un trinôme, c’est-à-dire une réalité à trois dimensions qui fonctionnent de façon intégrée.

Dimension 1 : stabilité, assurance, non-peur. La personne venue à sa bonne puissance se sent en sécurité dans la vie, sans que cette sécurité dépende de son avoir, de son pouvoir, de son savoir ou de son valoir. Ces piliers ordinaires de la sécurité humaine lui viennent plutôt de sa profonde confiance dans la Vie. Cette confiance prend sa source dans le fait qu’elle se souvient de sa véritable identité de « Single Outflow of the Universal Life - SOUL» - émanation singulière de la Vie Universelle ou « enfant unique de Dieu » en termes religieux. Cette mémoire active en elle son unité avec la Source (re-member : redevenir membre!). Et c’est cette unité « re-connue » (« connue de nouveau ») comme infrangible qui devient la source ultime de sa sécurité.

Dimension 2 : énergie, force de vivre, non-résignation. La personne venue à sa bonne puissance vit toujours en possession de ses moyens, dans le moment présent. Elle a appris à activer la conscience de son corps énergétique. Ce faisant, elle s’est constitué un paratonnerre qui la protège contre les surcharges affectives. Elle sait donc se dégager du temps psychologique (passé non pardonné et futur inquiétant) et dissiper en elle le corps de souffrance. Voilà pourquoi elle ne pleure pas longtemps sur le passé, ne délire pas sur le futur, ne s’émeut pas du chant des sirènes ou du ricanement des hyènes alentour. Elle va son chemin d’être humain éveillé avec la joie comme note dominante de sa vie. La résilience est un élément naturel chez elle : elle sait en effet recadrer les échecs pour en faire des tremplins d’une vie plus épanouie.

Dimension 3 : union, accueil absolu d’autrui, non-exclusion. La personne venue à sa bonne puissance ne se reconnaît pas d’ennemi. Elle a appris à activer la fréquence vibratoire de la présence consciente qui fonctionne comme un transformateur d’énergies. Elle sait donc retourner les forces mortifères qui l’agressent en énergies vivifiantes. Voilà pourquoi elle ne voit autour d’elle ni violents ni méchants; son regard traverse les masques jusqu’à ne voir simplement que des gens qui souffrent et qui croient que pour guérir, ils doivent faire souffrir! Elle les perçoit comme des  somnambules et des amnésiques qui ne font rien délibérément, mais sont plutôt vécus par des programmes automatiques issus de l’histoire personnelle et collective dont ils demeurent prisonniers (« Pardonne-leur, Père, car ils ne savent pas ce qu’ils font ! »). Aussi commence-t-elle toujours par le respect. Ses relations sont empreintes de compassion, c’est-à-dire d’empathie et d’éveil à la grandeur divine de l’humain.

La bonne puissance, à quoi ça sert ?La bonne puissance sert à vivre délibérément sa vie et à rendre les gens à eux-mêmes. Elle sert donc à engendrer la vie, à nourrir la vie, à soigner la vie, à protéger la vie quand elle est menacée, à re-susciter la vie et à la re- épanouir quand elle a été malmenée comme dans les Grands Lacs ces dernières années. L’humain venu à sa bonne puissance ne connaît plus la logique de la guerre : il ne lutte plus, il danse la vie, même et surtout au cœur des génocides et de leurs traînées mortifères.

Comment arrive-t-on à la bonne puissance ? La bonne puissance s’acquiert par la « théopraxie » (entendez la théorie et la pratique) de l’art de vivre en ses sept domaines principaux que sont la respiration, l’alimentation, la détente, l’auto-guérison, la relation, la pensée et la réalisation de soi. Cette théopraxie résulte en six clefs de la bonne puissance que sont l’énergie, la maturité, l’harmonie, la créativité, la synergie et la fécondité. La bonne puissance vient donc d’un entraînement rigoureux au niveau des quatre plans fondamentaux de l’être humain : le plan physique, le plan émotionnel, le plan mental et le plan de l’unité (avec ses deux pôles, le pôle sexuel et le pôle spirituel).

Comment fonctionne la bonne puissance au jour le jour ? La personne qui a développé sa bonne puissance se lève tôt. Elle commence sa journée par une routine inventée par elle-même pour activer ses quatre plans. Elle passe ensuite ses journées à prendre ses occupations professionnelles comme « pré-textes » pour goûter la vie et répandre le goût de la vie autour d’elle, quel que soit le contexte.

Comment user de la bonne puissance pour bâtir la cité ?Les personnes venues à leur bonne puissance sont toujours occupées à mettre sur pied des « entreprises éclairées » et à bâtir un Etat de droit. Elles ont définitivement remplacé la concurrence et la compétition par la synergie et la coopération. Elles créent des Groupes d’Entraînement à la Bonne Puissance (GEBP) pour se multiplier (clé de la fécondité). Ces groupes fonctionnent comme des Groupes Supports de Développement Vertical (GSDV) pour leurs membres et comme des Noyaux Générateurs d'Eveil et d'Efficacité (NGEE) pour leur environnement. C’est la multiplication des GEBP qui finit par créer dans la société une masse critique de gens éveillés. Cette masse critique (racine carré de 1% selon Braden (2009)) pousse alors toute la société à s’éveiller progressivement de ses cauchemars et à aborder de nouvelles rives de la vie, des rives plus riantes et plus luxuriantes.

2.2.            Ma perception

 

Du haut du promontoire ci-haut défini, j’observe donc l’histoire récente de ce que j’ai appelé le cœur des Grands Lacs[4]. Et que vois-je en résumé ? Guerres civiles, génocides, guerres internationales, multiplication incontrôlable de groupes armés, rébellions, viols monstrueux, déplacement de populations, etc. Pour ouvrir une ère de paix dans ces violences, instaurer des autorités légitimes. Et pour ce faire, organiser des élections où le peuple est censé s’exprimer par les urnes plutôt que par les armes.

Constat : malgré les observateurs nationaux et internationaux, ces élections sont rarement « démocratiques », c’est-à-dire réellement « du peuple, par et pour le peuple ». Elles donnent toujours gagnants ceux qui les ont préparées, c’est-à-dire ceux qui de toutes les façons détiennent déjà le pouvoir par la force des armes. Serait-on dans le faux si l’on avançait alors que ces élections sont une manière de transformer (comme au rugby !) la force en légitimité ?

Cette transformation laisse généralement dans le peuple un goût amer ! Impression d’arnaque ! Dans le meilleur des cas, la violence change d’état : de physique et manifeste, elle devient symbolique (mise en seconde zone de pans entiers de citoyens par exemple) et institutionnelle (inscrite dans les lois et les pratiques sociales). La communauté internationale peut se rendormir la conscience tranquille : la fureur a été remplacée par des gémissements inaudibles.

Ce qu’elle ne voit pas, la communauté internationale, c’est que cette violence institutionnelle est au départ d’une nouvelle spirale de la violence. En effet, elle ne peut « à terme » qu’appeler à la révolte (les gémissements se retransformant en fureur), révolte suivie immanquablement d’une répression. Et d’autres élections du même goût !

En 2015, « le terme » est en train d’arriver très vite, avec la fin des mandats autorisés par les Constitutions Nationales et la nécessité de réviser celles-ci pour permettre à ceux qui les ont pourtant rédigées de poursuivre tranquillement leur bonhomme de chemin, au mépris de l’ alternance politique qui se révèle alors comme n’ayant jamais été sérieusement envisagée. Le cas du Burundi est un cas d’école à cet égard. Et les deux autres pays se trouvent, mutatis mutandis, sur la même pente. Triste train du « plus ça change, plus c’est la même chose » !

Jean Ziegler a pourtant bien vu quand il a écrit que

La démocratie n’existe vraiment que lorsque tous les êtres qui composent la communauté peuvent exprimer leurs vœux intimes, librement et collectivement, dans l’autonomie de leurs désirs personnels et la solidarité de leur coexistence avec les autres, et qu’ils parviennent à transformer en institutions et en lois ce qu’ils perçoivent comme étant le sens individuel et collectif de leur existence (Ziegler2002 : 18) 

Mais comment, dans notre région, donner chair à ces paroles de feu ?

3.      Travail de vérité

 

3.1. Comprendre

 

Pour espérer incarner un jour cette démocratie si bien décrite par Jean Ziegler, nous devons commencer par essayer de comprendre où se trouve le défaut qui fait que nos « révolutions » aggravent les maux auxquels elles sont censées mettre un terme. D’où vient cette maladie du « toujours plus de la même chose » dont les symptômes sont notamment le parti au pouvoir qui tourne quasiment en parti unique, le refus de l’alternance politique, le rôle immense et budgétivore dévolu à la police, à l’armée et aux services de renseignements, etc.(Lire Sharp 2009) ?

 

Je propose de reprendre ici le concept de bonne puissance et de l’approfondir pour lui emprunter les outils de notre analyse.

3.1.1.        Approfondissement du principe de bonne puissance

 

La bonne puissance est une vision de la vie et une énergie pour faire advenir cette vision. Elle permet d’aller en profondeur et de percevoir les deux axes de la vie :

-          Un axe manifeste, l’axe horizontal où se déroule le quotidien de l’existence. C’est l’axe des conditions de vie, l’axe de l’avoir, du pouvoir, du savoir, du valoir et de leur aménagement par les sociétés humaines.

-          Un axe intérieur, caché, l’axe vertical sur lequel se développe la conscience. C’est l’axe de l’être, l’axe de la santé du corps, du cœur, de l’intelligence et de l’esprit.

Ce dont la plupart des gens ne se rendent pas suffisamment compte, c’est que l’axe vertical commande l’axe horizontal, ce qui veut dire que ce dernier manifeste le niveau de développement de la conscience. Concrètement : la relation à l’avoir, au pouvoir, au savoir et au valoir dépend du niveau de conscience atteint. Pour changer cette relation, il importe donc de changer  d’abord le niveau de conscience qui la commande.

C’est sans doute ici le défaut de nos « révolutions » : elles s’efforcent de résoudre le problème de la dictature en restant au niveau de conscience qui l’a induite ! Ce qui, évidemment, est impossible. Le niveau de conscience restant le même, la dictature se réplique dans ce qui est censé la combattre.

Voilà pourquoi il importe d’étudier de près l’axe vertical. Nous allons nous laisser inspirer par le pédagogue français Olivier Clouzot (2000) qui nous présente un modèle de croissance de l’humain à quatre niveaux de conscience. Je les décrirai à ma manière évidemment.

3.1.2.       Niveaux de conscience

 

Le niveau « socio-culturel » :Ceci est le niveau de départ de tout être humain venant en ce monde. Au commencement de sa vie donc, l’individu est pris dans ce que les philosophes appellent le « on », la foule, en dépendance totale par rapport à la socio-culture qui l’a vu naître. L’éducation ne fait que le conditionner en faisant de lui un suiveur, un « mouton de Panurge » (Rukurikirizindi en langue du Rwanda). Ici, la parole de l’individu est une simple répétition de la programmation culturelle et socio-historique. La caractéristique majeure de la personnalité à ce niveau est la peur et la soumission à l’autorité.

 

Le niveau de l’ « ego individualiste » : Si la personne parvient à vaincre la peur, elle passe au deuxième niveau où elle se construit une fausse indépendance en révolte contre la programmation socio-historique et à partir de ses blessures et appétits. C’est la construction de l’ « ego » ou « moi profane » (Jyewe babona en langue du Rwanda). C’est un niveau de grande avidité où la personne est centrée quasi exclusivement sur ses propres besoins et ses désirs, souvent au détriment de la communauté. A ce niveau, la personne est en auto-affirmation permanente et sa parole a tendance à faire taire toute parole différente. C’est pourtant ce niveau qui fournit en général les dirigeants à la société.

Le niveau de l’ « individu individualisé »: Si la personne parvient à vaincre son avidité après avoir vaincu sa peur, elle passe alors au troisième niveau où elle commence à mûrir en humanité et à remarquer la présence et la dignité des autres. Elle entre en interdépendance consciente avec eux. Elle commence à développer consciemment le « soi » ou « être essentiel » (Jyewe nyirizina en langue du Rwanda) et à se mettre au service de la croissance de l’humain chez les autres. Ici la parole est plus nuancée ; elle accepte les critiques et les remises en cause. Le besoin compulsif d’avoir raison s’estompe car l’ego est en train de devenir transparent à l’être essentiel. Une oreille attentive commence à se développer en même temps qu’une parole juste, avec de moins en moins de mensonge.

Le niveau « transpersonnel »:  Si la personne parvient à rendre permanente la conscience de son être essentiel, elle passe au niveau le plus élevé dans ce modèle, où l’être humain est accompli comme humain (Imana y’i Rwanda en langue du Rwanda). La personne arrivée à ce niveau se consacre sans réserve au développement humain de la race humaine et à l’épanouissement de toute la création. C’est le niveau des Maîtres en humanité, tels Jésus de Nazareth, Bouddha, Gandhi, Martin Luther King, Mère Térésa, le Dalaï-lama, etc. C’est à l’évidence un niveau très rare, où la parole est totalement délivrée des limites internes et externes. C’est pourtant notre destination à tous, et nous y sommes chaque fois que nous acceptons d’être qui nous sommes vraiment, « des reines et des rois » qui ne le réalisent qu’en se traitant mutuellement comme tels, ici et maintenant.

Chacun de ces niveaux fonctionne selon une logique déterminée. Et ce sont ces logiques qui établissent le lien entre l’axe vertical et l’axe horizontal de la vie.

3.1.3.       Les logiques des niveaux de conscience

 

Le niveau socioculturel fonctionne selon la logique formelle. La logique formelle est la logique du groupe et des règles collectives. Formalisée par le philosophe grec Aristote, elle comporte trois lois :

-        La loi d’identité (A=A)

-        La loi de contradiction (A≠B)

-        La loi du tiers exclu (A≠ A+B)

Le philosophe sud-américain Oscar Ichazo (1995) a montré comment cette logique « a régi pendant des siècles la société médiévale et défini un monde statique où le changement était ignoré. » Les mots-clés de la logique formelle sont : ordre, autorité, dépendance, obéissance, stabilité, droit, raison, déterminisme, centralisme, autocratie, dictature. Point n’est besoin d’être grand clerc pour remarquer que c’est la logique de fonctionnement des sociétés dites traditionnelles, largement « pré-modernes », dont notre région des Grands Lacs fait encore largement partie.

A la lumière de la troisième loi de la trialectique, la loi d’attraction que nous verrons plus loin, on découvre que « la logique formelle (LF) a en réalité deux orientations opposées :

-        La première positive ou ascendante (LFa) qui consiste à créer des normes stables qui vont donner son identité et sa cohérence à un groupe et lui permettre d’assurer sa sécurité,

-        La deuxième négative ou descendante (LFd) qui donne à ces normes une valeur absolue qui doit être imposée aux autres, même si c’est par la force et par l’élimination des opposants.

La première orientation débouche sur la tolérance par rapport aux valeurs et habitudes des autres groupes, et elle va pouvoir s’articuler avec d’autres logiques plus avancées. La seconde pousse au contraire à l’intolérance et empêche toute cohabitation avec des logiques différentes ; c’est la logique de l’autocratie, du totalitarisme, et de façon plus caricaturale encore celle du fanatisme » (Clouzot 2004 : 13).

Le niveau de l’ego individualiste fonctionne selon la logique dialectique. La dialectique est la logique de l’individu et du changement. Elle a été formalisée par les philosophes allemands Hegel, Marx et surtout Engels. Elle reprend comme suit les lois de la logique formelle :

-        La loi d’identité devient « loi du changement » ou « de la quantité qui se transforme en qualité » : en augmentant la quantité de chaleur, l’eau devient vapeur.

-        La loi de contradiction devient « loi des opposés » : l’histoire avance par la lutte des opposés (lutte des classes, de la gauche et de la droite, etc.).

-        La loi du tiers exclu devient « loi de la négation de la négation » : le neuf se construit sur les ruines de l’ancien (cf. la mode et les modèles de voiture par exemple).

Ichazo a montré comment cette logique régit la société industrielle depuis sa naissance à la Renaissance et au « siècle des Lumières » jusqu’à la période de la « mondialisation » que nous vivons. Les mots-clés de la dialectique sont : doute, esprit critique, expérience, liberté, contradiction, antagonisme, conflit, pouvoir, compétition, rapport de force, volonté de puissance, révolution permanente, etc.

A la lumière de la trialectique, on découvre que la dialectique (D) présente également

deux orientations opposées :

-          la première orientation, ascendante (Da) est celle d’une phase de croissance, comme l’est l’adolescence, où ce qui importe c’est de permettre aux individus d’affirmer leur indépendance et de se développer dans une direction où ils pourront exprimer les différentes facettes de leur personnalité ;

-         la deuxième, descendante (Dd) est celle d’une exacerbation de l’individualisme où la personne considère qu’elle a tous les droits du moment qu’elle parvient à faire valoir son point de vue ou à l’imposer grâce à son habileté ou son astuce.

Autant la dialectique peut être dynamique lorsqu’elle permet à des individus d’aller au bout d’eux-mêmes, comme c’est le cas par exemple dans le sport de compétition lorsque les règles sont respectées, autant elle peut être destructive lorsqu’elle se transforme en attitude conquérante où tout est mis au service de l’ego de quelques-uns au détriment du fonctionnement général parce que les règles collectives sont détournées ou bafouées(Clouzot 2004 :13). 

Les niveaux de l’individu individualisé et transpersonnel fonctionnent selon la logique trialectique. La trialectique est la logique de l’unité qui vient réconcilier la logique formelle, qui peut être une logique de séparation (LFd), et la dialectique qui peut être une logique de confrontation (Dd). Elle a été formalisée dans les années 1960 par le philosophe sud- américain Oscar Ichazo. Les lois de la trialectique reprennent les trois lois de la logique formelle et de la dialectique en les relativisant et en les mettant en perspective. Car la trialectique a besoin de LFa et Da pour exister.

La loi de mutation relativise la loi d’identité et la loi du changement en montrant que notre identité évolue sans cesse entre des « points de manifestation matérielle » (PMM) préétablis : l’eau est glace à 0° et vapeur à 100°, par exemple. La larve devient chenille, chrysalide puis papillon ; l’être humain est d’abord enfant, puis adolescent et enfin adulte.

La loi de circulation ou de polarité relativise la loi de contradiction et la loi des opposés en montrant qu’il n’y a pas de combat entre pôles opposés mais complémentarité et circulation d’énergie. L’exemple parfait se trouve en électricité où c’est la différence de potentiel entre le pôle positif et le pôle négatif qui permet la circulation de l’énergie.

La loi d’attraction ascendante ou descendante relativise la loi du tiers exclu et celle de la négation de la négation. Plus il y a inclusion, plus il y a attraction ascendante, vers un PMM plus riche, plus complexe et moins violent ; plus il y a exclusion, plus il y a attraction descendante vers un PMM plus fruste et plus violent.

Les mots –clés de la trialectique sont : interaction, coopération, égalité, tolérance, équilibre, cohérence, complémentarité, solidarité, unité d’un processus, totalité des éléments d’un système, responsabilité, conscience, transparence, empathie, compassion, discernement, pensée juste, etc.

La trialectique est la logique à venir, dans laquelle les franges les plus évoluées de l’humanité sont déjà entrées. C’est la logique de la maturité, logique de l’« ADULTE » et de l’« ENFANT LIBRE » (en Analyse Transactionnelle). Elle « réconcilie les contraires ». Elle dira par exemple que « ton ennemi est ton meilleur ami » (il te révèle en effet tes peurs et te pousse à les transcender pour évoluer), que « tu as intérêt à soigner ton opposition si tu veux rester démocratiquement vigoureux » (car l’opposition voit mieux que toi les défauts de ton système et la prise en compte de ses avis te permet de te corriger), etc.

Les Rwandais raisonnaient trialectiquement lorsqu’ils ont ciselé cet aphorisme : « Byago ntugahore kandi ntugahere.» (Pourvu qu’il ne soit pas permanent, le malheur est un bon précepteur). Si nous ne parvenons pas à tirer de profondes leçons d’humanité de nos violences en tous genres, c’est en vain que nous aurons souffert. Et la souffrance continuera donc, puisqu’elle ne se sera guère transmutée en sagesse.

3.2.             Les raisons du « toujours plus de la même chose »

3.2.1.       Des outils appropriés pour comprendre et changer la donne

 

Le modèle des niveaux de conscience et de leurs logiques permet de comprendre ce qui se passe sur l’axe horizontal (le « faire ») de notre vie, notamment pourquoi et comment fonctionnent nos sociétés. Avec ce modèle, on comprend en effet tout de suite comment des « egos individualistes » peuvent, – en jouant sur la peur -, utiliser des « egos socio-culturels » pour assouvir leur propre avidité sous des dehors de servir le bien commun !

Et, ce qui ne gâte rien, ce modèle permet également de déconstruire tout cela dans un langage assez neutre pour couper court aux passions qui généralement caractérisent les débats dans le domaine socio-politique. Car ici on décrit les mécanismes sans s’attaquer aux personnes.

Enfin, notre expérience[5] montre que l’usage de ce langage sur le terrain permet de donner aux gens le goût du développement vertical. Ce qui, nous le verrons bientôt, est très important pour changer le paradigme dialectique qui gouverne l’action à présent.

3.2.2.      La cause du dérapage des élections

 

Voici, selon notre modèle, la clef de compréhension de ce qui se passe lors des élections en société post-conflit : dans une société régie par une logique formelle rendue descendante par la crise, vous introduisez une démarche de type dialectique[6]. Elle se transforme illico en dialectique descendante parce que les règles collectives sont déjà perverties. Il faut ici rappeler et souligner l’observation d’Ichazo citée plus haut à propos de la dialectique:

Autant la dialectique peut être dynamique lorsqu’elle permet à des individus d’aller au bout d’eux-mêmes, comme c’est le cas par exemple dans le sport de compétition lorsque les règles sont respectées, autant elle peut être destructive lorsqu’elle se transforme en attitude conquérante où tout est mis au service de l’ego de quelques-uns au détriment du fonctionnement général parce que les règles collectives sont détournées ou bafouées (Ichazo 1995).

Mais comme il y a des observateurs, les organisateurs vont tout faire pour simuler le fair play. Les non-avertis et les crédules n’y verront que du feu !

Mais s’il y a quelqu’un qui n’est pas dupe du tout, c’est bien le peuple concerné qui est assez fin pour ironiser sur le résultat de ces élections, comme ces Rwandais qui en 2003 disaient à propos de la victoire du président Paul Kagame : « Twaramubeshye ngo tuzamutora, aratubeshyera ngo twaramutoye », entendez : « Nous lui avons menti (sous-entendu : lors de sa campagne) que nous allions voter pour lui et il a menti (sous-entendu : après les élections) à notre sujet en disant que nous l’avions élu » ! Humour noir qui en dit long sur une sorte de « contrat social pervers » (en effet et le peuple et ses dirigeants sont d’accord qu’ils se mentent mutuellement!) qui peut s’instaurer subrepticement dans une société. Peut-on changer cette donne ? Oui, notre modèle le permet.

3.3.             Pour une démocratie plus authentique

 

3.3.1.       Mettre un terme au « toujours plus de la même chose »

 

Pour une démocratie à la Jean Ziegler (cf. définition citée supra) caractérisée par des élections plus authentiques, la société civile[7] doit viser la fin du « toujours plus de la même chose » relevé dans notre constat loyal. Pour cela elle doit rechercher l’instauration dans la société globale d’un « changement de changement ». Qu’est-ce que cela veut dire ?

Les thérapeutes de Palo Alto ont instauré une distinction entre « changement 1 » et « changement 2 ». Ils ont reconnu que le changement résulte de l’apprentissage. Or, Gregory Bateson relève quatre niveaux d’apprentissage. Le niveau 0 correspond à l’arc réflexe : un même stimulus provoque automatiquement une même réponse ; le niveau 1 correspond au conditionnement : ex. le chien de Pavlov ; le niveau 2 correspond au processus de généralisation, c’est-à-dire de transfert d’un conditionnement à d’autres contextes. Le niveau 3 d’apprentissage réclame une réinterprétation, un « recadrage » de la réalité qui génère un changement de mentalité. Jusqu’au niveau 2, les apprentissages conduisent au « changement 1 » qui renforce l’homéostasie des systèmes ; seuls les apprentissages du niveau 3 sont capables de générer un « changement 2 », soit un changement vertical du système (lire Kourilsky 2004).

Le « changement 1 » - horizontal - est comme un changement de danseurs qui laisse intacte la mélodie ; c’est ce que nous avons eu jusqu’ici : des remplacements de danseurs par d’autres qui dansent la même mélodie du mensonge et du meurtre. Et « plus ça change, plus c’est la même chose » !

Ce qu’il nous faut poursuivre maintenant, c’est le « changement 2 » -vertical-, un changement de mélodie qui oblige les danseurs à danser autrement. Remplacer la mélodie du mensonge et du meurtre par celle de la vérité et de la vie. Il faut pour cela élaborer une méthodologie qui ne déclenche pas immédiatement les foudres du pouvoir en place, une méthodologie qui ne soit donc pas perçue d’emblée comme menaçant le pouvoir des gens en place, mais comme leur ménageant à eux aussi un accès à leur bonne puissance[8]. Et s’il y en a parmi eux quelques-uns qui sont réfractaires à la bonne puissance[9], la méthodologie préconisée doit pouvoir neutraliser leur négativité en la rendant manifeste. Car ils ne sont nuisibles que cachés derrière des discours démagogiques dont la fonction latente est d’occulter leurs intentions et pratiques inavouables.

En faisant cela, cette méthodologie enclenche le dépassement de la logique dialectique vers la trialectique : elle fait en effet passer de la logique de la guerre (recherche de la suppression de l’autre – fausse puissance !) à celle de la danse (recherche de la circulation d’énergie entre les « adversaires » transformés en « partenaires » - bonne puissance !). Nous l’appelons « méthodologie de troisième niveau » en sous-entendant par cette appellation le troisième niveau de conscience chez Olivier Clouzot, la troisième logique chez Oscar Ichazo et le troisième niveau d’apprentissage chez Gregory Bateson.

3.3.2.      La méthodologie de troisième niveau

 

Son but… Le but de la méthodologie de troisième niveau est d’ « exposer et guérir les origines du conflit social » selon les termes de cette citation de

David R. Hawkins :

Nous pouvons observer que, tout au long de l’histoire, la société a essayé de « traiter » les problèmes sociaux par une action législative, la guerre, la manipulation économique, les lois et les interdictions – toutes des manifestations de force  - pour voir que les problèmes persistent, en dépit du traitement. Les gouvernements (ou les individus) qui agissent selon une position de force [fausse puissance][10] sont myopes, mais pour l’observateur sensible, il est évident que les conditions du conflit social ne disparaîtront pas tant que les origines sous-jacentes n’auront pas été exposées et « guéries ». La différence entre traiter et guérir est que dans le premier, le contexte reste le même, tandis que pour le dernier, la réponse clinique est le fruit d’un changement de contexte [recadrage], qui provoque une suppression totale de la cause et des conditions, au lieu d’une simple guérison des symptômes. /…/ A partir des thérapies individuelles, nous pouvons étendre notre considération au contexte social général, dans lequel le patient ne peut être vraiment soigné ou fondamentalement guéri, que s’il invoque le pouvoir de compassion, pour lui-même et les autres. Alors le guéri peut devenir guérisseur [bonne puissance](Hawkins 2005 : 76-77).

Hawkins a dressé ce qu’il appelle la « Carte de la conscience humaine » en utilisant le test kinésiologique pour calibrer les différents niveaux de la conscience. Il a pu ainsi confectionner un instrument qui pour nous démontre l’importance de la bonne puissance. Il écrit : 

La Carte de la Conscience éclaire d’une lumière nouvelle le cours de l’histoire. La distinction entre force [fausse puissance] et pouvoir véritable [bonne puissance] est très importante pour cette étude. Nous pouvons par exemple examiner une époque historique comme la fin du colonialisme en Inde. Si nous calibrons la position de l’empire britannique à cette époque, qui était une période d’intérêt personnel et d’exploitation, nous nous apercevons qu’elle était bien au-dessous du niveau critique de 200 sur l’échelle de la conscience. La motivation du Mahatma Gandhi (calibrée à 700) était très proche du sommet de la conscience humaine normale. Gandhi triompha dans sa lutte, parce que sa position était d’un pouvoir beaucoup plus grand. L’Empire britannique représentait la force (calibrée à 175), et chaque fois que la force se heurte au pouvoir, elle finit par perdre (Hawkins 2005 :77).

 

Nous avons trouvé très éclairant de mettre en regard les niveaux de conscience du modèle d’Olivier Clouzot et ceux de celui de Hawkins dans le tableau suivant :

 

Modèle O.CLOUZOT

Eveil et verticalité

Modèle David R.HAWKINS

Pouvoir contre force

Ego socio-culturel (Rukurikirizindi)

Honte (niveau d’énergie 20)

Culpabilité (30)

Apathie (50)

Chagrin (75)

Peur (100)

Ego individualiste (Babona)

Désir (125)

Colère (150)

Orgueil (175)

Individu individualisé (Nyirizina)

Courage (200)

Neutralité (250)

Bonne volonté (310)

Acceptation (350)

Raison (400)

Amour (500)

Joie (540)

Paix (600)

Transpersonnel (Imana y’i Rwanda)

Illumination (700-1000)

 

Sur ce tableau, nous voyons que le troisième niveau d’Olivier Clouzot commence avec le « courage », au-dessus du niveau d’énergie 200. C’est de conduire une masse critique à ce niveau que doit viser la société civile, à travers la méthodologie de troisième niveau, pour donner au peuple ce fameux pouvoir qui fonde la démocratie authentique.

Hawkins écrit :

La seule façon de renforcer son pouvoir dans le monde [dans l’horizontalité], c’est d’accroître son intégrité, sa compréhension, et sa capacité de compassion [travail dans la verticalité]. Si les races et les peuples de l’espèce humaine peuvent parvenir à cette réalisation, la survie de la société humaine et le bonheur de ses membres sont assurés. L’effet initial de la prise de responsabilité pour la vérité de sa propre vie est d’élever les niveaux inférieurs d’énergie à 200, qui est le niveau critique auquel le pouvoir apparaît initialement, et le tremplin pour accéder aux niveaux supérieurs. Le Courage de faire face à la vérité finit par conduire à l’Acceptation, où un pouvoir supérieur apparaît au niveau 350. Ici, il y a une énergie suffisante pour résoudre la plus grande partie des problèmes sociaux. Cela, à son tour, mène à un pouvoir encore plus grand à 500, le niveau de l’amour. Connaître nos propres faiblesses, et celles des autres, éveille l’indulgence et la compassion. La compassion est la porte de la grâce, de la réalisation finale de qui nous sommes et de la raison pour laquelle nous sommes ici, et de la source suprême de l’existence(Hawkins 2005 :273). 

La manière … Voici les différentes étapes de la méthodologie de troisième niveau telle que pratiquée par l’Association Modeste et Innocent :

-          Instaurer un espace protégé dans lequel raconter les injustices subies, les souffrances endurées et les espérances cachées.

-          Prendre conscience de la récurrence de la violence (« toujours plus de la même chose ») et comprendre les mécanismes à l’œuvre (= « exposer les origines du conflit social ») en utilisant l’outil des niveaux de conscience et leurs logiques, ce qui permet de ne pas personnaliser les situations et d’éviter ainsi les passions.

-          Pour arrêter la spirale de la violence, enclencher le changement véritable, le changement 2, en passant de la primauté de l’horizontal (ibintu = les formes, les conditions de vie) à la primauté du vertical (ubuntu = l’essence, la vie elle-même) (AMI 2008)[11]. Initier au développement vertical des personnes issues de communautés et d’organisations.

-          Entraîner les personnes formées à dynamiser leurs organisations et communautés d’origine en créant en leur sein des « Groupes d’Entraînement à la Bonne Puissance » (GEBP) qui fonctionnent pour leurs membres comme des « Groupes Support de Développement Vertical » (GSDV) et pour leur environnement comme des « Noyaux Générateurs d’Eveil et d’Efficacité » (NGEE).

-          Enfin, établir une synergie de qualité entre les organisations et communautés dynamisées pour une société en équilibre, une société qui construit son économie, sa politique et sa culture d’abord pour favoriser la santé physique, émotionnelle, mentale et spirituelle de ses ressortissants (= « guérir les origines du conflit social »).

Conclusion

C’est une telle société « en équilibre » qui peut mettre en œuvre une démocratie authentique, celle où « tous les êtres qui composent la communauté peuvent exprimer leurs vœux intimes, librement et collectivement, dans l’autonomie de leurs désirs personnels et la solidarité de leur coexistence avec les autres [dialectique ascendante], et transformer en institutions et en lois [logique formelle ascendante] ce qu’ils perçoivent comme étant le sens individuel et collectif de leur existence.




[1]Ainsi, un Hutu et un Tutsi qui veulent avoir une vue constructive de leur pays doivent-ils accepter  de se laisser corriger et compléter l'un par l'autre dans leur perception du pays. C'est là le seul bon point de départ pour la reconstruction de l'unité nationale. Sans cela, tout projet se perdra nécessairement dans les marécages de l'idéologie raciste, latente ou manifeste.

[2]Chercher à supprimer la diversité ethnique ou régionale suppose une trop grande peur de leur possible négativité dans le domaine politique. Compte tenu de ce qui nous est arrivé, je vois la grandeur de l'intention. Je trouve cependant la manière dangereuse et aléatoire. Cette peur en effet conduit, à terme, à un appauvrissement culturel et à un monolithisme non moins pernicieux que les divisions redoutées. Sans compter que cette prétendue suppression, affichée dans le discours, occulte en fait le processus, réel celui-là, de "tribalisation" de la société. Pour empêcher efficacement l'ethnie et la région de devenir pertinentes en politique, il me semble qu'il n'y a qu'une voie : consacrer le principe de l'excellence, qui fait passer la capacité et la rigueur avant toute forme d'accointance.

[3]J’ai même reçu des Prix pour cela : le Prix de la Paix de Pax Christi International 1998 et le Prix Theodor Haecker 2003 de la Ville allemande d’Esslingen am Neckar « pour le courage civique et la sincérité politique ».

[4]La dite Conférence Internationale sur la Région des Grands Lacs (CIRGL) compte en effet quant à elle 11 pays membres.

[5]A travers l’Association Modeste et Innocent (AMI), une ONG de droit rwandais, qui œuvre à la guérison des traumas post-génocide, la réconciliation et l’éveil de la conscience citoyenne dans la population rwandaise. Voir son site : www.ami-ubuntu.net .

[6]Les élections sont en effet de type dialectique puisqu’il s’agit d’une compétition de candidats basée en principe sur des règles censées leur assurer une égalité de chances.

[7]Ce ne sont en effet ni le monde privé ni le pouvoir public qui vont changer la donne, mais bien la société civile qui a en charge la formation d’une conscience citoyenne plus au service du bien de « Nous Tous », le fameux « bien commun. »

[8]Dans cette méthodologie, on donne aux dirigeants envie de développer leur bonne puissance en leur faisant comprendre qu’un dirigeant mû par la bonne puissance rend puissant tout le peuple, tandis que celui qui est mû par la fausse puissance ne fait que l’opprimer. Et comme « on récolte toujours ce qu’on a semé »,- la vie avec la bonne puissance, la mort avec la fausse puissance-, les dirigeants intelligents comprennent tout de suite de quel côté se trouve leur intérêt bien compris !

[9]Dans son livre intitulé La ponérologie politique, le psychologue polonais Andrew M. Lobaczewski fait état de l’existence de 6% de sociopathes dans la population de tout groupe donné et surtout parmi ses dirigeants. Leur caractéristique principale est le manque apparent de conscience ou d’empathie envers les autres êtres vivants. Ils peuvent ainsi programmer la mort d’autrui en prenant tranquillement leur petit déjeuner ! LireLa ponérologie politique : la science de la genèse du mal, appliquée à des fins politiques sur  (http://pilulerouge.com/pp/).

[10]Les crochets sont de Laurien Ntezimana.

[11]Lire Approche ubuntu de la réconciliation au Rwanda : aux sources de la méthode de l’Association Modeste et Innocent, Huye, 2008.

Référence Bibliographique: 

Ami 2008. Approche ubuntu de la réconciliation au Rwanda : aux sources de la

méthode de l’Association Modeste et Innocent. Huye : AMI.

Braden, G 2009.  La guérison spontanée des croyances. L’éclatement du paradigme

des fausses limites.Paris : Editions Ariane.

Clouzot, O 2004. La logique de l’unité, l’esprit relatif et l’esprit absolu. 

Etudes Holistiques 30.

Clouzot, O 2000. Eveil et verticalité. Essai sur la transcendance et sur le chemin de

transformation qui y conduit. Paris: Le Souffle d’or.

Hawkins,  D R 2005. Pouvoir contre force. Les déterminants cachés du comportement

humain.Paris : Guy Trédaniel, 2005.

Ichazo, O 1995. De la métaphysique à la protoanalyse. Traduit en Français

par O.Clouzot, Etudes Holistiques.

Kourilsky, F 2004. Du désir au plaisir de changer, Paris: Dunod.

Sharp, G 2009. De la dictature à la démocratie. Un cadre conceptuel pour la

libération.Paris: L’Harmattan.

Ziegler, J 2002. Les nouveaux maîtres du monde et ceux qui leur résistent.                        

Paris : Arthème Fayard.

 

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