DÉMOCRATIE ET CONSTRUCTION DE L’ESPACE PUBLIC: APPEL A CONTRIBUTION

Le Volume 14/2018 traite le thème de l’Espace Public.  Bien que notre attention portespécialement sur laCommunauté Economique des Pays des Grands Lacs, CEPGL, la question de l’espace public concerne toute l’Afrique des jeunes démocraties.

L’espacepublic évoque non seulement le lieu du débat politique, de la confrontation des opinions privées que la publicité s'efforce de rendre publiques, mais aussi une pratique démocratique, une forme de  communication, de circulation des divers points de vue. Il est le lieu symbolique où se forme l'opinion publique, issue du débat politique et de l'usage public de la raison grâce à la liberté de la presse et à la suppression de la censure.

Considéré aujourd’hui comme le socle de la démocratie, l’espace public suppose l’existence d’individus plus ou moins autonomes, capables de se faire leur opinion, non « aliénés aux discours propagandistes», croyant aux idées et à l’argumentation, et pas seulement à l’affrontement physique. Avec le concept d’espace public, c’est la légitimité des mots qui s’impose contre celle des coups. Il s’agit l’idée d’une argumentation possible contre le règne de la violence, de l’intimidation et de la culture de la peur. L’espace public est aussi l’aboutissement du mouvement d’émancipation qui consiste à valoriser la liberté individuelle, donc d’une certaine capacité à afficher publiquement ce que l’on est, et le mouvement démocratique, qui lui aussi favorise l’idée de publicité contre celle de secret et d’interdit.

Ce projet  de construction des opinions par l’intermédiaire des discussions et l’argumentation n’est pas suffisamment intégré dans l’agenda des gouvernements des pays de la CEPGL, voire en Afrique en général.Ainsi, il s’observe un quadrillage de l’espace public reléguant aux calendes grecques tout débat contradictoire sur le pouvoir et réduisant ce dernier à la seule sphère de domination.

L'Espace public est le fondement de la démocratie, en même que la démocratie elle-même doit favoriser son expansion. Une telle conception oblige de faire la différence entre l’espace commun (des solidarités primaires dominées par les nécessités naturelles) et l’espace public (des solidarités secondaires affranchies des nécessités naturelles et liées à la liberté). Il en découle donc un sujet de débat qui doit être mené dans la CEPGL où nous vivons -presque sinon en totalité- le retour ou le renforcement de l’espace public comme publicité, fait donc de manipulation et de démonstration de la loi de la force, où le citoyen n’est plus capable d’exercer publiquement sa liberté avec les autres.

Des preuves pour étayer ces propos ne manquent pas. En République Démocratique du Congo, les interdictions instinctives des manifestations pacifiques des chrétiens, des partis politiques d’opposition ou des mouvements citoyens sont devenus des pratiques courantes. Il faut y ajouter le dédoublement des partis politiques dans le but de les phagocyter, le débauchage des opposants, la restriction de la liberté de la presse, la fermeture systématique des réseaux sociaux en chaque occasion d’organisation des manifestations, la machination dilatoire au moyen de ‘‘glissement’’ maintenir le chef de l’état actuel au-delà de son mandat.  Au Burundi, la décoration de l’espace public aux couleurs (drapeaux et stèles) du parti au pouvoir, la tactique ingénieuse d’intimidation et de répression dans le but d’embastiller la pensée libre, l’inoculation de la peur dans l’opinion publique, l’interdiction des manifestations, la duplication des partis politiques,  le saccage des médias et la soumission de ceux qui existent au filtrage permanent de leurs programmes, la fermeture des médias étrangers qui ‘‘dérangent’’, la tendance à la déification de l’autorité, à la sacralisation de la cité et au messianisme politique. Au Rwanda, l’instauration de l’état disciplinaire pèse sur  des libertés politiques, taire les voix discordante  et ainsi emprisonner de l’espace public

Il faut y adjoindre les tentatives de changer les lois fondamentales sans un débat de fond et contradictoire sur des projets des constitutions à soumettre au referendum.

La réflexion sur cette thématiquerelève donc de la brulante actualité. Son examen, en effet, permet de débrouiller l’existence de deux ordres différents dans ces trois pays: celui du domaine familial, ethnique ou parti politique lié à la nécessité et celui du domaine de la ‘‘polis’’ lié à la liberté. Ce que nous y vivons aujourd’hui donne l’impression qu’il existe de plus en plus l’emprise croissante de la nécessité sur la liberté marquant sournoisement le déclin de la démocratie, pourtant, embryonnaire : il s’agit de la démocratie représentative, mais davantage de la démocratie délibérative/participative. La domestication de l’espace public n’est-elle pas en train de sonner la fin de rêve démocratique? Par conséquent, ne sommes-nous pas en train d’assister impuissamment à la réinstauration progressive des régimes totalitaires où pourra se développer (si ce n’est déjà) une forme d’oppression politique spécifique caractérisée par la dictature d’une idéologie s’exerçant au moyen de la propagande et de la violence ? Comment gérer la confusion entretenue entre le pouvoir et la domination ? Comment faire revenir le pouvoir à  démocratique à définition fondamentale comme lieu de débat contradictoire ? Que faut-il dire de ‘‘logocratie’’?Comment empêcher  nos États de se réduire en des communautés émotionnelles où seule la pratique de la tyrannie de l’intimité risque de prévaloir ? Comment veiller à ce que la venue de la démocratie délibérative et participative ne soit pas retardée out renvoyée aux calendes grecques ?

Telles sont les questions que nous devons débattre. Ainsi, nous proposons les sous-thèmes suivants tout en laissant aux contributeurs la possibilité d’en formuler d’autres dans le champ de leur compétence:

1. SOCIÉTÉS CIVILES ET DÉMOCRATIE (délai : en cours)

  1. Sociétés civiles et appropriation citoyenne de la démocratie
  2. Sociétés civiles et/ou engagement politique
  3. Mouvements citoyens et éducation à la citoyenneté
  4. Mouvements citoyens et construction de l’État de droit
  5. Mouvements citoyens et émergence de l’espace public
  6. Médias, espace public et gouvernance politique
  7. Médias et représentation politique.

2. LAÏCITÉS, RELIGIONS ET DÉMOCRATIE (délai, fin septembre 2018)

  1. Démocratisation de Dieu face à la dictature de la religion 
  2. Le discours totalitaire des nouveaux mouvements religieux.
  3. Espace public et expression religieuse
  4. Religions et construction de l’espace démocratique
  5. Espace public et culte religieux
  6. Eglises et dialogues politiques
  7. Eglises et mobilisation politique

3. PARTIS POLITIQUES, DÉMOCRATIE ET LIBÉRALISATION DE L’ESPACE PUBLIC (délai : fin décembre 2018)

  1.  Partis politiques et discussions politiques
  2. Partis politiques et mobilisations politiques
  3. Partis politiques et démocratie (représentative, délibérative et participative)
  4. Espace public et recomposition des alliances politiques
  5. Partis politiques et processus électoraux
  6. Médias et participation démocratique
  7. Médias et processus électoraux
  8. Les médias contre la démocratie ?

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