LA MONTÉE DES NATIONALISMES EN EUROPE

Abstract: 

The European Union is undergoing a multifaceted crisis of which the chronicler outlines three salient aspects, namely: the financial, the social and political aspects. The financial aspect is tied up with the 2008 world financial meltdown as well as the present Greek debt crisis. The social aspect is, in certain way, linked with the financial and economic crisis of which the consequences are austerity measures in social security, salary reduction, unemployment, etc. The economic and social crises led to two political consequences, namely: the weakening of the European community project, the rise of nationalistic extremism.

 

The extent of this crisis may lead to believe that the European Union is about to collapse. However, the 60 years of experience show that moments of crisis have often contributed to strengthening and deepening the European project. This leaves people with the hope that even the present crisis could lead to a positive outcome. Yet nothing is guaranteed. The suggestion is that the future of the European Union lies in an eventual democratic and ethical leap.

 

 

 

L’Union européenne vit une période de crise très sérieuse, au point que les craintes d’un éclatement ne sont pas totalement absentes, mais très probablement pas justifiées. Cela dit, l’histoire des soixante dernières années montre que, jusqu’à présent, les moments de crise ont contribué finalement à renforcer et approfondir le projet européen. On peut espérer qu’une fois de plus il en sera ainsi, mais rien n’est gagné.

1.       Quelle crise ?

On parle beaucoup de crise en Europe : il vaudrait mieux parler de crises au pluriel. Il y a une crise financière : l’euro est dans la tourmente ; il y a aussi une crise sociale ; il y a enfin une crise politique, une crise de gouvernance. Ces crises sont liées entre elles et sont interdépendantes.

 mais très probablement pas justifiéesaccès à partir de l'arin. près 14h (sauf à des prix exorbitants).

1.1.              Les subprimes et la crise financière

L’Europe, comme toute l’économie mondiale, a subi fortement les conséquences de la crise des sub-primes déclenchée aux États-Unis. Cette crise a manifesté combien toutes les économies nationales ou régionales, via le système financier, sont interdépendantes, un événement local et particulier grave ayant des conséquences quasi immédiates sur toute la planète. Les effets de cette crise dans la durée ne sont cependant pas uniformes : les pays émergents sont les premiers à s’être redressés et leur reprise est vigoureuse, les États-Unis ont suivi plus mollement, mais l’Europe est à la traîne. Quant aux pays pauvres, entre autres en Afrique, ils ont été moins touchés, parce que leur économie est beaucoup moins financiarisée.

 

Au niveau de l’Union européenne, la majorité des États ont dépensé ou avancé des sommes considérables pour sauver les banques de la faillite. Dans l’ensemble, celles-ci ont assez largement récupéré, mais pour certaines d’entre elles le coût en termes de restructuration a été très élevé, et nombre de petits actionnaires ont subi des pertes considérables (comme par exemple en Belgique pour la Banque Fortis, reprise par BNP - Paribas).

 

La crise financière s’est étendue à l’ensemble de l’économie. Elle a signifié pour nombre de pays européens une croissance négative du PIB en 2009, mais avec des conséquences différentes selon les pays. Certains pays n’ont finalement pas trop mal résisté, et une croissance, un peu molle cependant, est de retour : en gros, Europe du Nord et du Centre. Par contre, l’Europe du Sud souffre et inquiète, particulièrement la Grèce, le Portugal et l’Espagne, mais aussi l’Irlande. Le système financier, et dans la foulée, l’ensemble de l’économie se sont complètement effondrés en Islande, en raison d’un surdéveloppement de l’industrie financière spéculative. Ce pays qui n’est pas membre de l’Union européenne, en fait maintenant la demande, comme bouée de sauvetage. Il y a ouverture de principe, mais on ne sait pas aujourd’hui à quelles conditions.

 

Face à la crise financière, les différents États européens, principalement ceux dont les banques étaient le plus touchées, ont cherché chacun de leur côté à sauver leur système bancaire, selon des modalités différentes. Il a fallu tout un temps pour qu’on commence à envisager une réponse européenne commune, et en fait on a seulement établi une certaine convergence des plans nationaux. Dans la suite, la crise s’étendant à l’économie a exacerbé la concurrence entre les États, en jouant sur le fiscal et le social, jeu initié par la Grande-Bretagne, contre l’esprit des traités visant à la coopération. Dans ce contexte, l’Allemagne, l’économie la plus puissante de l’Union, a depuis quelques années tout centré sur son industrie d’exportation, en comprimant fortement les salaires et les garanties sociales : la pauvreté a augmenté significativement dans ce pays, de même que la part des emplois dégradés : temps partiels, intérims, petits boulots mal payés… Mais cette exportation se fait au détriment des voisins européens, qui en sont les principaux destinataires.

1.2.             La crise de la dette souveraine grecque

L’État grec est très fortement endetté, au point de s’être trouvé ne plus pouvoir faire face aux échéances du remboursement de ses dettes. Un problème sous-jacent est brusquement apparu au grand jour. Lors de l’entrée dans l’euro, la Grèce a trafiqué ses comptes et a continué à le faire ensuite, afin de masquer son endettement (avec la coopération de la banque Goldman Sachs qui a mis sa ‘compétence’, au service de cette opération d’occultation). Cet endettement grec est lié, d’une part, à un grand niveau de corruption et, d’autre part, à une inefficacité totale du système fiscal : la majorité des contribuables, principalement les plus aisés mais aussi les entreprises échappent quasi complètement à l’impôt, en raison du manque de contrôles efficaces (la fraude et l’évasion fiscale sont estimées à 14 milliards d’euros par an). L’entrée dans l’euro supposait que les pays signent un pacte de stabilité. À l’évidence,              la Grèce ne répondait pas aux critères préalables.

 

Pour des raisons politiques, on a fait semblant de ne pas voir.                 La Commission européenne avait proposé que soit mis en place un organisme de contrôle et de suivi pour tous les pays. La France et l’Allemagne ont refusé, jaloux de leur souveraineté. Le pacte prévoyait des sanctions pour les États qui ne tiendraient pas leurs engagements, entre autres un déficit de maximum 3% du budget. Les deux premiers pays de la zone euro à ne pas avoir tenus leur engagement sur ce point ont été la France et l’Allemagne (qui avait le plus insisté sur la rigueur du pacte !), et le Conseil européen a décidé de ne pas mettre en œuvre les procédures d’avertissement et éventuellement de sanctions…

 

Alors que faire face à la situation de la Grèce, et ce d’autant plus que, pour des raisons diverses, l’Espagne, le Portugal et l’Irlande risquent eux aussi de ne pas pouvoir répondre à leurs obligations ? Une première possibilité était de lâcher la Grèce, en reconnaissant qu’elle est en faillite et insolvable. Cela aurait supposé une renégociation fondamentale de ses dettes (restructuration), en la dégradant (c’est-à-dire de fait en en annulant une part plus ou moins importante,  comme on l’a fait pour l’Argentine il y a quelques années), la Grèce sortant de l’euro. Les conséquences d’une telle politique seraient redoutables.

 

Quelques grandes banques, principalement allemandes et françaises, qui détiennent de grands montants de la dette grecque, pourraient faire face, mais seraient mises en difficulté, puisque leurs créances seraient quasi effacées. Cela créerait la panique des marchés financiers, en particulier en ce qui concerne les dettes des autres pays menacés.           Le risque serait un effet de contagion ou de domino, créant une crise majeure de l’euro : les dettes souveraines de l’Espagne, du Portugal et de l’Irlande (et à terme celles de la France ou de la Belgique ?), n’apparaîtraient plus garanties. La crise pourrait s’étendre à l’ensemble du système financier mondial (comme ce fut le cas quand le gouvernement des États-Unis a laissé faillir la banque internationale d’investissement Lehman Brothers, sans mesurer l’impact de cette non-intervention sur l’ensemble du système financier, cette faillite étant le point de départ de la crise de 2008).

 

L’option du lâchage et de la faillite étant écartée, il s’est agi de trouver le moyen de sauver l’État grec. Les gouvernements de la zone euro ont eu beaucoup de difficultés et ont mis du temps pour trouver un accord à ce sujet, en particulier parce que l’Allemagne, le pays dont les banques sont le plus engagées, refusait de s’engager en raison de son opinion publique : on ne veut pas payer pour les erreurs de la Grèce. En mai 2010, on trouve enfin un accord. D’une part, la Banque centrale européenne (BCE) et le Fonds monétaire international (FMI) s’engagent ensemble pour un montant de 110 milliards d’euros à des taux réduits (environ 4%, alors que sur les marchés les taux d’emprunt pour la Grèce sont actuellement autour de 18%). D’autre part, un fonds européen de solidarité d’un montant de 750 milliards d’euros est créé pour les États en difficulté. Mais ce soutien apporté à la Grèce est lié à des mesures drastiques d’austérité et à une surveillance visant à contrer la corruption et le laxisme fiscal.

 

Cela suffira-t-il pour sauver la Grèce ? C’est loin d’être sûr : l’aide lui permet provisoirement de répondre aux échéances de ses créanciers. Mais il est de plus en plus évident que la Grèce n’arrivera pas à rembourser toutes ses dettes, d’autant plus que les mesures d’austérité imposées diminueront ses ressources. Alors ? Cette dette de 350 milliards d’euros n’est pas considérable au niveau du PIB de la zone euro (3,7%). Mais toute solution présente des risques politiques. Les Européens pourraient rembourser une partie de la dette à la place des Grecs, mais beaucoup, en particulier les Allemands, ne veulent en aucun cas payer pour ceux qui se sont endettés de façon déraisonnable.            On pourrait sinon annuler une partie de la dette grecque. Mais cela pèserait sur les banques et mettrait en faillite nombre de banques grecques. Et cela entraînerait aussi une défiance sur toutes les dettes publiques de la zone euro, et de ce fait un renchérissement important des taux d’intérêts pour tous les pays européens… Actuellement, personne ne sait comment résoudre ce problème.

1.3.             La crise sociale

La crise financière et économique a un impact important sur les conditions de vie et les ressources de la population, surtout les secteurs moins bien nantis, et cela de façon différenciée selon les pays. Les mesures d’austérité font pression sur les salaires, réduisent certains acquis de la protection sociale (réduction de la durée des allocations de chômage, retardement de l’âge de la retraite ou augmentation des années nécessaires de cotisation). Mais la crise entraîne aussi la faillite d’un certain nombre d’entreprise ou la réduction de leur activité, d’où la croissance du chômage. En même temps la précarisation de l’emploi est accentuée : contrats à durée déterminée, intérimaires, petits boulots… C’est toute l’architecture de la protection sociale qui est ébranlée, surtout dans les pays les plus vulnérables.

 

 

En protestation, un nouveau mouvement est né, celui des indignés : manifestations plus ou moins importantes en opposition aux mesures prises par les gouvernements. D’où vient cette désignation ? D’un petit livre manifeste de Stéphane Hessel, Indignez- vous ![1], vendu à plus d’un million d’exemplaires et traduit dans de multiples langues : il s’agit d’une vigoureuse protestation contre les ravages du capitalisme au nom de ses victimes. Ces protestations de la société civile, principalement en Grèce et en Espagne, mais qui s’étendent à l’heure actuelle, seront-elles capables de changer le cours des choses ? Il faut l’espérer, mais ce n’est pas évident.

2.      Les conséquences politiques de la crise

La crise économique et sociale actuelle a aux moins deux conséquences politiques importantes au niveau européen : un affaiblissement du projet proprement communautaire et une montée des nationalismes et des extrêmes droites.

2.1.             L’affaiblissement du projet communautaire

On constate à l’heure actuelle le renforcement d’une tendance déjà à l’œuvre depuis quelques années au sein de l’Union : la dynamique intergouvernementale prend le pas sur la dynamique communautaire. De quoi s’agit-il ? À partir de la CECA (Communauté européenne du charbon et de l’acier) en 1950, puis du traité de Rome qui, en 1957, institue la Communauté européenne devenue depuis lors l’Union européenne, l’idée est qu’en se mettant ensemble on est plus fort : à moyen et surtout à long terme, si pas toujours à court terme, la recherche de l’intérêt commun de l’Union est finalement dans l’intérêt de tous, même si cela suppose de la part de certains, dans l’immédiat, certains sacrifices. Pour ce faire, il est important qu’il y ait une autorité supranationale capable de prendre des décisions, dans les domaines qui lui sont statutairement délégués. Il y eut d’abord la Haute autorité du charbon et de l’acier, puis la Commission européenne. Il est important de comprendre le fonctionnement complexe de cette institution.             La Commission, au sens propre du terme, n’est pas l’ensemble des directions générales et des fonctionnaires qu’elles intègrent. La Commission est le collège des commissaires (actuellement un par pays, donc 27 membres). En principe et selon le droit, les commissaires ne représentent par leur pays ni un parti, mais bien l’intérêt commun de l’Union, tout comme les ministres d’un gouvernement ne représentent pas l’intérêt de leur région, mais celui de la nation. Le principe est là, mais il y a parfois des dérives : d’où la recherche de la part des grands pays d’avoir les postes les plus significatifs politiquement et économiquement…

 

Selon le droit européen, dans tous les domaines qui sont de la compétence propre de l’Union, la Commission a le monopole de l’initiative, c’est-à-dire de la proposition de décision, la décision elle-même étant prise pour la procédure ordinaire par une négociation entre le Conseil et le Parlement. Au cours du temps, il y a eu un déplacement de l’exercice du pouvoir, avec l’institution du Conseil européen (rassemblant les chefs d’État et de gouvernement, officiellement institué par le traité de Maastricht en 1992), lieu de la négociation des intérêts divergents des États. Par différentes procédures, des décisions de plus en plus importantes sont prises au niveau du Conseil, sans passer par le triangle Commission - Parlement - Conseil. Dans ce contexte, les grands États ont de fait une voix largement prépondérante et imposent souvent un consensus a minima.

 

Pour prendre un exemple significatif, le traité de Lisbonne a attribué de nouvelles compétences à l’Union (dans le domaine de l’énergie, de la recherche et des affaires étrangères, principalement). La mise en œuvre de ces compétences requiert des ressources, et donc soit une nouvelle répartition des dépenses, soit une augmentation du budget. Les deux postes les plus importants du budget sont l’agriculture et l’aide régionale. La France ne veut pas entendre parler d’une réduction de l’agriculture, car elle en est le premier bénéficiaire ; la Pologne ne veut pas entendre parler d’une réduction de l’aide régionale, car les nouveaux pays d’Europe centrale en sont les principaux bénéficiaires… Il faudrait donc augmenter le budget. La Commission est en charge de proposer le budget communautaire, budget qui doit être adopté à la fois par le Conseil et par le Parlement, dans une procédure de codécision. Mais cinq gouvernements (Allemagne, France, Royaume-Uni, Autriche et Finlande) ont envoyé une lettre officielle commune aux institutions de l’Union déclarant que, jusqu’en 2020, l’augmentation du budget ne pourra par dépasser celle de l’inflation. Cette démarche court-circuite la procédure communautaire et aura pour conséquence l’impossibilité d’exercer les compétences communautaires reconnues par les traités, comme l’objectif d’atteindre 3% du PIB pour la recherche.

 

C’est ainsi aussi qu’il n’y a pas eu de perspective commune pour affronter la crise financière, mais une harmonisation minimale des réponses nationales. Il n’y a pas non plus de véritable recherche d’une perspective d’avenir commune face à la crise grecque, mais une navigation à vue où on pare au plus pressé. Autrement dit, il y a de moins en moins de projet commun.

 

Dans le passé, les crises ont toujours en finale fait avancer le projet européen. Il devient de plus en plus évident qu’il ne suffit pas d’avoir une monnaie commune, mais que celle-ci doit pouvoir s’appuyer sur une politique économique commune, et donc une gouvernance économique de la zone euro, et à plus long terme de l’Union. Sinon on risque l’éclatement. On peut espérer que le choc sera salutaire, mais rien n’est gagné.

2.2.            La montée des nationalismes et des extrêmes droites

La crise économique frappe durement les petits revenus, y compris ceux de la partie basse des classes moyennes, la montée du chômage frappe très largement les jeunes, les emplois précaires se multiplient et le stress au travail augmente. L’insécurité sociale est durement ressentie, la croissance du chômage et en particulier du chômage de longue durée entraîne un véritable déclassement social. Le panorama est sombre. L’impression prédominante est que l’Union européenne contribue à cette dégradation en livrant notre économie à la brutalité de la mondialisation, plutôt que de nous en protéger.

 

À cela s’ajoute, le changement du visage de l’immigration. Lors de la reconstruction d’après-guerre, il y a eu une forte immigration du Sud européen, peu industrialisé (Italie, Espagne, Portugal), vers le Nord fortement industrialisé (Allemagne, Belgique, France…) : immigration européenne qui s’est intégrée par le travail, non sans souffrance souvent. Il y a eu une seconde vague d’immigration plus récente, principalement arabo-turque, qui s’est aussi intégrée par le travail, mais un peu plus difficilement, la culture musulmane plus différente ne facilitant pas les choses.

 

Cette immigration, tout comme la première, a pris racine dans les pays récepteurs : les familles se sont établies, les enfants ont majoritairement acquis la nationalité du pays d’accueil. Puis est venue la crise économique et la restructuration de la production dans le cadre de la mondialisation, dès le milieu des années 80. Le chômage a augmenté, les premières victimes en ont été les étrangers ou ceux qui étaient d’origine étrangère. Massivement les jeunes nés de ces familles immigrées n’ont pas trouvé de débouché dans le travail, et ont été livrés  au désoeuvrement et à la pauvreté. Ce n’est donc pas un hasard si la petite délinquance s’est davantage développée dans ce milieu (ce n’est ni un phénomène de culture et encore moins de religion, mais de relégation sociale).

 

Par ailleurs, toujours à propos de l’immigration, l’expérience difficile de non-intégration ici, couplée au sentiment d’humiliation engendré par les interventions militaires américaines et européennes en Irak et en Afghanistan, alimente un réflexe identitaire, dont le port du voile par les femmes est une expression (ce signe étant vécu de façons très diverses par les femmes elles-mêmes, allant d’une expression personnelle libre de dimension proprement spirituelle à un alignement sous l’autorité des hommes et des préceptes fondamentalistes).

 

Dans ce contexte d’insécurité économico-sociale grandissante, d’incapacité des pouvoirs politiques nationaux et européens d’offrir des perspectives positives, de sentiment d’insécurité physique (souvent exagéré) dans certaines villes, d’affirmation identitaire visible de l’islam (alors qu’on avait cru à un effacement des religions), s’exprime une demande de protection. L’Europe étant perçue comme jouant le jeu de la mondialisation, on en appelle à une revalorisation du périmètre national ou régional. On fait prévaloir l’intérêt des nantis, intérêt plus ou moins raboté par la crise, sur la solidarité : l’Allemagne ne veut surtout pas payer pour la Grèce ; le Nord de l’Italie, le Pays Basque et la Catalogne, la Flandre, régions plus riches que le reste de l’État dont elles font partie, revendiquent leur autonomie, la revendication culturelle couvrant souvent un intérêt économique. La dérive intergouvernementale de l’Europe va aussi dans ce sens.

 

Ce discours politique nationaliste croise, sans s’y identifier dans tous les cas, un discours populiste clairement de droite dure ou d’extrême droite. Ce discours en appelle à davantage de sécurité et de contrôle de la société, quitte à sacrifier les libertés ; il en appelle à davantage de répression : dans presque tous les pays, le taux de justiciables condamnés à la prison est en forte augmentation, entraînant une surpopulation des prisons ; il en appelle enfin à l’expulsion des immigrés non intégrés dans le travail (on a quand même besoin d’immigrés pour les multiples travaux et services non valorisés par la société) et pratiquement à une abolition du statut de demandeur d’asile… De plus, ce mouvement, dans la plupart des cas, met en cause le système de protection sociale et l’État providence, qui est dit entretenir les paresseux. Les partis explicitement porteurs de ce genre de discours se développent et s’affirment. Pour des raisons électoralistes, les partis de droite ou de centre droit adoptent de plus en plus clairement dans leur propre discours et dans la pratique législative les thèmes sécuritaires, répressifs et xénophobes.

Conclusion

La conjoncture politique est profondément inquiétante d’un point de vue humaniste et éthique. Dans nombre de pays, les partis chrétiens ou démocrates chrétiens ont disparu en tant que tels ou, là où ils subsistent, ont perdu leur âme (s’ils en avaient une !) en s’alignant largement sur le discours nationaliste, sécuritaire et plus ou moins largement xénophobe. Les partis socialistes n’ont, pour la plupart, plus de vrai projet de société. Quant à la population, elle se désintéresse de plus en plus de la politique et devient de plus en plus eurosceptique,  tandis que le taux d’abstention aux élections augmente presque partout à chaque scrutin, laissant le champ ouvert aux populismes. Peut-on espérer un sursaut démocratique et éthique ? Il n’y en a guère de signe à l’heure actuelle. Mais l’histoire n’est pas écrite : personne n’avait prévu la chute du communisme soviétique ni l’expression collective de la voix des jeunes en Tunisie et en Égypte, avec toutes les conséquences politiques de ce phénomène, non seulement dans ces pays, mais dans l’ensemble des pays arabes. Le mouvement des indignés serait-il l’hirondelle qui annonce un printemps ?

 

 

 

 

 

 


[1]Éd. Indigène, décembre 2010. Stéphane Hessel a été résistant pendant la deuxième guerre mondiale. Il a 93 ans.

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