L’éditorial précédent (V12N1-2) a posé une question fondamentale pour les jeunes nations d’Afrique : quelle démocratie pour la paix ? En posant cette question, l’intention était de mettre en évidence une autre question qui lui est sous-adjacente : comment le pluralisme politique peut avancer progressivement vers un système consensuel qui serait propre à une Afrique d’avenir ? La réponse est simple mais peut paraître difficile et utopique: il s’agit de la «raisonnabilité » dans la politique. Il faut que le pluralisme politique africain soit raisonnable. Si la condition de la raisonnabilité est posée, c’est que l’expérience montre que là où la raison dort au point de se faire absente, elle laisse le vide aux monstruosités.
C’est ce qu’on observe à l’approche, pendant et après les élections, malgré quelques rueurs d’une Afrique émergente et prospère dans une mondialisation politico-économique promettant, mais dont les codes complexes ne sont pas si faciles à repérer et à interpréter.
La raison d’être de la Revue Ethique et Société est de tracer des horizons d’avenir. Cette note éditoriale abonde dans le même sens en touchant deux pôles caractéristiques d’une société en transition vers un pluralisme politique raisonnable. Le premier pôle est le fait que les partis politiques africains tendent à avoir un cachet identitaire, nationaliste, voire même tribale ou ethnique. La question est alors celle-ci : comment canaliser ces identités pour les converger vers une culture de citoyenneté dans un Etat moderne où les droits et les devoirs des citoyens se réclament non pas sur une base identitaire, mais sur une base légale. Le deuxième pôle est celui du lien entre la floraison des partis politiques et le degré de pauvreté dans le contexte d’une gouvernance instable. La question est ainsi posée : comment créer des partis politiques viables capables de lier le besoin de la bonne gouvernance et la capacité de défaire le piège de la pauvreté qui fait que certains partis voient le jour pour des intérêts prochains individualistes au lieu d’une politique d’avenir pour tous ?
Voilà deux problèmes posés comme guide de lecture de ce numéro.